Colère et désespoir pour les nouveaux chômeurs

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C'est la fin du discours sur la « pénurie de main-d'oeuvre » : l'immigration massive devient injustifiable


La crise a provoqué dans les derniers jours la mise à pied brutale de milliers de Québécois, qui se sont tournés vers l’assurance-emploi pour subvenir à leurs besoins. Désemparés, plusieurs se sont présentés aux bureaux du gouvernement fédéral dans l’espoir d’obtenir des réponses à leurs questions. Sur le terrain, Le Journal a pu constater hier le mécontentement parmi eux.  


Ils n’avaient jamais connu le chômage  



Joanne Allain sort du bureau d’assurance-emploi de Terrebonne hier avec son conjoint, Franco Pietrantonio.

Photo Jules Richer

Joanne Allain sort du bureau d’assurance-emploi de Terrebonne hier avec son conjoint, Franco Pietrantonio.




Joanne Allain et son conjoint, Franco Pietrantonio, sont désemparés et choqués. Mme Allain n’avait jamais connu le chômage en 38 années sur le marché du travail comme serveuse.      


Mise à pied mardi d’un restaurant à cause de la COVID-19, elle a appris hier qu’elle n’aura pas de chèque d’assurance-emploi avant au moins 28 jours.      


« T’as travaillé toute ta vie et tu te retrouves comme ça ! » lance la femme de 61 ans, accompagnée de son conjoint, Franco, à leur sortie des bureaux de Service Canada, à Terrebonne.      


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Pas la charité  


« On ne demande pas la charité, on demande notre dû », ajoute-t-elle, les yeux embués.      


Le resto italien de Terrebonne pour lequel elle travaillait depuis une vingtaine d’années a été forcé de réduire ses activités en l’absence de clients.      


Outrée, Mme Allain ne comprend pas pourquoi les chèques tardent tant à être émis.      


Seules les personnes forcées à l’isolement peuvent espérer obtenir un paiement plus rapidement que le délai habituel de 28 jours.      


« Me semble que c’est maintenant qu’on a besoin d’aide ! » affirme-t-elle.      


Après s’être remis d’un cancer qui avait attaqué ses os, son conjoint, âgé de 62 ans, espérait reprendre un emploi dans un entrepôt de céramique à la fin du mois de mars.      


Retour au travail difficile  


Il comprend maintenant que ce sera impossible en raison des difficultés économiques causées par la crise.      


Sa couverture d’assurance-invalidité est épuisée. Aux bureaux de Service Canada, on lui a expliqué hier qu’il ne sera sans doute pas admissible aux prestations d’assurance-emploi, puisqu’il n’a pas travaillé depuis un an.      


« On se retrouve devant rien », constate M. Pietrantonio, désemparé. Pendant ce temps, les factures s’accumulent et la fin du mois approche.      


Comme sa conjointe, il avait travaillé toute sa vie, sans jamais demander des prestations de chômage.      


« Laissés à nous-mêmes »  



Ghislaine Colombin

Photo Jules Richer

Ghislaine Colombin




Ghislaine Colombin envisage les prochains mois avec appréhension. Le restaurant de Mascouche où elle travaille comme cuisinière l’a mise à pied à la fin de la semaine dernière.      


Après une séparation récente, elle doit en plus déménager seule dans un nouvel appartement. Le délai d’au moins 28 jours avant d’obtenir un premier chèque d’assurance-emploi ne l’enchante pas du tout avec tous les nouveaux frais d’aménagement qui arrivent.      


Elle pense aux factures qui vont s’accumuler, au loyer à payer et à l’argent qui entrera au compte-gouttes.      


« On est pas mal laissés à nous-mêmes », a-t-elle laissé tomber à sa sortie des bureaux de l’assurance-emploi.      


« Ils ne m’ont pas laissée entrer »  



Josée Beaupré

Photo Jules Richer

Josée Beaupré




Ouvrière de la construction, Josée Beaupré était frustrée à sa sortie des bureaux de Service Canada, à Terrebonne, hier.      


Plus tôt dans la journée, elle avait tenté sans succès de remplir chez elle un formulaire d’inscription à l’assurance-emploi par internet. La connexion échouait constamment et il lui avait été impossible de parler à un agent au téléphone.      


« Ils ne m’ont pas laissée entrer dans les bureaux », a-t-elle expliqué.      


On lui a interdit d’utiliser les ordinateurs de Service Canada pour faire son inscription. On lui a suggéré de faire un nouvel essai par internet en soirée, vers 21 h.      


Mise à pied à cause de la COVID-19, Mme Beaupré est inquiète pour l’avenir. Elle doit subvenir aux besoins de ses deux enfants, âgés de 10 et 14 ans.      


Un couple dans le néant  


Jeune couple dans la vingtaine avec une petite fille, Alex et Ann-Julie (ils n’ont pas voulu donner leurs noms de famille) sont déroutés.      


Travaillant pour un concessionnaire automobile, Alex a été mis à pied cette semaine. Ann-Julie, quant à elle, est en congé de maternité.      


En sortant de l’assurance-emploi à Terrebonne, hier, le couple était « dans le néant », a dit Alex.      


Le jeune homme pourrait encore utiliser les trois semaines qu’il lui reste à son congé de paternité, mais il craint d’être pénalisé pour ses prestations d’assurance-emploi. Impossible de savoir la bonne chose à faire.      


Les employés de l’assurance-emploi ne pouvaient pas lui donner de réponses, hier. Ils ont suggéré d’appeler un numéro sans frais, dont la ligne n’est jamais disponible, a constaté Alex.      





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