Au lendemain du Conseil de la Fédération

Chronique d'André Savard

Quand Jean Charest a fondé ce qui fut nommé pompeusement le Conseil de la Fédération, il était clair que le principe était de s’accepter comme province canadienne. Il était clair qu’après l’enfer débilitant du gouvernement Landry, on allait enfin faire plus avec moins. Comme l’assurait Charest, Québec allait prendre sa place de province canadienne. Il était même tout content d’affirmer que Québec serait un modèle de province canadienne au point que toutes les provinces anglaises voudraient l’imiter.
Dans cette perspective exaltante, on a parlé de réforme de l’assurance-chômage au dernier conseil de la fédération. Il y a des chômeurs partout au Canada et le Québec veut former une coalition pour que les critères d’admissibilité soient appliqués d’un océan à l’autre. Comme tel, ce n’est pas une réclamation litigieuse qui menacerait de nous voir briser les rangs provinciaux. C’est de la grande stratégie : Québec se comporte en province modèle et le Fédéral ne jugera donc pas nécessaire de donner un bon tour de vis.
Ce faisant, Québec n’outrepasse pas ses compétences. L’aide sociale et les centres d’emplois sont sous son administration et il doit payer pour ceux qui sont éconduits par le régime d’assurance-chômage. Si assez de provinces se mettent d’accord, ce sera une machine à pression auprès des partis politiques fédéraux qui sont lancés dans des discussions sur la question.
C’est ce qu’on appelle de la politique modèle au Canada avec de bonnes provinces, sans distinction d’origine, pataugeant dans leur espace administratif.
Pour avancer, les provinces doivent s’identifier à des intérêts communs. Charest a appris que la différence québécoise aboutit à des discussions stériles. En fait, il n’est même pas certain que celui qui occupe le poste de premier ministre du Québec ose parler de la différence québécoise si d’aventure il se lance dans des petites discussions de confessionnal avec ses pairs.
Charest est un homme très agressif lors de la période des questions à l’Assemblée nationale. On peut même dire qu’il répond plus comme un chef de l’opposition, un chef de bataillon qui explique que tout est de la faute de l’administration péquiste que comme un homme au pouvoir. Charest se dit qu’il faut toujours être à l’offensive, jamais sur la défensive.
S’il était un quelconque innovateur, un quelconque champion de la justice, elle pourrait avoir du bon, cette attitude. Mais le Québec que Charest défend avec les fédéralistes n’est qu’une unité dans la répartition des pouvoirs. Il n’y a pas de possibilité en germe, seulement l’idée que le Québec doit continuer d’assurer les responsabilités en rapport avec sa nature de province. Charest garde toute son agressivité pour rembarrer l’opposition et ça s’arrête là.
Inutile de se demander pourquoi les gens sont découragés de la politique. Inutile de se creuser les méninges à savoir pourquoi Obama est le seul qui intéresse monsieur tout-le-monde. Le fédéralisme dit « évolutif » proclame une répartition des pouvoirs, une division des titres et des statuts pour l’éternité. On a rarement vu pareille platitude, une mocheté aussi ordinaire.
Comme Québécois, nous avons l’assurance-chômage comme cheval de bataille parce que, nous assure Charest, il y a là possibilité de consensus provincial. Le consensus provincial est la seule façon d’éviter les discussions inutiles qui ne font que jouer sur les mots. Pour éviter les discussions inutiles, le fédéralisme doit atteindre un épanouissement jusqu’à présent jamais vu.
Toutes les grandes qualités du fédéralisme canadien doivent être encore plus grandes, nous disent nos premiers ministres, qu’ils soient canadiens ou québécois. On doit améliorer l’assurance-chômage, maintenir la péréquation, et ainsi produire des valeurs matérielles canadiennes. Ceci sans parler des valeurs spirituelles canadiennes qui viennent du fait que la nation québécoise ne forme qu’un seul peuple avec les autres, tous étant bien libres de décider pour les autres. Avec Charest dans son Conseil de la Fédération, c’est devenu le point de vue du Québec, sa nouvelle position traditionnelle.
André Savard


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