À l'ère des blogues et de YouTube, l'actuelle campagne électorale prendra d'assaut Internet, et le Directeur général des élections (DGE) admet que sa propre réglementation n'est pas adaptée à cette nouvelle situation. Les principaux partis politiques semblent vouloir utiliser toutes les ressources du nouveau média. Les internautes sont accueillis par une vidéo de Jean Charest sur le site Internet du Parti libéral, qui prévoit ouvrir aujourd'hui six blogues sur différents sujets d'actualité, comme la santé et l'éducation.
Sur le site de l'ADQ, on trouve pour le moment une vidéo de Mario Dumont, qui s'adresse à l'internaute pour critiquer le bilan libéral.
Mais c'est vraiment du côté du Parti québécois qu'on semble explorer le plus toutes les ressources de la Toile. Le site du PQ propose un blogue dont le premier message hier était écrit par le député Nicolas Girard, des informations aux militants qui peuvent être disponibles en baladodiffusion et sur les cellulaires et, à compter d'aujourd'hui, un vidéoreporter, Philippe Leclerc, y présentera des vidéos sur les dessous de la campagne péquiste, en promettant des «exclusivités, des confidences et des anecdotes», dit-il.
De plus, le site invite les visiteurs à devenir des «militants Web» afin de prendre la parole sur tous les forums et les blogues disponibles. Le PQ cherche également des graphistes, des webmestres et de simples internautes pour ses projets.
Rappelons que le PQ a mis en ligne la semaine dernière un site Internet critique, «bondebarras.tv», avec des vidéos de «faux» citoyens critiquant le bilan libéral. En bas de page, on dit que ce site est payé et autorisé par l'agent officiel du PQ, et le parti aurait d'autres projets en ce sens.
Par ailleurs, selon La Presse, le Parti libéral encouragerait des bénévoles à écrire des commentaires dans plusieurs blogues pour influencer les électeurs.
Au bureau du DGE, on avoue un certain retard de la loi électorale devant tous ces nouveaux développements. «Internet a beaucoup évolué depuis la campagne de 2003, explique Myriam Régnier, porte-parole du DGE. Pour le citoyen, Internet, ce n'est plus seulement pour chercher de l'information: c'est maintenant un moyen de diffuser de l'information. Nos règles ne sont pas nécessairement adaptées à toutes les situations.»
Le DGE ne craint pas l'utilisation d'Internet par les partis politiques, «parce qu'ils sont bien informés que leurs dépenses sur Internet doivent être comptabilisées comme dépenses électorales, ajoute-t-elle. Ce qui est plus difficile, c'est l'intervention de tiers anonymes».
Par exemple, sur le nouveau site Internet EspaceCanoe, on pouvait trouver hier des extraits de l'émission Infoman qui se moquait du Parti libéral, extraits récemment mis en ligne par des internautes anonymes.
Sur YouTube, on peut également trouver une série de vidéos très critiques envers le Parti libéral, lesquelles seraient produites par un petit groupe surnommé «Les Alarmistes», selon les informations du Devoir, groupe qui ne serait pas relié à un parti politique en soi.
Mais comment le vérifier? «Des outils qui militent contre un candidat ou un parti peuvent être considérés comme une dépense électorale, explique Myriam Régnier. Mais on ne peut pas faire la police d'Internet. Nous serons toutefois obligés d'enquêter si nous recevons des plaintes.»
En ce qui concerne les blogues, qui risquent de devenir rapidement un enjeu important lors de cette campagne, le DGE pourrait considérer «qu'il s'agit de l'équivalent de lettres aux lecteurs, mais encore là, nous devrons analyser au cas par cas», ajoute Mme Régnier.
Ces vidéos et ces blogues peuvent-ils avoir une influence véritable? Il reste que la majorité des gens continuent encore à s'informer à la télévision, alors que les différentes chaînes sortent l'artillerie lourde pour proposer la plus large couverture électorale possible.
L'expérience qui fait le plus jaser depuis hier est sûrement celle de TVA, qui, en plus de suivre les chefs de parti dans les autobus électoraux comme tous les autres médias, a son propre autobus électoral, qui se rendra partout au Québec pour le compte de TVA, du Journal de Montréal et du groupe radiophonique Corus, associé au projet.
Cet autobus, qui arbore d'immenses photos des vedettes de l'information de TVA, fera le tour d'une cinquantaine de comtés en mettant en scène l'ancien ministre libéral Jean Lapierre, qui rencontrera tous les jours les citoyens dans les centres commerciaux, les restaurants, les hôpitaux, etc. Jean Lapierre rendra compte de son voyage quotidiennement chez Paul Arcand, au 98,5 FM (la radio du groupe Corus), ainsi qu'à LCN et à TVA.
Comme M. Lapierre était encore tout récemment ministre libéral, n'y a-t-il pas un problème d'éthique à le mettre ainsi en valeur? «Nous nous sommes posé la question, explique Nicole Tardif, porte-parole de TVA. S'il s'agissait d'une élection fédérale, on ne lui aurait pas donné un tel rôle. Mais pour une élection provinciale, nous n'avons pas de problème d'éthique.»
L'autobus doit également véhiculer un chroniqueur du Journal de Montréal, des journalistes radio de Corus... et même un jeune cyberreporter, qui livrera des reportages vidéo sur le site Canoë de Quebecor.
Internet inquiète le DGE
La réglementation québécoise n'est pas adaptée à la nouvelle réalité électorale
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