Élections : aveuglement et enfermement sectaires de QS ?

Actualité indépendantiste

La semaine dernière encore, malgré une position d’attentisme, Québec solidaire manifestait une relative ouverture face à une alliance avec le PQ en vue des prochaines élections au Québec (« Alliances: Québec solidaire donne l'heure juste » ; 18 janvier 2012 ; http://www.quebecsolidaire.net/actualite_nationale/alliances_quebec_solidaire_donne_lheure_juste).
Interrogée le 18 janvier par RDI au sujet d’une éventuelle entente entre QS et le PQ, Madame Françoise David ne proposait rien d’autre qu’une ouverture à d’éventuelles propositions qui seraient adressées à QS, et affirmait que « son objectif est de faire élire le plus de députés possible » de son parti, y compris et surtout elle-même (http://www.radio-canada.ca/audio-video/pop.shtml#idMedia=undefined&lang=frutf&pl=0of1&posMedia=0&startPosition=0&urlMedia=http://www.radio-canada.ca/Medianet/2012/RDI/2012-01-18_15_00_00_rdidirect_002_500.asx).
Cependant, il semble que la porte entrouverte par QS soit en train de se refermer brutalement. En effet, dans sa récente édition (mardi 24 janvier; http://www.pressegauche.org/), la publication électronique PresseGauche (proche de QS) nous indique assez clairement qu’un virage a été pris tout dernièrement par la direction de QS. Faut-il voir dans ce virage l’influence de Madame Françoise David et de quelques fossiles paléopolitiques ? Pour ces personnes, le fantasme d’une victoire de leur parti dans quelques circonscriptions, est-il plus important que les conséquences de leur acharnement à favoriser le maintien de la droite (PLQ … ou CAQ ?) au pouvoir, avec les politiques antisociales et antinationales qui résultent de cette confiscation de l’État par la classe dominante ?
L’Éditorial de PresseGauche, « Contre une alliance électorale entre le PQ et QS », affirme que les militants de QS qui refusent la ruée moutonnière vers une défaite politique de la majorité de la population (dont les intérêts ne sont pas défendus par le PLQ ou la CAQ), feraient « courir un risque beaucoup plus dangereux à QS que la non élection de député-es ». À travers un discours formellement “anticapitaliste” et pseudo “indépendantiste”, ce sont les intérêts organisationnels de QS qui sont en fait exclusivement considérés !
Dans un autre article du même acabit (« Refonder le mouvement indépendantiste sur de nouvelles bases ! »), Bernard Rioux feint de croire que son parti, qui a soutenu activement le NPD en coulisses aux dernières élections fédérales, serait vraiment “indépendantiste”, ce qui lui permet, dans un effet d’anéantissement de ce qu’on appelle la logique, d’affirmer qu’« il n’y a pas d’alliance stratégique possible » avec le PQ. L’auteur conclut en se berçant d’illusions : « les élections sont le moment de présenter des projets de société à la population et de gagner cette dernière à nos propositions ».
Une faiblesse argumentaire évidente se manifeste dans un texte de Madame Françoise David (« Pourquoi je me présente dans Gouin »). À travers un pédagogisme inefficace, elle tente d’attaquer les adversaires d’une défaite appréhendée, ceux qui refusent une victoire de « la droite fédéraliste », et ceux qui déplorent la division des « votes souverainistes et de gauche ». Dans cet étonnant déficit d’arguments, Madame Françoise David en vient à invoquer le fait qu’elle réside dans le quartier où elle veut se présenter comme candidate aux élections, et elle conclut sa démonstration par l’affirmation suivante : « Je veux gagner car j’ai des idées à défendre » ! Bien sûr, Madame Françoise David a des idées : égalité sociale, écologie, féminisme (compatible avec la promotion par QS des symboles religieux sexistes ?), souveraineté (compatible avec le soutien de QS à un parti fédéraliste ?), etc. Ce n’est pas parce que Madame David « veut gagner » qu’elle ne prépare pas une trahison stratégique efficace des idéaux qu’elle prétend défendre ! Son ambition, quoique solidariste, ne la rend pas plus crédible que lorsqu’elle nous vantait les mérite du “paradis socialiste” de l’Albanie !
Pour bien indiquer que la porte de QS est passablement fermée à toute entente, PresseGauche en rajoute avec la prestation d’un certain Jean-Pierre Daubois (« Alliances électorales avec le PQ, pas question ! »). Cet individu se dit « très en colère » du fait que « QS considère, même très timidement, la possibilité d’une alliance tacite ou ouverte avec le PQ afin de battre Charest et/ou de gagner quelques sièges de plus à l’assemblée nationale ». La « colère » de Monsieur Daubois lui inspire divers sobriquets supposés constituer une argumentation politique contre Madame Pauline Marois (« La Castafiore », La Châtelaine de l’Ïle Perrot » (sic)), mais il peine à nous convaincre que cette « colère » serait “bonne conseillère”, malgré ses 37 ans d’engagement politique et son statut d’employé de la CSN.
Après un semblant d’ouverture, les dinosaures postmaoïstes semblent avoir repris le contrôle de QS, en réactualisant le même type de positions politiques rétrogrades que celles qui les ont amenés à se placer objectivement dans le camp du “Non”, contre l’indépendance du Québec en 1980.
PresseGauche publie cependant une voix dissidente, celle de Stéphane Lessard (« À propos des pactes électoraux - Pousser plus loin la réflexion »). Prudemment, l’auteur examine les obstacles à une entente entre le PQ et QS, mais il affirme quand même que « s’il fallait que le parti fondé par René Lévesque accepte de revenir à ses principes et de s’entendre avec QS pour défendre des propositions audacieuses communes, et le cas échéant s’il était élu au gouvernement de les mettre en place rapidement, il me semble que ce sont les Québécoises et les Québécois qui en ressortiraient gagnant-e-s. ».
PresseGauche a mis en ligne un texte dans lequel j’en appelle à une coalition progressiste-souverainiste (« Une coalition progressiste-souverainiste : pour le peuple québécois ! »; http://www.pressegauche.org/spip.php?article9132), ), mais il est peu mis en évidence, dans cet apparent claquement d’une porte qui se referme !
Yves Claudé


