Cinq ans après

QS - 5 ans!



Quand Léger Marketing a inscrit le nom de Québec solidaire sur son questionnaire en avril 2006, le nouveau parti recueillait 8 % des intentions de vote. Lors du sondage de janvier dernier, le chiffre était de 10 %.
De passage au Devoir hier, à l'occasion du cinquième anniversaire de la fondation de QS, Françoise David reconnaissait avoir sous-estimé la difficulté de créer un nouveau parti. À plus forte raison un parti de gauche, terreau de division particulièrement fertile.
Certes, ce n'est pas demain la veille que QS sera appelé à former un gouvernement, mais une progression aussi lente n'a rien d'exceptionnel. Cinq ans après sa fondation, l'ADQ était toujours à... 10 %.
En réalité, le plus étonnant est peut-être que QS ait survécu si longtemps. On n'avait jamais vu un parti avec deux chefs. Lors du congrès de fondation, les militants avaient même été incapables de s'entendre sur un logo.
Le prétendu «virage à droite» du PQ qu'évoquaient les fondateurs de QS n'a pas provoqué l'hémorragie que prophétisaient certains. Malgré le retrait du statut spécial qui lui avait été reconnu au congrès de juin 2005, les sociaux-démocrates «purs et durs» du SPQ Libre sont restés au PQ.
Il est vrai que ce virage relève davantage du discours. Si le PQ est plus intransigeant sur l'élimination du déficit, c'est moins pour des raisons idéologiques que par crainte d'en hériter. Mme Marois aime bien parler de «création de richesse», mais la «proposition principale» qu'elle voudrait voir enchâssée dans le programme prévoit surtout sa redistribution. Rien ne permet de croire qu'un gouvernement péquiste remettrait sérieusement en question l'État-Providence.
QS a d'ailleurs contribué de façon non négligeable à freiner le recentrage du PQ. Après la défaite désastreuse de mars 2007, plusieurs étaient d'avis que la priorité devait être de récupérer les électeurs perdus à l'ADQ. Sans la crainte de voir les éléments plus progressistes chercher refuge à QS, Mme Marois aurait sans doute été plus sensible aux préoccupations de Joseph Facal ou de François Legault.
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Amir Khadir s'emporte quand on évoque l'hypothèse que les électeurs de gauche, même déçus du PQ, pourraient trouver que le plus urgent est de se débarrasser des libéraux. Une telle attitude témoigne «d'ambitions médiocres pour le Québec», dit-il.
L'idée qu'un vote pour QS soit un vote pour les libéraux est certainement déplaisante, mais Françoise David a elle-même rappelé cette vieille maxime de Mao: il faut toujours «faire l'analyse concrète d'une situation concrète». Et entre deux maux...
Soit, QS est aussi un parti souverainiste, mais qui peut sérieusement croire qu'il est plus susceptible de réaliser l'indépendance que le PQ? La «gouvernance souverainiste» de Pauline Marois en laisse plusieurs sceptiques, mais le pouvoir demeure une condition sine qua non.
Tant qu'un élément de proportionnel ne sera pas introduit dans le système, QS ne peut espérer faire une percée significative à l'Assemblée nationale, et la réforme du mode de scrutin n'intéresse plus qu'une poignée de spécialistes ou d'activistes. On assure que 60 % des membres de QS sont de l'extérieur de Montréal, mais ses chances de faire élire un député ailleurs au Québec dans un avenir prévisible sont infimes.
Mme David se dit ouverte à des alliances électorales. Le problème est que les rares circonscriptions où QS aurait peut-être une chance de faire un gain, par exemple Gouin, sont détenues par le PQ.
L'utilité de QS pour la société québécoise est sans commune mesure avec son poids électoral. Aussi bien le PLQ que le PQ demeurent voués au maintien du modèle hérité de la Révolution tranquille, malgré les efforts de Jean Charest pour s'en affranchir.
Il est bon de vérifier périodiquement si certaines idées sont toujours valables. Au cours des dernières années, les propositions faites par l'ADQ ont indéniablement enrichi le débat. À l'ère de la mondialisation, QS apporte un éclairage de gauche tout aussi indispensable.
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Que le seul député de QS soit aussi le préféré des Québécois n'est pas fortuit. Contrairement à Pierre Curzi, à Marguerite Blais ou à Gérard Deltell, Amir Khadir ne doit pas sa popularité à une carrière antérieure, pour ne pas dire télévisuelle, mais uniquement à son action politique.
Quand il a enguirlandé l'ancien président de la Caisse de dépôt, Henri-Paul Rousseau, en commission parlementaire, il a dit tout haut ce que la population pensait tout bas, mais qu'aucun autre élu n'osait dire. Cet homme-là venait de perdre 40 milliards et personne ne semblait s'en indigner.
Le député de Mercier est le seul à dénoncer l'exportation de l'amiante québécois dans les pays du tiers monde, où il n'existe aucun contrôle sur son utilisation. C'est facile quand on n'a aucun intérêt électoral à défendre, diront certains. Précisément, personne ne soupçonne M. Khadir d'être motivé par autre chose que l'intérêt public, que ce soit au Québec, en Inde ou en Palestine. Cela n'interdit pas nécessairement les erreurs, mais cela inspire confiance.
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mdavid@ledevoir.com


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