Il faut tirer la sonnette d'alarme au Québec sur les mutilations génitales féminines

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La logique multiculturaliste à l'oeuvre : la barbarie importée par l'immigration

L'ablation du clitoris (l'excision) ou encore la suture des lèvres de la vulve (l'infibulation) sont des mutilations génitales féminines (MGF) qui se pratiquent dans plusieurs pays sur la planète. On estime que plus de 200 millions de jeunes filles et de femmes toujours en vie ont ainsi été mutilées. Quand on m'a confié que des jeunes filles nées ici, au Québec, en seraient victimes, j'ai eu de la difficulté à dormir. Comment cela est-il possible que certaines de «nos filles» soient ainsi meurtries au plus profond de leur chair et de leur âme sans que l'on fasse quoi que ce soit pour arrêter ces pratiques destructrices? 


Lors de mes voyages en Afrique, j'ai été passablement troublée de rencontrer des femmes victimes de mutilations génitales. Comment ne pas être empathique et faire de la projection en imaginant sa vie sans plaisir sexuel, avec le traumatisme qui en découle, les problèmes d'infection, la douleur, l'incontinence, les difficultés à l'accouchement et j'en passe. Cette réalité m'a toujours profondément bouleversée.


Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), trois millions (3 000 000) de filles sont à risque d'être excisées chaque année. Alors, quand j'ai su que le Réseau d'action pour l'égalité des femmes immigrées et racisées du Québec (RAFIQ) tenait un forum Zéro tolérance à l'égard des mutilations génitales, j'ai d'emblée voulu parler de cet enjeu profondément humain (ou inhumain, c'est selon). L'intérêt s'est décuplé quand j'ai appris que des jeunes Québécoises, issues de l'immigration, subiraient ces pratiques infiniment douloureuses et profondément handicapantes. L'angle de mon texte s'est modifié. Mon but n'est plus d'en parler, mais bien de tirer la sonnette d'alarme.


Les vacances scolaires pour aller faire exciser sa fille


Soyez sans crainte, pratiquer des mutilations génitales est un crime au Canada. Ce qui n'empêcherait pas certains parents de profiter des vacances estivales pour amener leur fille à l'étranger pour qu'elle subisse une excision ou une infibulation. C'est ce que m'a confié Djenabou Sangaré, intervenante au RAFIQ. C'est elle qui organise le forum, le 6 février prochain, dans le cadre de la Journée internationale contre les mutilations génitales. Pour madame Sangaré, il est urgent et fondamental de lever le voile sur cet ultime tabou ; d'interpeller la population, les médecins, les politiciens, les médias, les forces de l'ordre et tous les hommes et les femmes qui travaillent auprès des jeunes et des communautés immigrantes à garder l'œil ouvert afin de mettre un terme à ces voyages de l'horreur.


D'autant que de faire passer à l'étranger une personne mineure habitant habituellement sur le territoire canadien afin qu'elle subisse un acte qui constituerait une infraction au Canada est aussi un crime. L'indifférence et l'ignorance doivent cesser. Madame Sangaré affirme avoir personnellement rencontré de ces jeunes Québécoises blessées dans tout leur être. Certaines d'entre elles auraient été mutilées en très bas âge, avant 5 ans, et d'autres plus tard, à l'adolescence et même à l'âge adulte. L'intervenante ne veut pas cibler de communautés en particulier afin de ne pas les stigmatiser davantage. Mais elle affirme que ces mutilations se perpétuent chez certains immigrants provenant de l'Afrique, du Moyen-Orient et de l'Asie du Sud.


La sociologue Fatoumata Lamarana Baldé prendra la parole au forum qui se tiendra cette semaine au Y des femmes à Montréal. Originaire de la Guinée, où une large proportion de femmes sont victimes de mutilations génitales, la chargée de cours de l'UQAM et postulante au doctorat a fait des MGF l'un de ses sujets d'étude. Madame Baldé a, elle aussi, eu des échos du terrain au sujet de ces violations des droits humains envers de jeunes Québécoises. Elle n'a cependant pas pu vérifier par elle-même ces tristes informations. De plus, il n'existe aucune étude sur ces «voyages de mutilation». La sociologue espère pouvoir faire des recherches approfondies sur cet enjeu au cours des prochaines années, consciente toutefois que la tâche ne sera pas facile. Les mutilations génitales féminines constituent une pratique taboue, encore davantage dans les pays où elles sont illégales.


Des Québécoises immigrées et mutilées laissées à elles-mêmes


L'objectif du forum est que, collectivement, on agisse correctement et vite pour aider nos filles susceptibles d'être victimes de mutilations génitales, mais aussi qu'on vienne en aide à toutes les femmes immigrées qui ont été victimes d'excision et d'infibulation avant leur arrivée au pays. On ne connait même pas leur nombre. Peu de gens, professionnels ou non, savent comment intervenir auprès de ces femmes. Les intervenants de première ligne du réseau de la santé ne savent généralement même pas où les diriger, soutient Djenabou Sangaré. Les ressources se font extrêmement rares. Soutien psychologique, suivi gynécologique et de grossesse spécialisé, ne voilà que quelques-uns des services demandés pour redonner un peu de dignité à ces femmes qui l'ont perdue.


Après cette journée du 6 février, madame Sangaré repartira sur la route, le cœur rempli de convictions afin de poursuivre ses rencontres de prévention et de soutien aux filles et aux femmes victimes de mutilations génitales, qui habitent toutes les régions du Québec. Et nous, que ferons-nous? Si les mutilations génitales ont trop longtemps été considérées comme un fléau de santé publique qui se vit seulement ailleurs, ça ne semble plus être le cas...