Gasland aux Oscars: un documentaire sous haute pression

Gaz de schiste


Le documentaire «Gasland» dénonce les conséquences de l'exploitation des gaz de schiste aux États-Unis, notamment la contamination de la nappe phréatique, entre autres par l'entremise de cette scène où un citoyen fait flamber du méthane seulement en brandissant un briquet sous l'eau de son robinet.
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Samuel Auger Le Soleil (Québec) - Gasland, le pamphlet anti-gaz de schiste ayant attiré l'attention sur toute l'industrie, est menacé dans sa course aux Oscars. En nomination dans la catégorie Meilleur documentaire, le film de Josh Fox subit, depuis quelques jours, les attaques de l'industrie pétrolière, qui tente de convaincre l'Academy of Motion Picture Arts and Sciences de rejeter cette oeuvre «pleine de faussetés».
Un matin, Josh Fox apprend qu'une compagnie pétrolière songe à louer son terrain pour y procéder à un forage. Le cinéaste décide alors de prendre sa caméra et de parcourir les États-Unis afin de documenter l'industrie naissante des gaz de schiste. Le fruit de son travail, Gasland, émet des critiques acerbes sur cette exploitation de ressources naturelles.
Le documentaire a depuis connu un certain succès en salle et à la télévision câblée. Toutefois, c'est auprès des groupes environnementaux qu'il a fait des ravages. Au Québec, la plupart des groupes de pression contre les gaz de schiste ont utilisé les images et les thèses du film dans leurs argumentaires. Une scène a notamment marqué l'imaginaire, soit celle où un citoyen fait flamber du méthane seulement en brandissant un briquet sous l'eau de son robinet. Une preuve irréfutable de la contamination de la nappe d'eau phréatique, argue le documentariste.
Aujourd'hui, la thèse de Josh Fox est taillée en pièces par le pdg d'Energy in Depth, une association dont le but est de protéger le lobby pétrolier dans le débat public. Financée par l'American Petroleum Institute, Energy Depth dit représenter 90 % des puits pétroliers à travers ses membres.
Le pdg de l'association, Lee O. Fuller, ne se contente pas de réfuter toutes les prétentions du cinéaste Fox. Il demande ni plus ni moins le retrait du film de la course aux Oscars, estimant que Gasland est avant tout un film de pure fiction. «Le cinéaste alterne entre les mauvaises interprétations et la pure ignorance de base des faits vérifiables quant aux conséquences de ces activités sur la santé humaine, la faune et l'environnement», soutient-il dans une lettre expédiée cette semaine à l'Académie.
Selon Energy in Depth, la nomination de Gasland pour la prestigieuse statuette «viole autant l'esprit que la lettre du critère qui doit être vraisemblablement rempli par les compétiteurs de Gasland dans cette catégorie. Nous avons confiance que vous prendrez un moment pour revoir ce dossier».
Les attaques de l'industrie pétrolière remontent à quelques mois déjà. Dès le lancement du film, début 2010, la firme Energy in Depth a ciblé le film et remis en cause ses informations. L'industrie prétend notamment que la présence de méthane dans l'eau du robinet n'a aucun lien avec les gaz de schiste, selon plusieurs études.
La guerre des mots n'a pas cessé depuis. Josh Fox continue de faire circuler un document où il déboulonne une à une les objections de l'industrie. «Même si je suis un peu déconcerté et déçu par les attaques récentes sur la véracité de Gasland et sur ma crédibilité en tant que cinéaste et journaliste par Energy in Depth et d'autres groupes pétroliers, je ne peux pas dire que je suis surpris», répète depuis John Fox sur toutes ses tribunes.
La 83e cérémonie des Oscars aura lieu le 27 février 2011 au Kodak Theatre à Hollywood. S'il remporte la statuette, Josh Fox promet d'utiliser sa tribune pour dénoncer l'industrie pétrolière.
En 2003, le documentariste Michael Moore, vainqueur dans la même catégorie pour Bowling for Columbine, avait profité de son triomphe aux Oscars pour dénoncer vigoureusement la guerre en Irak orchestrée par Georges W. Bush. Il avait toutefois été aussitôt enterré par les violons et la musique des musiciens au Kodak Theatre.


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