Dans le même journal, le même jour...

Affaire Jan Wong et The Globe and Mail


C'est amusant ce qu'on peut trouver dans le même journal, le même jour. Comme dans le très sérieux Globe and Mail de samedi dernier.
En page A8, on retrouvait une analyse de la tuerie de Dawson par la [journaliste Jan Wong->2009] qui faisait porter la responsabilité de tout ça sur... la loi 101. Rien de moins.
En traduction libre, voici les propos de Mme Wong : «Ce que beaucoup de gens de l'extérieur (du Québec) ne réalisent pas, c'est l'aliénation que des décennies de batailles linguistiques ont pu amener à cette ville autrefois cosmopolite. Ce n'a pas seulement nui aux anglophones de souche, mais cela a également affecté les immigrants. Bien sûr, les trois tueries (Dawson, Concordia et Polytechnique) ont été le fait de personnes qui avaient des problèmes de santé mentale. Mais il est également exact que dans les trois cas, le tueur n'était pas un pur laine, le mot d'argot pour un «pur» francophone. Partout ailleurs, parler de «pureté» raciale est répugnant. Pas au Québec.»
Mme Wong continue en expliquant que Marc Lépine, le tueur de Polytechnique, était le fils d'un Algérien et qu'il avait francisé son nom parce qu'il avait été rejeté par les Forces canadiennes. Elle ajoute : «Il était un francophone, mais aux yeux des Québécois pure laine, il n'était pas l'un d'eux et ne le serait jamais. Il n'était Canadien français qu'à moitié».
La conclusion de Mme Wong est que Marc Lépine, Valery Fabrikant et Kimveer Gill ont en commun «d'avoir été marginalisés dans une société qui favorise les pure laine».
Je ne vais pas m'étendre longtemps sur le propos de Mme Wong, sauf pour me demander qui pouvait bien dormir au gaz à ce point au pupitre du Globe and Mail, vendredi dernier.
C'est peut-être parce que la réponse était en page A15 du même journal, le même jour. [L'ex-astronaute et ex-candidat libéral Marc Garneau->2006] y signait une chronique qui ressemblait fort à un mea culpa. M. Garneau explique qu'il est maintenant en faveur de la reconnaissance du caractère national du Québec dans la constitution canadienne, une idée à laquelle il s'était fortement opposé.
Il affirme avoir découvert un Québec qui a évolué. Il explique que s'il n'était plus sur la même longueur d'ondes que la majorité de ses concitoyens, en partie parce qu'il avait longtemps vécu à l'étranger. Mais aussi - et c'est là qu'on retrouve un rapport avec l'article de Mme Wong - parce qu'il ne s'abreuvait plus qu'aux médias anglophones.
Traduction libre de ses propos : «Ma vision du Québec et du Canada était façonnée par les journaux nationaux anglophones et en regardant la télévision anglophone qui, je le croyais, me donnaient une vision globale du pays. En réalité, je vivais dans une bulle», écrivait M. Garneau.
C'est sans doute vrai que, lorsqu'on vit dans la bulle et qu'on ne lit que les savantes analyses de la réalité québécoise de Mme Wong, on en vient à une vision totalement surréaliste de la société québécoise.
Il est aussi vrai qu'un petit tour dans la réalité du Québec d'aujourd'hui fait changer ces perceptions, comme le montre M. Garneau.
Il ne manquera pas de gens pour se déchirer la chemise à la suite des propos de Mme Wong. Je me contenterai de noter l'ironie de trouver deux messages aussi divergents et irréconciliables dans le même journal, le même jour.


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