Éditorial - On aura beau faire les plus beaux discours, le dépôt du budget du Québec, aujourd'hui, ressemblera à une visite chez le dentiste : sans douleur peut-être, mais avec une facture à la sortie.
La politique étant ce qu'elle est, il y a bien longtemps que les gouvernements ont mis de côté les grands principes visant à faire d'abord appel à l'impôt sur le revenu et se sont tournés vers la tarification des services gouvernementaux et paragouvernementaux. Même le PQ "social-démocrate" comptait sur des hausses de tarifs secrètes dans son budget de 2003, tout juste avant le déclenchement des élections. Une hausse d'impôt, c'est public et trop évident. Une hausse de la tarification, c'est beaucoup plus discret...
Les contribuables québécois devront donc lire entre les lignes et sortir leurs calculatrices s'ils désirent connaître l'effet réel de ce budget sur leurs finances personnelles et sur celles de leurs concitoyens.
Voyons donc la dette : de nombreuses fuites ont circulé sur les intentions gouvernementales. Si elles sont fondées, le gouvernement imposerait des redevances sur l'eau, dont les revenus iraient au nouveau Fonds des générations, créé pour rembourser la dette. André Boisclair pourra difficilement s'y objecter, puisqu'il avait annoncé la même intention le 24 octobre 2002, dans le cadre de la Conférence financière internationale de Montréal. "Il faut que ceux qui utilisent l'eau à des fins industrielles paient une juste note, surtout quand c'est de l'eau traitée par des services publics", avait-il déclaré, en faisant référence à une nouvelle politique nationale de l'eau. Voilà une citation qui plaira certainement au ministre Michel Audet... s'il utilise cette voie.
Autre rumeur : Hydro-Québec serait mis à contribution... Il n'y a rien de bien surprenant là-dedans parce qu'Hydro-Québec, c'est la vache à lait du gouvernement depuis longtemps. Mais c'est aussi un vase communicant... Si le ministère des Finances demande plus de revenus à la société d'État, ce sont les consommateurs qui paieront la note, même s'ils ne connaîtront pas le coût de l'addition immédiatement. Comme chez le dentiste, il leur faudra attendre la fin du traitement, et c'est Hydro qui portera l'odieux de la hausse. Même chose pour la Société des alcools d'ailleurs.
Au fond, il y a mille et une façons de triturer un budget pour aller chercher des revenus supplémentaires chez les contribuables. La plus facile est de transférer certaines dépenses à un autre ordre de gouvernement. Les municipalités ou les commissions scolaires, par exemple. C'est ce qu'a fait le gouvernement fédéral avec les provinces. Mais plus rusé encore, il suffit de baisser un tant soit peu l'indexation au coût de la vie des tables d'impôt pour augmenter les revenus du gouvernement.
Il y a toujours les revenus du "vice", les taxes sur l'alcool, le tabac et Loto-Québec. Dans ce dernier cas, il faudra voir les revenus escomptés des loteries pour savoir si le gouvernement est sincère lorsqu'il prétend vouloir diminuer l'offre de jeu. Rappel utile, ces revenus se sont situés entre 1,3 et 1,5 milliard $ de 2001 à 2005. Si les revenus anticipés sont similaires ou supérieurs dans le budget d'aujourd'hui, c'est que l'offre du jeu sera similaire ou supérieure...
Le gouvernement Charest a sans doute mis beaucoup d'efforts dans la préparation de ce budget, qui doit mettre la table pour la prochaine campagne électorale, attendue en 2007. Le discours se voudra sans doute encourageant et optimiste. Mais dites-vous bien que malgré toutes ces belles paroles et quelques petits cadeaux, vous sortirez moins riches de l'exercice. Avec une dette de 118 milliards $, c'est bien difficile de jouer au père Noël. Passons donc chez le dentiste. Au moins, c'est pour une bonne cause.
GLavoie@lesoleil.com
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