Économie: François Legault prône un virage à l’international

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Legault veut revoir le mandat d'Investissement Québec

Le rôle du Québec à l’étranger sera transformé dans un éventuel gouvernement dirigé par François Legault, selon ce qu’il a confié à La Presse canadienne, lors d’un long entretien cette semaine à ses bureaux, à l’approche de la campagne électorale.


S’il devient premier ministre, le 1er octobre, M. Legault entend bien, pour l’essentiel, centrer l’action internationale du Québec sur le développement économique, soit par la recherche accélérée de nouveaux marchés d’exportation pour les entreprises québécoises et par le repérage d’investisseurs potentiels aux quatre coins du globe.


Pour atteindre cet objectif, il prévoit effectuer deux changements majeurs : modifier en profondeur le mandat d’Investissement Québec, le bras financier de l’État, et revoir le rôle joué par le réseau des délégations du Québec à travers le monde, désormais appelées à servir, avant toute chose, de lien entre les entrepreneurs québécois et ceux de l’étranger.


Questionné à savoir quel sort serait réservé au mandat diplomatique du Québec sur la scène internationale, à la suite de cette réorientation, M. Legault demeure évasif. «Il reste là», dit-il, s’empressant d’ajouter, «mais c’est sûr que moi je suis un homme d’affaires».


L’entrevue a aussi permis de faire le point sur plusieurs sujets, dont son avenir personnel en cas d’échec le 1er octobre, et sa vision des choses sur la taille de l’État s’il devient premier ministre.


Un mot-clé: diversification


«Il faut un premier ministre économique pour le Québec», et ce, au cours des 20 prochaines années, pour rattraper le retard accumulé sur le plan du développement économique et de la création de richesse, selon le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ).


«Il est urgent de diversifier nos marchés pour ne pas être à la merci de Donald Trump», dit l’aspirant premier ministre, en constatant que 71 % des exportations québécoises prennent le chemin des États-Unis, au moment où l’administration américaine ferme ses portes aux produits provenant de l’étranger.


M. Legault estime que le premier ministre Philippe Couillard tient le même discours que lui, mais n’a pas réussi en quatre ans à faire bouger l’aiguille dans le sens de réduire la dépendance au marché américain.


Au lieu de missions sporadiques à l’étranger dirigées par le premier ministre, M. Legault, qui se définit comme un «développeur», dit préconiser un travail de terrain constant et ciblé, secteur par secteur, en privilégiant une approche plus pragmatique, axée sur des résultats concrets, au bénéfice des gens d’affaires.


«On va complètement changer le fonctionnement d’Investissement Québec», dit M. Legault, qui voit la société d’État chargée de fournir des prêts et des garanties de prêts aux entrepreneurs, se muer en organisme de prospection de nouveaux marchés à l’étranger. Des gens d’Investissement Québec sont déjà présents dans les délégations, mais ce rôle doit être vraiment renforcé, selon celui qui juge le temps venu d’adopter une approche business dans la gestion de certains dossiers de l’État.


Parallèlement, Investissement Québec — sa véritable bête noire — devra doubler ses investissements dans les entreprises, soutient-il en vue de créer plus de richesse, passant de 30 milliards $ par année à 60 milliards $ pour rattraper le retard accusé au fil des ans.


Dans ce contexte, les jours du président actuel d’Investissement Québec, Pierre Gabriel Côté, pourraient être comptés. Car quand on lui demande si un tel changement de cap devra se refléter à la tête de l’organisme, il répond qu’il «n’exclut rien», affichant son plus large sourire.


Parallèlement, M. Legault entend maintenir en place le réseau actuel de délégations à l’étranger, avec ses budgets et ses ressources, mais veut voir le personnel réaffecté aux dossiers économiques, «dédié à augmenter nos exportations et à attirer des investissements privés».


Il faut «utiliser nos délégations générales du Québec à l’étranger pour augmenter les exportations, pour permettre à nos entreprises de rencontrer des clients», notamment en organisant des foires commerciales à l’étranger, secteur par secteur.


«Je ne veux pas parler de ça»


La CAQ a été créée en 2011. Il considère que ce serait une véritable «prouesse» s’il réussissait à mener son parti au pouvoir en moins de sept ans, en rappelant que René Lévesque a mis huit ans (de 1968 à 1976) à faire de même avec le Parti québécois.


Habituellement loquace, M. Legault se ferme comme une huître si on lui pose la question suivante : si ça ne fonctionne pas le 1er octobre, resterez-vous à la tête de la CAQ jusqu’à la prochaine échéance, en 2022? «Je ne veux pas parler de ça», se contente de dire le chef caquiste, laconique, refusant mordicus de dire s’il restera ou s’il s’en ira après un éventuel troisième échec, après ceux de 2012 et 2014.


Réduction de la taille de l’État


À quoi ressemblerait un gouvernement Legault? Il faut s’attendre à une réduction de la taille de l’État et du nombre de fonctionnaires. Ceux qui donnent des services directs à la population (ils seraient 350 000, selon ses chiffres) n’ont rien à craindre. Mais parmi les autres, ils seraient 200 000, associés à la «bureaucratie», bon nombre risquent de voir leur poste aboli. Car il entend bien «réduire le nombre de personnes» au service de l’État, par attrition ou autrement, et décentraliser le processus décisionnel à l’échelle locale.


Mais combien y a-t-il de postes à couper? «Je ne vais pas vous dire ça aujourd’hui», répond M. Legault, qui ne veut pas s’étendre sur ce sujet non plus.


Libéraux inquiets?


Au cours des dernières années, son équipe a sans relâche, à maintes reprises, dénoncé les supposées nominations partisanes effectuées par le gouvernement libéral. Questionné à savoir s’il va placer sur une tablette tous ces hauts fonctionnaires, sous-ministres et dirigeants d’organismes en raison de leur couleur politique quand il sera aux commandes, M. Legault promet de ne pas déclencher «une chasse aux sorcières», mais s’empresse de dire que la «compétence» sera son unique critère pour maintenir quelqu’un en place ou non.


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