«Gilets jaunes»: affrontements violents à Paris

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« La hausse des taxes sur le carburant, ce n’est que la goutte qui a fait déborder le vase »

Après une semaine de blocages dans la plupart des régions françaises, ils étaient toujours plus de 80 000 ce samedi dans toute la France dont au moins 10 000 à Paris à manifester et à bloquer des routes pour protester contre la vie chère et les hausses de taxes sur les carburants. Pour ce premier grand rassemblement dans la capitale, la plupart étaient venus de Bretagne, de Normandie, de Bourgogne ou de l’Essonne, souvent en familles et par leurs propres moyens. Pourtant, dès le matin sur les Champs Élysées, un groupe d’une centaine de casseurs a transformé ce rassemblement par ailleurs pacifique en affrontement violent avec la police. À 16 h, 35 personnes avaient été interpellées et l’on comptait également 8 blessés dont 2 gendarmes.


Sous les yeux étonnés de la plupart des gilets jaunes, qui cherchaient souvent leur chemin dans une ville qu’ils connaissaient mal, un groupe d’une centaine de casseurs masqués a en effet tenu la police en haleine pendant des heures avec pour objectif de s’approcher de l’Élysée, siège de la présidence.


« On n’a rien à voir avec ces gens-là », disait pourtant Cédric un homme de 35 ans venu des Lilas croisé au rond-point de l’Étoile alors que les policiers lançaient leurs premiers gaz lacrymogènes. « J’ai peut-être un foulard sur le visage, mais c’est pour me protéger des lacrymos. Nous, on en a juste marre de payer des taxes sur le carburant et les cigarettes. » Ce père d’une petite fille de 15 mois possède une Twingo diesel qu’il n’a pas vraiment le choix d’utiliser car il travaille dans toute la région. « Moi, j’ai pas le choix d’y aller en voiture », dit-il.


Comme Cédric, les premiers manifestants s’étaient pointés dès dix heures du matin sur les Champs Élysées où la manifestation des gilets jaunes avait pourtant été interdite. Les manifestants, souvent partis de leur région avant le lever du soleil ne voulaient pas se rendre au Champs de Mars, un lieu trop éloigné des centres du pouvoir et tellement gigantesque que « même un regroupement de 100 000 personnes y a l’air insignifiant », nous ont confiés des manifestants.


« Nous, on veut voir Macron »


Pas question pour Mélanie et Raynald de manifester ailleurs que sur les Champs Élysées malgré l’interdiction des policiers. « Nous, on veut voir Macron, on veut lui parler face à face », disait ce chef d’équipe dans l’industrie. « Moi, je viens pour mes filles, ajoutait cette petite fonctionnaire venue elle aussi de Caen. C’est pour elles que je me bats. On n’en peut plus des taxes. Pour nous, l’essence c’est aussi important dans le budget que l’alimentation. » Chaque jour, Mélanie fait 80 km pour aller travailler car elle n’a pas les moyens de se payer un appartement à Caen.


« Au prétexte de l’écologie, on nous tient à la gorge avec ces taxes », dit Raynald qui craignait les débordements. « Ils veulent nous rendre agressifs, mais ces casseurs n’ont rien à voir avec nous. » Dans la foule, on remarquait quelques drapeaux français ainsi que de rares pancartes contre les hausses de taxes.


« La hausse des taxes sur le carburant, ce n’est que la goutte qui a fait déborder le vase », disait Janine, une femme proche de la soixantaine venue avec ses deux filles de Macon, à 380 km. « Ça fait 30 ans qu’on nous demande des efforts. J’habite à 15 km de Mâcon, je ne vais pas le faire à vélo pour les beaux yeux de l’écologie », dit-elle. Lorsqu’on parle à cette préposée qui travaille avec des handicapés de la prime de 4000 euros qu’offre le gouvernement pour acheter une voiture moins polluante, elle éclate d’un rire bien sonore. « Moi, j’ai regardé pour acheter une hybride, mais je n’ai pas les moyens. À 20 000 euros (30 000 $), il reste tout de même 16 000 (24 000 $) à sortir de sa poche ! »


Comme la plupart des observateurs, Janine a remarqué que les femmes étaient partout très présentes sur les barrages routiers des gilets jaunes. Mais, pour elle, ce n’est pas une surprise. « C’est parce que ce sont les femmes qui bouclent les fins de mois, dit-elle. C’est nous qui achetons la nourriture pour les enfants et qui devons faire des miracles pour y arriver. »


> La suite sur Le Devoir.



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