Cette question, nombre de personnes se la posent à mon sujet lorsque j’aborde le problème de la langue parlée au Québec et dans les communautés francophones du Canada.
S’il existe un sujet tabou chez nous, ce n’est pas le sexe dans tous ses états, mais la qualité de la langue. Depuis des décennies, toute velléité de considérer rationnellement la dégradation du français parlé plonge beaucoup de gens dans une rage. Si bien que l’on comprend le calvaire que subissent les enseignants du français dans nos écoles. Il est devenu quasi impossible de corriger le français des étudiants. « J’parle comme j’parle. C’est quoi le problème ? », s’interrogent plusieurs.
S’efforcer d’améliorer la qualité de sa langue est considéré par certains presque comme une tare. D’autres vont encore plus loin en parlant d’une trahison à l’endroit du « peuple » dont ils s’estiment les représentants.
Or, la langue française représente un pouvoir pour ceux qui respectent son génie propre. C’est une langue qui nous oblige à l’effort. Elle est complexe. Elle foisonne de difficultés, donc elle nous oblige à un travail permanent. Son apprentissage dure en fait toute une vie.
Langue universelle
Nous avons la chance de parler une langue universelle, contrairement à toutes ces autres langues qui n’ont que des locuteurs restreints. Comme au Danemark, en Suède ou en Norvège, des pays qui craignent aujourd’hui l’anglicisation systématique des nouvelles générations de la mondialisation culturelle. Qui craignent en fait la disparition de leurs langues respectives.
La langue française nous ouvre au monde et c’est pourquoi on ne peut pas baragouiner si l’on veut se faire comprendre par les centaines de millions de personnes qui la partagent avec nous.
Au Québec, on a tendance à se méfier des « instruits » qui manient la langue avec fluidité et un vocabulaire riche.
Ce complexe d’infériorité rattaché à une époque où nous étions collectivement des porteurs d’eau sans pouvoir, sans parole, ne serait pas révolu, hélas !
Exemplaire
Nous ne pouvons pas être en faveur de la loi 101 sans respecter notre langue, que nous imposons aux autres. La qualité du français parlé par plusieurs immigrants devrait nous servir d’exemple. Combien de fois a-t-on constaté que des arrivants allophones qui ont suivi des cours de français s’expriment correctement et en sont fiers ?
À quoi sert l’éducation, sinon à transmettre ce qui nous distingue et devrait nous honorer, car le français est une des langues qui a véhiculé les valeurs de la civilisation occidentale ? Or, quelle désolation que de réduire cette langue à un simple moyen de communication, à une espèce de pipeline rempli de mots !
Ne nous illusionnons pas. Les Québécois qui s’expriment bien, qui savent écrire sans fautes, sont privilégiés professionnellement, socialement et culturellement.
Je sais que sur ce sujet je dis tout haut ce que pensent plusieurs. Mais la langue et la culture ont besoin d’être défendues publiquement. La langue belle appartient à qui sait la défendre, comme chantait Yves Duteil. Elle nous ouvre au monde tout en étant au cœur de notre identité.