Dette américaine - La bombe

Crise mondiale — crise financière


La santé financière de bien des États américains présente plusieurs similarités avec celles, bien documentées, de la... Grèce! Comme ce pays, les gouvernements locaux ont maquillé les chiffres. Comme ce pays, ils ont administré le bien public en dépit du bon sens. Résultat, la combinaison des énigmes monétaires que posent ces États constitue une bombe à retardement.
La population de l'Illinois avoisine les 13 millions de personnes. Celle de la Grèce excède de peu les 11 millions. Comme la Grèce, cet État du nord, cet État industrialisé, vient d'être décoté par l'agence de notation Fitch. La cause principale de cette réduction de la valeur «Illinois» tient en peu de mots: son «retard» à remplir ses obligations financières se chiffre désormais à 9 milliards. Selon le commentaire du contrôleur général, l'Illinois fait face à un «désastre fiscal». Ailleurs, c'est peu reluisant. C'est passablement inquiétant.
Prenons la Californie, l'État le plus populeux du pays — près de 38 millions d'habitants. Depuis deux ans, voire trois, c'est un secret de Polichinelle que sa santé financière est vacillante. On sait moins, beaucoup moins, qu'on jongle sans pudeur avec les faits comptables. De prime abord, la dette est de 8 % du PIB. Mais lorsqu'on inclut les engagements contenus dans le fonds de pension de ses fonctionnaires, on atteint les 37 %.
Pour illustrer les mécanismes peu reluisants auxquels certains États ont recours, on va faire un détour au New Hampshire. La Cour suprême de ce dernier vient d'ordonner au gouvernement le remboursement des 110 millions qu'il avait puisés dans l'assurance contre d'éventuelles erreurs médicales. À cet égard, il faut préciser que le New Hampshire avait imité la magouille analogue qu'avait conçue en 2002 le Colorado.
En fait, pour faire court, deux États — seulement deux — affichent un bon bulletin: le Montana et le Dakota du Nord. Tous les autres présentent les stigmates d'une crise financière plus ou moins analogue, affirment bien des économistes, à celle qui a fait tanguer la zone euro tout le printemps. Si, à l'instar de ce qui a été constaté avec la Grèce, les investisseurs hésitent à acheter les obligations des États, ces derniers seront confrontés à un étranglement du crédit.
Certes, il existe un système de solidarité fédérale. Le hic, c'est que cela fait des mois et des mois que Washington aide directement ou indirectement les États. Le gouvernement central a déjà dépensé des centaines de millions afin de soutenir les émissions de la Californie, de la Floride ou d'ailleurs. Qu'on y songe, si l'Alaska et le Rhode Island étaient des nations indépendantes, personne n'achèterait leurs titres.
Le délabrement des finances publiques a atteint un tel degré qu'il explique, en partie seulement, mais en partie tout de même, la retenue, la prudence, le comportement de fourmi dont font preuve les fonds d'investissement, les sociétés non financières et les ménages. Ils économisent, ils thésaurisent, ils mettent de côté les espèces sonnantes, les uns parce qu'ils sont échaudés par la crise de 2008-2009, les autres parce qu'ils ont peur. Résultat? La masse des liquidités disponibles vient d'atteindre un sommet jamais vu en 50 ans.
Au cours du premier trimestre de l'année en cours, les économies des entreprises non financières ont augmenté de 27 % au cours du trimestre correspondant pour atteindre les 1000 milliards 800 millions. Quant aux ménages américains, leurs bas de laine combinés totalisent les 8000 milliards! Personne ne se mouille. Tout le monde est en attente. Conséquence? L'économie est grippée.
Selon une enquête menée sur ce sujet par la rédaction de Bloomberg-Business Week, cet immobilisme met en lumière des hésitations découlant de la crise de l'euro, de la nouvelle réglementation financière aux États-Unis, de la volonté affichée du gouvernement chinois d'éviter la surchauffe et bien évidemment des bilans comptables des États et villes d'Amérique. Les uns et les autres s'abstiennent d'investir parce qu'ils essaient de décrypter les ramifications potentielles des facteurs évoqués.
En attendant qu'ils y parviennent, le président Barack Obama a posé un geste passé quelque peu inaperçu. Il a fait de Bill Clinton, pour ainsi dire, son nouveau conseiller économique. L'ex-président vient de se joindre, pour ainsi dire (bis), à l'équipe officielle. Lors d'une rencontre à la Maison-Blanche avec les patrons des grandes compagnies, Obama était flanqué de Clinton. Cet exercice, dit-on, va se répéter. L'objectif est simple: décrisper les relations qui existent entre les uns et les autres.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé

-->