Boisclair accuse Charest de faire du chantage

Québec 2007 - démagogie et populisme


par Hugo de Grandpré et Tommy Chouinard - Les transferts fédéraux vers le Québec pourraient diminuer dès le lendemain d'une prise de pouvoir du Parti québécois, a laissé entendre Jean Charest durant un point de presse à Boucherville, hier.
Au coeur d'une confrontation sur la question référendaire en ce début de course électorale, le premier ministre s'est défendu de vouloir mener une campagne de peur.
Or, a-t-il laissé entendre pour la première fois depuis le début de la campagne électorale, les ambitions référendaires du PQ pourraient suffire pour que le fédéral diminue certains de ses transferts. Au cours des derniers jours, André Boisclair et François Legault ont prétendu le contraire, disant que les sommes annoncées pour le règlement du déséquilibre fiscal seraient versées au Québec, quel que soit le parti au pouvoir.
«Ils se dépêchent ensuite de dire que cet argent-là va, de toute évidence, être coupé substantiellement le jour où le Parti québécois va prendre le pouvoir, parce que ce qui transcende toutes ses priorités, c'est de faire un référendum le plus vite possible», a lancé le premier ministre Charest.
M. Charest répondait à une question au sujet du sort réservé aux sommes cédées à la province dans le cadre du règlement du déséquilibre fiscal. Stephen Harper répète depuis son arrivée au pouvoir que le prochain budget fédéral, qui sera déposé une semaine avant le jour du scrutin au Québec, contiendra d'importants montants pour le Québec à cet effet.
«Et cet argent-là, il va y arriver quoi le lendemain (d'un référendum), si jamais le Parti québécois réalisait son ambition? a encore demandé le chef libéral dans un deuxième temps. Ce n'est pas vrai que le gouvernement fédéral va continuer à faire des transferts de péréquation au Québec. Oublions ça. C'est du délire, ça.»
Dans sa plateforme adoptée samedi, le PQ met la priorité sur la tenue d'un référendum le plus rapidement possible après son élection. On peut notamment y lire que dans la période de transition qui suivrait une telle consultation, un gouvernement péquiste «garantirait la continuité des transferts fédéraux versés aux citoyens québécois.»
Depuis, les deux partis se livrent un duel intense sur le sens des mots et leurs intentions respectives. Jean Charest avait déjà indiqué que la garantie de maintien des transferts après la victoire du OUI à un référendum n'était que pure illusion. Mais il n'avait encore jamais ouvert la porte à une diminution des transferts dès l'élection du PQ.
Chantage
Hier en soirée, le chef du Parti québécois, André Boisclair, a réagi avec force aux propos du chef libéral.
«Ça, ça s'appelle du chantage», a tonné M. Boisclair, devant des militants réunis dans la circonscription de Marie-Victorin, à Longueuil.
«Les Québécois en ont assez. Voilà pourquoi on va faire la souveraineté du Québec», a-t-il ajouté.
Selon lui, Jean Charest et son homologue fédéral Stephen Harper «sont en train de nous organiser, de vouloir nous faire la passe pour sauver leur peau».
«Jamais dans l'histoire du Canada nous n'avons vu autant de chantage, une telle menace», a-t-il affirmé.
«Si les gens à Ottawa sont prêts à nous faire un tel affront, il va falloir qu'on aille chercher en-dedans de nous la confiance et l'assurance pour nous dire collectivement que c'est assez et qu'il est temps qu'on aille chercher tous nos pouvoirs.»
André Boisclair croit que Jean Charest, avec ces plus récentes déclarations, cherche à «faire oublier ses quatre ans de pouvoir. Il n'est pas fiable». «C'est ça, le fédéralisme asymétrique de M. Charest? Ça, c'est le fédéralisme du chantage! Ça fait trop longtemps qu'on en souffre. Ça suffit!»
«Ne cédons pas au chantage et sanctionnons celles et ceux qui pensent que l'argent qui vient d'Ottawa est un cadeau qu'il nous faisait, alors que cet argent-là vient de vos poches», a-t-il ajouté.
Toute la place
La question de la souveraineté occupe pratiquement toute la place en ce début de campagne, où tous les partis ont maintenant affiché leurs couleurs et leurs programmes.
M. Charest accuse notamment M. Boisclair de jouer sur les mots en remplaçant la notion de référendum par celle de consultation populaire dans sa plateforme.
La question des transferts fédéraux au lendemain d'un OUI a aussi été l'objet de plusieurs attaques du premier ministre, hier comme samedi.
Le lendemain d'un référendum, «ce n'est pas vrai que le gouvernement fédéral va continuer à envoyer des chèques au Québec! La péréquation c'est fini; les transferts fédéraux, c'est fini», a-t-il plaidé à Boucherville en avant-midi.
Jean Charest a aussi rappelé les propos que tenait l'ancienne candidate à la course au leadership du PQ, Pauline Marois. Elle «a affirmé que la transition, c'était cinq ans de perturbations, a-t-il paraphrasé. Comme si le Québec avait besoin de ça.»
Flanqué de Jacques Parizeau et devant plus de 200 militants réunis à Laurier-Dorion, André Boisclair a été plus éloquent que jamais sur la question référendaire et martelé le fait qu'il tiendrait un référendum le plus tôt possible après son arrivée au pouvoir.
Il a par ailleurs reproché à Jean Charest de faire depuis deux jours «un débat sur des mots avec un dictionnaire», plutôt qu'une campagne d'idées.
«Il est en train de cacher les débats les plus importants sur le fond de choses», a-t-il ajouté.


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