Elle est sortie du radoub...emmenée par un remorqueur sous les applaudissements d'une foule venue nombreuse et sous les 21 coups de canon officiels tirés. Elle s’est mise à avancer lentement sur la Charente.. Majestueuse, avec les armes du Roi de France et trois fleurs de lys fièrement apposées. Un drapeau blanc flottait au vent, drapeau sur lequel était inscrit les noms de tous ceux qui avaient fait un don pour aider à la construction de cette magnifique œuvre, tout au long de ces quinze années.

Au même moment l’ambassadeur de France à New York, et ses 300 invités états-uniens, dont le représentant de la marine américaine, suivaient en direct, de l’autre côté de l’Atlantique, cette mise à l’eau de la prestigieuse Hermione, cette frégate porteuse de si émouvants symboles .
Deux jeunes gens, une Française, et un Américain déployaient chacun un drapeau de leur pays, un drapeau Français et un drapeau des Etats-Unis d’Amérique flottèrent un long moment au-dessus de la frégate, avant qu’elle ne quitte le radoub.

De la même manière, une jeune fille suspendue dans les airs éparpillait sur la frégate des feuilles de chêne perpétuant l’ancienne tradition au moment de la mise à l’eau des navires en bois.

Avec ses 1256 tonnes , il aura fallu plus de 4500 pièces de bois de chênes, et 8000 chênes, mais aussi 15 tonnes de chanvre !
Un travail prodigieux, qui aura nécessité au total 20 millions d’euros, mais tant de gens enthousiastes de toutes les régions de France et de bien d'autres pays également, auront participé financièrement pour que cet extraordinaire projet puisse aboutir....

Impressionnant et émouvant de voir l’Hermione, après tant d’années de travaux naviguer enfin, et franchir l’entrée de la Charente. Quelle épopée ! Tout ce gigantesque chantier a été minutieusement établi sur la base de documents d’archives, les “ordonnées de Vincennes”, retrouvés au archives de la marine française.Puis, tant de corps de métier en plus des charpentiers, y ont travaillé..

A présent il faudra encore installer le gréement, ce qui demandera de nombreux autres travaux, mais si tout va bien, en novembre prochain les essais pourront avoir lieu avec la mâture et les voiles, cette fois. Par la suite de nombreuses sorties sont programmées pour permettre à l’équipage de s'initier à cette navigation particulière d’un autre siècle, ceci afin d’être fin prêt pour traverser l’Atlantique, certainement vers l’île d’Elbe et dans d’autres lieux, afin que tout soit totalement maîtrisé. Néanmoins deux moteurs sont prévus permettant de sécuriser le voyage..L’équipage sera composé de 30% de professionnels auxquels se rajouteront des volontaires de la marine nationale française ainsi que quelques américains s’ils le souhaitent.

Le commandant de la Touche Tréville, serait certainement fier aujourd’hui de voir la frégate qu’il avait emmené jusqu’à Boston, où il arriva le 28 avril 1780, s’apprêter, deux siècles après lui, à refaire le même trajet.. Louis René de la Touche, comte de Tréville, était né à Rochefort même, il tint en échec par deux fois l’amiral Nelson, mais il mourut quelques semaines avant Trafalgar !

La vie à bord était rude, à cette époque lointaine... Trois cent trente personnes pouvaient embarquer, en tout, sur la frégate. Les hommes étaient des recrues classiques, recensés par le Roi, devant servir un an tous les quatre ans, sauf en temps de guerre...

A la manœuvre il fallait compter 80 hommes pour monter l’ancre, 50 pour le cabestan .. les canons envoyaient des boulets de 12 livres, un boulet pesait 15 kg, lorsqu’il envoyaient une bordée des centaines d’escarbilles blessaient les hommes tout autour. Treize hommes par canon, étaient nécessaires. Le pont était peint en rouge, pour que les taches de sang passent inaperçues !.. Toutes les cabines étaient démontables au moment de l’attaque, ceci afin de récupérer toute la place de servir les canons. Le recul en était très important mais chaque canon était attaché par des cordages à la coque, ce qui était nécessaire puisqu’un canon pesait deux tonnes ! Les hommes devaient le recharger avant de le ramener à sa place initiale .. tirer et recommencer !

La nourriture au cours de la traversée était préparée dans la cuisine. De grands chaudrons permettaient de faire mijoter une soupe faite à base de viande séchée et salée. Elle était accompagnée de biscuits, c’est à dire une pâte à pain cuite deux fois, ce qui permettait à ces galettes de se conserver, mais cela était si dur qu’il fallait les manger en même temps que la soupe, pour les ramollir, mais cette alimentation si roborative permettaient aux hommes de reprendre des forces avec tout le travail qu’ils devaient fournir. Ils devaient supporter la chaleur humide à l’intérieur du bateau avec un contraste d’une température parfois très froide sur le pont, principalement en s’approchant de l’Amérique du Nord .. Cette nourriture était forcément monotone et carencée d’où les maladies qui s’ensuivaient .. On emportait des animaux sur pieds, afin d’avoir pendant un moment un peu de viande fraîche, mais cela engendrait des odeurs nauséabondes, à cause du fumier généré.

A présent que nous avons vu l’Hermione remonter si fièrement le fleuve, sa traversée de l'Atlantique dans les pas de La Fayette, prévue en 2015, est attendue avec enthousiasme et impatience par des milliers de personnes...

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