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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    25 janvier 2012

    Je voudrais faire 3 courts commentaires.
    Le premier concerne le site de Presse-toi à gauche ! Son comité éditorial est à forte majorité associé à une tendance existant au sein de Québec solidaire, soit le groupe trotskyste gauche socialiste. Bernard Rioux, dont vous parlez, en fait d'ailleurs partie.
    Cette tendance a certes des appuis, mais ne représente nénmoins qu'une tendance parmi d'autres, un peu comme le SPQ peut aussi représenter une tendance au sein du PQ, sans prétendre cependant représenter la tendance majoritaire.
    Deuxièmement, je voudrais dire un mot concernant l'argument voulant qu'on devrait d'abord rester uni dans un seul parti avant de faire l'indépendance. Je peux comprendre que quelqu'un associé au PQ, puisse penser ainsi. Le fait est cependant que seule une partie des 43% d'appuis au projet de souveraineté, soutiennent en même temps le PQ. Cela c'est la réalité, qu'on l'aime ou non et cela n'est pas prêt de changer.
    Conclusion: ou bien les différents partis souverainistes accepteront, chacun de leur côté, de mettre un peu d'eau dans leur vin, au niveau de leurs propres intérêts partisans respectifs, dans le meilleur intérêt de la cause indépendantiste, ou alors ce projet n'ira nulle part. C'est aussi simple que cela.
    Depuis 2006, nombreux sont ceux qui ont prédi que Québec solidaire n'irait pas loin. Aujourd'hui, Québec solidaire a entre deux et 3 fois plus d'appuis qu'il pouvait en avoir en 2007 ou en 2008. Et puis, en plus, il y a aussi Option nationale, de même que plusieurs indépendants. Il me semble que tout cela tombe pas mal sous le sens.
    Qu'il y est encore des obstacles et des réticences, cela est parfaitement normal. Chacun d'entre nous doit en même temps se demander : serons-nous de ceux et de celles qui aideront à faire avancer la cause ? Ou serons-nous au contraire de ceux et de celles qui continueront à refuser tout compromis au nom d'une logique qui tient de moins en moins la route.
    Finalement, je voudrais aussi réagir à la sortie du député de Gouin, Nicolas Girard. Selon lui, le fait que madame David ait finalement décidé d'aller de l'avant avec sa propre investiture dans Gouin, au nom de Québec solidaire, prouve que QS n'est pas vraiment intéressé par une éventuelle alliance. La belle affaire ! A-t-il lui-même démontré la moindre ouverture à ce qu'il puisse éventuellement ne pas se représenter, lui-même dans Gouin ? Bien sûr que non et il nous répondra sans doute que pour lui, c'est évidemment pas pareil ... à moins qu'il pense qu'une alliance devra nécessairement inclure des compromis de la part d'un seul côté, et pas pour le PQ.
    J'invite à relire le commentaire fait par monsieur Lisée la semaine dernière à propos de ces alliances; ce commentaire garde encore toute sa pertinence.
    André Parizeau

  • Archives de Vigile Répondre

    25 janvier 2012

    Monsieur Claudé,
    J'aime bien vos points de vue en général. Cependant, si je comprends bien la situation, je crois que QS n'a pas tort de refuser une alliance avec le PQ.
    Il est vrai que si malgré l'alliance avec le PQ, la CAQ, ou de façon moins probable les libéraux, gagnaient aux prochaines élections, c'est la seule véritable voix progressiste au Québec, c'est à dire QS, qui se serait compromis dans cette alliance et cela donnerait certainement un coup dur au courant progressiste au Québec.

  • Archives de Vigile Répondre

    25 janvier 2012

    M. Claudé,
    J’ai noté la présence de nombreux militants de QS dans les assemblés de l’Option Nationale (ON). Pour la plupart, ces derniers étaient relativement jeunes. Il semble que pour beaucoup d’entre eux, une alliance avec ON leur apparait beaucoup plus productif et rentable et naturel électoralement plutôt qu’avec le PQ. Stratégiquement, ils voient la possibilité d’isoler encore plus le PQ en récupérant un bassin potentiel de 30% des voix de ceux que l’on qualifie dans la famille nationaliste de «VRAIS» indépendantistes. Cette clientèle se regroupe presque parfaitement dans ces deux formations. Il y a de nombreux avantages à s’entendre entre nous sur des modalités d’alliance simples, justes et profitables pour nos deux formations. Je vous invite à y réfléchir sérieusement. Le temps commence à manquer.

  • Archives de Vigile Répondre

    25 janvier 2012

    En lisant le programme de QS, je crois qu'il est très difficile pour le PQ de faire une entente.Quand comprendrons-nous qu'il faut d'abord faire la souveraineté avant de se diviser en différents partis politiques