Voilà pourquoi il n’y a toujours pas d’accord avec l’Iran sur le nucléaire

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Les États-Unis en proie à l'ivresse des sanctions

VIENNE – Alors que la négociation Iran-P5 + 1 atteignait son étape décisive lundi soir, et que les équipes techniques avaient poussé pour qu’un texte clair soit divulgué mardi – sans succès – le point d’achoppement s’est avéré être l’embargo sur les armes classiques imposé à l’Iran par le Conseil de sécurité, a déclaré un diplomate européen à Asia Times.

Les membres du BRICS au Conseil de sécurité, Russie et la Chine, avaient une position coordonnée : oui à la fin de l’embargo. Les États-Unis et le Royaume-Uni ont voté non. Et, surtout, ce qui est crucial, la France a hésité.

Si la décision n’avait dépendu que du ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius, le vote aurait été non. Mais ,sans doute, si la décision finale était revenue au président François Hollande, ce serait un oui. L’industrie française de l’armement adorerait ajouter Téhéran à sa liste encore maigre de clients pour les Rafale et Mistral.

En regardant la situation dans son ensemble, les diplomates iraniens ont insisté, soulignant que «toutes les sanctions liées au nucléaire devraient être supprimées. Cela a été convenu à Lausanne». Cela signifie que l’embargo sur les armes classiques, imposé par l’ONU en 2007 et lié aux sanctions nucléaires, devrait être annulé aussi.

Par conséquent ce qui a été rapporté par Asia Times au début de cette semaine est toujours vrai ; il y a des fissures graves dans le P5 + 1 sur plusieurs questions clés, donc ils ont besoin de passer plus de temps à négocier entre eux qu’avec l’Iran.

Voilà la raison principale d’une nouvelle prolongation du délai – au jeudi 9 juillet. Et même cela peut ne pas être la fin de la route.

Toutes ces parenthèses !

Alors qu’il restait seulement 24 heures, à ce jour J de mardi, les signaux étaient extrêmement confus. La délégation iranienne a souligné que «ce ne fut pas une impasse» ; après tout, les ministres des Affaires étrangères du P5 + 1 étaient réunis jusque tard dans la nuit pour la deuxième fois en une journée frénétique. Les négociateurs iraniens ont insisté: «L’Iran est prêt à continuer aussi longtemps qu’il y a une possibilité de progrès.»

Pourtant, la nouvelle date limite provisoire – jeudi – flottait déjà. Les Russes, pour leur part, se préparaient à quitter Vienne mardi soir ; la prochaine destination immédiate – qui devait aussi, initialement, compter sur la présence du ministre iranien des Affaires étrangères Zarif – est la réunion cruciale des sommets simultanés des BRICS et de l’OCS à Ufa, en Russie. L’OCS va commencer à discuter activement de l’adhésion de l’Iran en tant que membre, dès l’année prochaine, lors de son sommet en Inde.

Bien qu’ils aient toujours pris soin de souligner qu’ils n’étaient pas pressés par le temps, une certaine frustration au sujet des intentions réelles de leurs homologues américains a commencé à s’infiltrer parmi les diplomates iraniens : «S’ils ne peuvent pas traduire les intentions politiques en décisions politiques, nous devrons arrêter ces négociations.»

Pourtant, «les deux parties ne veulent pas perdre l’élan». La position plutôt peu diplomatique de Kerry dimanche dernier – «Rien n’est joué, l’affaire pourrait aller d’un côté ou de l’autre» – a été interprétée par les Iraniens comme un message pour apaiser le front intérieur (aux États-Unis) et gagner la bataille de l’opinion publique à la maison. Ce que les Iraniens ont surtout retenu était : «Nous avançons.

Il est difficile d’imaginer la complexité cachée dans un texte exhaustif de 85 pages détaillées, avec cinq pièces jointes. Les responsables iraniens le décrivent comme «un paquet de 85 pages avec beaucoup de parenthèses». Comme l’a précisé l’un d’eux, «même pour un mot, ou parfois une préposition, nous devons passer une réunion plénière de deux heures sur le plan technique». Une réunion est considérée comme un succès lorsque les négociateurs ont réussi à s’accorder sur 15 à 20 parenthèses en une journée.

«Une résolution sera présentée.» Voilà ce qui a été défini pour la phase finale, après l’accord. Le Conseil de sécurité va prendre note de ce qu’il a été convenu à Vienne. Et puis cette résolution suspendra toutes les résolutions antérieures le jour de sa mise en œuvre. «L’avantage de cette résolution, ajoute un expert technique iranien, est d’enregistrer l’accord conclu à Vienne. Ensuite tout passe sous la juridiction du Conseil de sécurité.»

Par une nuit viennoise profonde et chaude, avec le légendaire Café Sacher déjà fermé, il y avait encore un long chemin à parcourir. Dans une chambre d’hôtel, un diplomate iranien réfléchit. «Les Américains ont créé une structure de sanctions qu’ils ne veulent pas détruire. Émotionnellement, ils veulent la garder.» Il n’est pas étonnant que la plupart des parenthèses non résolues dans le texte final se rapportent encore à des sanctions américaines et européennes.

Et il y a le bât qui blesse, une fois de plus ; l’administration Obama, pour son plus grand honneur, pourrait-elle finalement lâcher l’arme de choix de la politique étrangère américaine, les sanctions? Ce serait digne d’une soirée de gala à l’opéra de Vienne.


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