Anticosti - L’évaluation reste à faire

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L'erreur a été de céder des droits sur un élément inaliénable du patrimoine collectif des Québécois

Maintenant que le contrat liant la société d’exploration Pétrolia à Hydro-Québec est connu, nous savons que la société d’État ne s’est pas laissé bêtement rouler dans la farine comme on l’appréhendait… Cela dit, l’essentiel reste à faire : évaluer si l’exploitation du pétrole de l’île d’Anticosti en vaut la peine.

C'est à la demande du gouvernement de Jean Charest qu’Hydro-Québec avait mis fin aux activités de sa filiale Pétrole et gaz à la fin de la décennie 2000. Pourtant, l’exploration d’hydrocarbures faisait toujours partie du plan stratégique 2006-2015 de la société d’État entériné par Québec.

En 2008, Hydro annonçait donc qu’elle cédait ses permis d’exploration du sous-sol de tout l’est du Québec, y compris Anticosti, par appel d’offres à des sociétés privées, en contrepartie « de redevances prioritaires ». Malgré les demandes répétées de l’opposition et du public, les termes de la transaction sont restés secrets jusqu’à la semaine dernière, alors que Pétrolia consentait finalement à ce qu’ils soient divulgués.

Le gouvernement Charest n’aurait jamais dû céder les droits sur une richesse collective, ne serait-ce que pour pouvoir choisir le meilleur moment de l’exploiter. Car, même en 2008, on savait qu’il y avait du pétrole et du gaz dans le sous-sol québécois sans toutefois pouvoir en évaluer l’importance.

Cela dit, on ne refait pas l’histoire, et ce qui importe désormais, c’est de savoir s’il vaut la peine d’exploiter le pétrole d’Anticosti, tant sous l’angle financier qu’environnemental.

L’entente rendue publique la semaine dernière nous apprend d’abord qu’en échange des permis d’exploration, Hydro-Québec s’est assurée de pouvoir redevenir partenaire de Pétrolia avant tout autre investisseur si le gouvernement le juge bon.

En ce qui a trait aux « redevances prioritaires » consenties par Pétrolia en échange des permis, Hydro retirerait jusqu’à 3 % du prix du baril réduit des redevances versées à l’État et des coûts de transport. Il n’est donc pas question de pourcentage sur les revenus nets ou sur les profits, ce qui est une bonne nouvelle compte tenu des coûts d’exploitation prévisibles très élevés.

En revanche, ces 3 % appliqués aux quelque 600 millions de barils exploitables sur l’île entraîneraient tout au plus 2 milliards de dollars de redevances pour Hydro répartis sur une vingtaine d’années. Ce n’est pas rien, mais ce n’est pas l’Alberta !

À cette somme, il faut bien sûr ajouter les redevances versées à l’État, que la ministre Martine Ouellet souhaite les plus élevées possible, mais le risque est aussi grand que subventions et crédits d’impôt annulent ces recettes pendant plusieurs années, comme c’est souvent le cas dans le secteur des ressources. En outre, qui paiera pour la construction d’un pipeline et d’un port de transbordement ?

Cela nous conduit à la question fondamentale de la protection de l’environnement. Selon des experts, l’exploitation de pétrole de schiste exigera de creuser des milliers de puits et d’y injecter des millions de litres d’eau, de produits chimiques ou de propane pour en extraire le pétrole emprisonné dans la roche.

À ce jour, nous ne disposons toujours pas d’études rassurantes portant sur la fracturation hydraulique, ni d’études appliquées au contexte d’Anticosti.

Avant de prendre quelque décision que ce soit, il reste énormément de recherche à accomplir et de réflexion à mener avec l’aide incontournable du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement.


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