Garderies - Tomassi fait marche arrière

Le ministre de la Famille veut que l'octroi des places soit dépolitisé, comme c'était le cas avant les libéraux

L'affaire des CPE


À l’avenir, le ministre Tony Tomassi ne choisira pas quels promoteurs pourront offrir de nouvelles places, une tâche qui reviendra à des comités régionaux.

Photo : Clément Allard - Le Devoir

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Robert Dutrisac - Québec — Pour échapper aux accusations de favoritisme, le gouvernement Charest entend dépolitiser l'octroi des nouvelles places en garderie en confiant cette prérogative à des comités régionaux plutôt qu'au titulaire du ministère de la Famille. C'est un retour à l'ancien mécanisme aboli par les libéraux à leur arrivée au pouvoir en 2003.
Essuyant les attaques de l'opposition officielle depuis décembre, le ministre de la Famille, Tony Tomassi, a annoncé, hier, une série de mesures visant l'attribution des nouvelles places à 7 $ et les transferts de propriété des garderies, imposant des sanctions plus sévères envers les garderies qui pratiquent la surfacturation illégale et consacrant le caractère laïque des services de garde subventionnés.
À l'avenir, le ministre ne choisira pas quels promoteurs pourront offrir de nouvelles places. «Ce que je vous annonce aujourd'hui [hier], c'est que je n'irai pas à l'encontre des recommandations des gens du milieu», a déclaré M. Tomassi. Inspirés du modèle qui existait avant 2003, des comités régionaux seront formés qui réuniront, outre des fonctionnaires du ministère, des représentants de la MRC, de la Conférence régionale des élus (CRE), des milieux de l'éducation, etc. C'est ce que réclamaient depuis longtemps l'Association québécoise des CPE (AQCPE) et l'Association des garderies privées du Québec (AGPQ), avant même que de nombreux donateurs libéraux n'obtiennent des places convoitées.
Sur les 18 000 places attribuées en 2008, 700 places, octroyées à des centres de la petite enfance (CPE), ne peuvent pas se réaliser. Le ministère lancera un nouvel appel de projets. Pour les places actuellement en développement et les 15 000 places promises d'ici la fin du mandat du gouvernement, le ministre a indiqué qu'une entreprise qui veut offrir des places devra démontrer «qu'elle existe réellement et qu'elle a pignon sur rue». Le ministère veut ainsi éviter l'apparition d'un marché secondaire de permis. En outre, tous les projets qui n'ont pas été retenus en 2008 sont caducs; on repart à zéro.
À la faveur d'un projet de loi que le ministre déposera ce printemps, le ministère devra obtenir un préavis de trois mois — plutôt que de 30 jours — avant tout changement d'actionnaires ou d'administrateurs d'une garderie privée. De plus, lors de la vente de 10 % des actions ou plus de l'entreprise, la garderie devra obtenir un nouveau permis et faire une nouvelle demande de subvention. «L'important, c'est que ce ne sera pas automatique», a indiqué Tony Tomassi.
À même ses fonds courants, le ministère palliera la faiblesse de son système d'inspection: il engagera 40 nouveaux inspecteurs, ce qui s'ajoute aux 18 qui sont à pied d'oeuvre à l'heure actuelle. Une garderie privée qui pratique la surfacturation devra rembourser ces frais illégaux aux parents. Le ministre envisage aussi d'imposer une nouvelle sanction qui empêchera une garderie fautive d'obtenir de nouvelles places à 7 $ pour une période de cinq ans.
«Aveu de culpabilité»
Pour le député de Gouin et porte-parole péquiste en matière de services de garde, Nicolas Girard, le fait que des correctifs soient apportés au processus «vicié» d'attribution des places, contrôlé par le ministre, est «un aveu de culpabilité». Le Vérificateur général doit enquêter sur «le scandale des garderies libérales» et le ministre doit démissionner, a exigé Nicolas Girard.
Le président de l'AGPQ, Sylvain Lévesque, salue la dépolitisation de l'octroi des nouvelles places aux garderies privées. Toutefois, il estime que les règles régissant la vente des actions d'une garderie sont beaucoup trop contraignantes. «On est en train de faire de la politique sur le dos des garderies», a déploré M. Lévesque. «Si M. Tomassi n'avait pas les compétences et que sa tête a été réclamée par le PQ, on n'a pas à en faire les frais.»
Le directeur général de l'AQCPE, Jean Robitaille, a accueilli cette annonce avec «beaucoup de perplexité». Il se demande où sont les 15 000 places promises. «C'est bien beau d'avoir un bon processus, mais où sont les projets?», a-t-il dit.


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