Pendant que tous les yeux sont tournés vers le fédéral, le Bloc québécois et les facéties de Martine Ouellet, on jase un peu moins de ce qui se passe à Québec.
Et pourtant, c’est bien dommage car à sept mois des élections, les choses commencent à changer. On le sent. Dans un coin comme le mien, en Outaouais, quand tant Libéraux de toujours annoncent qu’ils comptent bien passer leur tour cette fois-ci, c’est qu’il se passe quelque chose.
Les militants libéraux à qui j’ai parlé récemment, notamment dans le comté de Stéphanie Vallée, sont pas mal démotivés. On les comprendra, le Parti libéral du Québec est au plancher, jamais ces appuis n’ont été aussi bas, notamment au sein de l’électorat francophone. C’est un magnifique coin que ce comté de Gatineau. Des perles méconnues du Québec, comme Lac Ste-Marie par exemple. J’adore ce coin-là. Malgré tout, je doute beaucoup que le PLQ perdra ce comté-là.
Les sondages ne peuvent tout dire et sont le plus souvent de fort mauvais conseillers de certaines tendances régionales bien particulières. Les gens du comté de Papineau l’ont appris à la dure en 2012. Le fief de « Norm » Macmillan est venu à 160 voix de basculer vers le PQ. Les sondages régionaux prévoyaient une victoire du PQ. Mais le vote libéral en Outaouais est tenace.
Les sondages peuvent nous instruire de tendances. Et là où c’est particulièrement intéressant, c’est dans le cas de la fluctuation impressionnante du vote de Québec solidaire. On se souviendra que la firme Mainstreet a placé QS à tout près de 20% des intentions de vote il y a quelques mois. Je me souviens de l’enthousiasme de quelques militants de ce parti qui se voyaient déjà dépasser le PQ, et enfin, le tasser...
J’ai toujours eu des doutes sur ce score de Mainstreet mais on ne pouvait nier qu’il y avait bel et bien eu un « Effet GND ».
Toutefois, cet élan positif pour Québec solidaire qu’a provoqué l’entrée en scène de Gabriel Nadeau-Dubois en politique active semble bien s’être complètement estompé. La moyenne des appuis récents à ce parti se chiffre dans la marge d’erreur de ce qu’il avait récolté aux élections générales de 2014, autour de 9% des vote
Une courte prédiction
Je me souviens très bien du jour où GND a annoncé qu’il se lançait en politique. Cela n’a surpris personne et chez Québec solidaire, là où l’on aime bien se moquer (avec raison) de cette propension des péquistes d’attendre le « messie » qui les mènera vers le Grand soir, et bien laissez-moi vous dire que ce n’était pas loin du nirvana... Chacun sa tendance messianique.
Ce jour-là, j’avais osé cette courte prédiction : « Si #GND se fait grand défenseur de l’idéal diversitaire, il se plantera; s’il devient l’homme de la convergence, de l’unité, il triomphera. » C’était le 6 mars 2017.
En d’autres mots, Nadeau-Dubois allait-il se faire « porte-parole » de l’aile multiculturaliste, très forte chez Québec solidaire? Réussirait-il à rallier son parti à l’idée de discuter avec le Parti québécois?
Car, c’est bien de ça dont il s’agissait à l’époque : d’une part des militants chez QS, la majorité selon les quelques enquêtes qui ont posé la question à ces militants, qui souhaitaient que le parti explore cette occasion d’un meilleur succès électoral par des alliances électorales ponctuelles avec le PQ. De l’autre, une frange bruyante, influente, pour qui le PQ n’était ni plus, ni moins, que le démon. Ce repère de vipères identitaires infréquentables...
Fin mai 2017, Québec solidaire a tranché la question de façon brutale. Au terme de délibérations houleuses en congrès, la décision a été prise de ne pas discuter avec le PQ, QS a choisi de faire du Parti québécois un adversaire politique.
Une rebuffade pour deux des trois députés Qsistes en passant. Amir Khadir et Gabriel Nadeau-Dubois ont voté POUR que le parti sonde le terrain auprès du PQ. Manon Massé a voté CONTRE.
Ce n’est pas inintéressant de constater que ce sera Manon Massé qui s’est vue confier la responsabilité de représenter Québec solidaire à titre de candidate au poste de première ministre. Pas que je sois un grand « fan » de notre système électoral, loin de là, mais dans celui-ci, cela fait de Manon Massé la « cheffe ».
En contrepartie, au cours des dernières semaines, il apert que le parti ait sondé la possibilité de trouver un remplaçant pour Amir Khadir en offrant le comté qu’il représente à Jean-Martin Aussant notamment.
De telles tractations, si elles étaient faites au PQ ou au PLQ, on en ferait tout un plat. Ce n’est pas anodin. Québec solidaire n’est pas là où il espérait être à sept mois des élections, c’est l’évidence.
Un peu comme on pose la question quand il s’agit de l’intérêt que pourraient bien avoir les médecins Barrette ou Couillard de siéger pendant des années dans l’opposition (je n’y crois pas personnellement; je doute que Gaétan Barrette fasse un plein mandat s’il devait se représenter en octobre – n’oublions pas qu’il a menti là-dessus dans le passé- et se retrouver dans l’opposition d’un gouvernement majoritaire), on peut aussi questionner sur la place de GND dans tout ça.
Le jeune député a toujours établi sa stratégie politique en fonction d’une progression beaucoup plus grande du parti qu’il représente. Une réelle alternative de « pouvoir ». Son but a toujours été de travailler pour que QS passe de parti de la marginalité politique au statut de parti reconnu à l’Assemblée nationale qu’on traiterait sur un pied d’égalité avec les autres grandes formations politiques. Au mieux, en accomplissant cette tâche tant espérée chez Québec solidaire de tasser le PQ en le faisant.
Ça n’arrivera pas.
Mai 2017, en choisissant de se camper du côté de ces gauches « multiculturalistes », « antiracistes » et anti-nationalistes, Québec solidaire a aussi choisi le camp de la marginalité. Car il s’agit là d’une posture politique qui est bien populaire dans le coin de l’UQAM et de Concordia, certes, mais rejetée par l’écrasante majorité des Québécoises et des Québécois, de toutes tendances idéologiques.
Et c’est tant mieux.
