À quoi ça sert, un élu?

Charest - dilapidation, dissimulation et corruption


C'est le mois des impôts. Le mois où les citoyens respectent leur part du contrat social: redonner aux divers gouvernements une part substantielle de leurs revenus en échange de services publics, d'infrastructures et d'un filet de sécurité.
Par les temps qui courent, ça risque aussi d'être le mois de la colère face à des élus donnant l'impression de respecter de moins en moins leur part du contrat. Payer des impôts pour contribuer au bien commun, bravo. Mais pas pour en faire profiter les tinamis aux contrats gouvernementaux plantureux!
Il se trouve que la crise économique rend les gens plus sensibles à ce genre de choses. Comme ils le sont à la perte de 40 milliards de dollars par la Caisse de dépôt et placement et à la nomination d'un Michael Sabia à sa tête. Et que dire de cette brochette d'histoires de copinage entre élus, syndicats et gros bonzes de la construction, de possible corruption, d'élus passant à des firmes privées auxquelles ils avaient accordé faveurs et/ou contrats. Philippe Couillard et Frank Zampino, ça vous dit quelque chose?
En réponse, le gouvernement Charest lance maintenant la même insignifiance qu'ânonnait Jean Chrétien lors des commandites: s'il y a des problèmes, pas de commission d'enquête. La police va s'en occuper! Bien sûr. Et Obama se rendra sur Mars la semaine prochaine... Avouez que la soupe ne sent pas très bon. Résultat: même si la perfection n'est pas de ce monde, des voix exigent qu'ici, comme dans le reste du Canada, un commissaire à l'éthique indépendant et un code de déontologie régissent les élus. Un minimum.
Où est passée une partie de notre argent?
Mais un minimum qui ne doit pas escamoter la vraie question: à quoi servent les élus? À quoi ça sert s'ils ne réussissent plus à nous convaincre qu'ils sont capables de gérer notre argent avec une éthique impeccable, imputabilité et une vision responsable du bien commun? À quoi ça sert si, lorsque vient le temps de dépenser NOTRE argent, il leur arrive de déléguer leur propre pouvoir à des non-élus, du genre "amis du régime"? Ont-ils conscience que ce faisant, ils affaiblissent la démocratie? Je parle de cette culture vaseuse où notre argent est vu comme une grosse assiette au beurre par le secteur privé, duquel les gouvernements n'osent plus exiger un minimum de rigueur dans la livraison, la qualité et le coût d'un produit. Facile d'être généreux avec l'argent des autres...
Des méga-hôpitaux virtuels aux coûts projetés astronomiques. Des milliards coulés dans des routes coûtant de 10 à 20 % plus cher que dans le reste du pays et se détériorant plus rapidement! Des centaines de millions engloutis dans l'îlot Voyageur de l'UQAM. Trente-cinq millions perdus par le Comité de gestion de la taxe scolaire de l'île de Montréal dans les papiers commerciaux. Une entente avec l'Ontario, un piège à cons, facilitant l'exode de médecins formés par nos deniers. Ces compagnies minières dont on exige aucune redevance, ou ridiculement peu. Ces 355 millions pour des compteurs d'eau à Montréal alloués à une firme dont zebigboss(*) copine avec moult politiciens et en embauche même de très haut placés, du genre Zampino, l'ex-bras droit du maire Gérald Tremblay. Pendant ce temps, le gouvernement s'apprête à dépenser un autre 42 milliards en infrastructures. Piégés, les citoyens savent qu'en crise économique, c'est essentiel, mais ils craignent qu'une bonne part finisse aussi par graisser la patte des tinamis à l'appétit aiguisé ou aux yachts majestueux.
Quelque chose de fondamental ne tourne pas rond dans la gestion de notre argent. Dommage, parce que le niveau d'éthique de nos élus n'est sûrement ni pire, ni meilleur que celui d'autres démocraties. Le problème, c'est la petite taille du Québec. Et donc, son petit nombre de distributeurs et de bénéficiaires de l'assiette au beurre. Ce qui rend plus facile ce glissement tranquille vers le copinage. Tout ce beau monde finit par se connaître, quel que soit le parti au pouvoir. De fait, l'"élite" québécoise, et la génération qui la contrôle, est tissée tellement serré qu'il est difficile de trouver quelqu'un d'assez solide pour tenter d'en défaire quelques mailles. Parfois, un Jean Lesage ou un René Lévesque ose le faire. Ce qui fonctionne jusqu'à ce que le tricot se resserre à nouveau. Comme aujourd'hui.
En colère, les gens se demandent quoi faire. Comment exiger des élus qu'ils jouent pleinement leur rôle de gestionnaire du bien commun. Certains diront que la colère n'est jamais bonne conseillère. Mais il arrive aussi qu'elle pousse à mieux comprendre, à dire les choses, discuter, écrire, interpeller les élus. Et à voter. Bref, à se mêler des affaires de la Cité. Rien ne profite plus aux profiteurs que le silence. Et il me semble que la société civile est plutôt bien partie. Les crises s'avèrent parfois de formidables éveilleuses de consciences...


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