Le «méchant» sort, Harper s'isole

Harper et la culture


Stephen Harper prend-il le «monde ordinaire» pour des colons? Lorsqu'il passe par le Québec, le chef conservateur flatte les nationalistes dans le sens du poil, à la recherche des votes essentiels à sa majorité.
Mais a-t-il idée que ce nationalisme alimente une culture, comment dire, «nationale» et que ce phénomène s'est toujours concrétisé avec l'appui des pouvoirs publics?
Les coupes conservatrices s'appliquent aussi à l'industrie culturelle anglo-canadienne ? oui, elle existe!
Toronto, hier, s'est réveillée, le premier ministre Dalton McGuinty en tête. Car autant sinon plus que Montréal, la métropole canadienne profite très largement des retombées des industries culturelles.
Vancouver également commence à s'insurger, car les programmes de promotion à l'étranger permettaient à tous les Canadiens de sillonner le monde.
Les conservateurs se présentent comme le parti des campagnes : ils n'ont pas le choix, les trois plus grandes villes du pays, au coeur des industries culturelles, les ont rejetés.
Alors, M. Harper agit comme s'il ne leur devait rien et choisit ses priorités en fonction de celles du «monde ordinaire» qui vit en province ou dans les petites villes.
Il se trompe. Pensez-vous que les gens de Petite-Vallée, en Gaspésie, recevraient des artistes de qualité s'il n'y avait aucun programme gouvernemental d'appui à la culture?
Pensez-vous que les citoyens de Granby, de Rouyn-Noranda, de Baie-Saint-Paul ou de Montmagny considèrent leurs événements culturels subventionnés comme profitant à de riches artistes voguant d'un gala à l'autre?
Sans le soutien de l'État, Guy Laliberté chausserait toujours ses échasses dans Charlevoix. Aujourd'hui, le Cirque du Soleil donne du travail à des milliers de personnes et projette nombre de Québécois sur la scène internationale.
Les conservateurs, Josée Verner en tête, soutiennent que le dossier culturel n'intéresse personne, un avis partagé par bon nombre de chroniqueurs.
Je me permets de diverger d'opinion. Cette bataille sur la culture n'a rien d'un combat Québec-Montréal : les deux villes vivent de la culture, et une fois la première réaction démagogique passée et les esprits calmés, la majorité va saisir l'importance de cet enjeu.
Les artistes vedettes de la télévision de Montréal en font parfois un peu trop, j'en conviens. Certains de ces défenseurs de la culture auraient intérêt à apprendre la règle du sujet-verbe-complément lorsqu'ils s'expriment en public. Pour d'autres, un bon cours d'articulation s'imposerait.
Mais aussi malhabiles soient-ils dans leur prestation, il faut écouter le fond de leur message car comme avant-hier, au Club Soda de Montréal, ils s'expriment au nom des obscurs et des sans-grade qui forment la masse des travailleurs culturels.
Les conservateurs révèlent, dans ce dossier comme dans celui du traitement des jeunes contrevenants, le vrai fond de leur pensée. L'aile réformiste a pris le contrôle total du Parti.
Comptant sur la division du vote de gauche entre quatre partis, les conservateurs ont choisi de s'isoler à droite. Leurs multiples sondages et groupes de discussion leur ont permis de raffiner leur discours en fonction de clientèles bien définies.
En examinant les arbres sous toutes leurs coutures, le parti de M. Harper n'a pas vu la forêt qui l'entoure. Un, deux, trois électeurs ruraux peuvent détester les «artistes» bling-bling, à première vue.
Mais si ses experts avaient demandé à ces mêmes un, deux ou trois électeurs de se priver du Festival d'été, par exemple, ou de ne voir que des séries américaines traduites, la réponse aurait été différente. Le monde aime son star system québécois.


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