Des «administrateurs indépendants» proches du pouvoir

Rapport du Vérificateur général - novembre 2009

MIchael Sabia, il a versé 9800 $ au Parti libéral du Québec depuis 2002, dont 3000 $ l'an dernier. Photothèque La Presse


(Québec) Les déclarations d'intérêts des patrons de la Société générale de financement (SGF) et de la Caisse de dépôt sont soumises à un comité de gouvernance et d'éthi­que relevant du conseil d'administration. Les membres de ces comités doivent être des «administrateurs indépendants». Mais à l'heure actuelle, les présidents de ces deux comités ont des liens très étroits avec le Parti libéral. À la SGF, c'est l'avocat José P. Dorais, un habitué des congrès libéraux, qui assume la présidence de ce comité. M. Dorais a versé 12 975 $ à la caisse du Parti libéral depuis que Jean Charest a pris le pouvoir.
À la Caisse de dépôt, les libéraux ont remplacé le professeur Yvan Allaire à la présidence du comité de gouvernance et d'éthique, par l'avocat montréalais Jean-Pierre Ouellet, un ancien conseiller politique de Robert Bourassa. M. Ouellet connaît Michael Sabia depuis une quinzaine d'années : il était vice-président des affaires juridiques au CN où travaillait également M. Sabia. Il oeuvrait auparavant chez Stikeman Elliott où il a eu le mandat de la privatisation du CN.
M. Ouellet a été nommé au conseil d'administration de la Caisse trois jours avant l'embauche de M. Sabia à la tête de la Caisse. Il a donc participé à la décision d'embaucher son ancien collègue de longue date. La chef du PQ, Pauline Marois, avait d'ailleurs dénoncé cette situation et déclaré que M. Ouellet aurait dû se retirer des délibérations du conseil d'administration, lorsque l'embauche a été décidée. Quant à M. Sabia, il a versé 9800 $ au Parti libéral du Québec depuis 2002, dont 3000 $ l'an dernier.
L'avocat Jean-Pierre Ouellet n'est pas seul à surveiller l'application du code d'éthique au comité de gouvernance et d'éthique de la Caisse de dépôt. La présidente de la CSN, Claudette Carbonneau, siège également à ce comité. Mais Mme Carbonneau ne montre pas un très grand intérêt pour cette responsabilité. Elle a refusé les deux demandes d'entrevue du Soleil sur le sujet, et renvoyé le journaliste au président du comité... Me Jean-Pierre Ouellet!
Les règles d'éthique
Sur papier, les règles d'éthique à la Caisse de dépôt sont très étanches. Un dirigeant n'a pas le droit de transiger directement sur des titres. Dès son embauche, tous ses avoirs sont transférés dans une fiducie sans droit de regard dont il ne peut connaître les transactions. La seule connaissance qu'il peut avoir de son portefeuille est un compte rendu annuel de la valeur de son portefeuille, mais qui ne donne aucune information sur les titres détenus. Quant aux employés, de la secrétaire jusqu'aux vice-présidents, il leur est interdit de transiger sur un titre «à partir du moment où la Caisse s'intéresse à une entreprise, qu'il y a un échange d'informations avec l'entreprise», explique le porte-parole, Maxime Chagnon. De plus, le courtier de chacun des employés doit envoyer un état de compte de son client à la Caisse une fois par mois, afin de s'assurer qu'il n'y a pas eu de transactions interdites par le code d'éthique.
Un code d'éthique aussi étanche pourrait normalement permettre la divulgation des intérêts des dirigeants. Mais c'est là que s'arrête la transparence, que l'on exige pourtant des politiciens.


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