Une identité québécoise à assumer

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«À qui veut régénérer une société en décadence, on prescrit avec raison de le ramener à ses origines» - Léon XIII






Après avoir obtenu une bonne couverture médiatique en France avec son nouvel essai publié aux Éditions du Cerf, Le multicultu­ralisme comme religion politique, le docteur en sociologie Mathieu Bock-Côté, collaborateur au Journal, explique ses idées sur le multiculturalisme, une idéologie qu’il critique. Il ne trouve pas du tout gênant le dicton «À Rome, fais comme les Romains».




En entrevue téléphonique, Mathieu Bock-Côté se décrit comme un «critique assez sévère» du multiculturalisme comme idéologie, c’est-à-dire «l’inversion du devoir d’intégration» et souhaite montrer pourquoi dans son livre. Il s’est inspiré des œuvres des grands penseurs de la modernité pour asseoir son analyse. «Le multiculturalisme, ce n’est pas simplement une plus grande hospitalité à l’endroit de ceux qui arrivent. J’essaie de montrer comment c’est une doctrine fondée sur la négation de l’idée même de société d’accueil», dit-il.




«Convergence culturelle»




Il propose plutôt la «convergence culturelle», c’est-à-dire que la «société d’accueil n’est pas qu’une collection d’individus porteurs de droits». «C’est une culture, c’est une histoire, c’est une mémoire, c’est des mœurs, c’est une manière de vivre, et la vocation du nouvel arrivant est de prendre le pli de la société d’accueil», énumère-t-il. «Le multiculturalisme dit plutôt que c’est la société d’accueil qui doit transformer ses institutions et sa culture pour accommoder la “diversité”.»




Il poursuit. «Les codes de l’hospitalité, c’est de reconnaître qu’on arrive dans un endroit qui n’est pas une page blanche, qui n’est pas une zone administrative neutre. On arrive dans un pays et on s’approprie son histoire et on apprend à dire nous avec lui. Dans le livre, c’est l’arrière-fond critique. Je pense que ce qu’on appelle la nation, l’identité nationale, c’est pas mal. Je ne pense pas que la défense de son identité c’est de la xénophobie. J’ai tendance à avoir une vision fondamentalement positive d’un pays qui assume positivement son histoire.»




Il trouve qu’il faut «en finir avec les discours culpabilisants». «Cette idée qu’“à Rome, fais comme les Romains”, ce n’est pas une idée honteuse. Ce n’est pas une idée gênante. C’est simplement les codes de l’hospitalité: on arrive dans un pays et on s’y intègre.»




Le propos a une importance particulière, ajoute-t-il, à un moment où, au Canada, Justin Trudeau est au pouvoir. «Pour lui, le multiculturalisme, c’est même pas une idéologie, c’est sa langue maternelle. Il y a une forme de politiquement correct spontanée chez lui. Donc, plusieurs ont probablement un malaise lorsqu’on leur explique, par exemple, que les Québécois, c’est juste un groupe parmi d’autres dans la diversité canadienne, comme si on n’était plus un peuple fondateur de quoi que ce soit. Eh bien, ceux qui liront mon livre trouveront que ça n’a pas de sens de traiter le peuple fondateur d’un pays comme une communauté parmi d’autres.»




Thèmes importants




À son avis, la culture québécoise ne devrait pas être optionnelle au Québec, «tout comme la culture française ne devrait pas être optionnelle en France, la culture allemande ne devrait pas être optionnelle en Allemagne».




«Je pense que les pays, en général, devraient assumer leur identité, et ceux qui les rejoignent ont tout intérêt à s’approprier cette identité. Ça ne veut pas dire qu’on ne s’enrichit pas de la présence de l’autre, mais ça veut dire quand même qu’on sait que ce pays-là n’est pas une page blanche.»




Les idées de Mathieu Bock-Côté ont été bien reçues en France, où le livre est d’abord paru. «Je crois que les préoccupations liées à l’identité nationale, au multiculturalisme, aux accommodements raisonnables, à la diversité, à la laïcité, tous ces thèmes sont très importants aujourd’hui.»






» Sociologue (Ph. D), chroniqueur au Journal, Mathieu Bock-Côté est également collaborateur au Figaro, entre autres.






» Il est l’auteur de plusieurs livres, notamment Exercices politiques (2013), Fin de cycle (2012) et La dénationalisation tranquille (2007).



 



Extrait











Mathieu Bock-Côté<br /><br>Le multiculturalisme comme religion politique <br /><br>Les Éditions du Cerf <br /><br>272 pages<br>




Photo courtoisie


Mathieu Bock-Côté

Le multiculturalisme comme religion politique

Les Éditions du Cerf

272 pages








«Notre époque, lorsqu’elle cherche à définir son horizon historique, se réfère à l’ethos de la diversité identitaire. Il faudrait s’y ouvrir et y convertir les institutions et les représentations collectives, au nom de l’ouverture à l’autre. Dans l’aventure humaine, nous serions rendus à cette étape sublime. Pour le dire avec l’ancienne formule, ce serait l’horizon indépassable de notre temps. À tout le moins, la civilisation occidentale y serait rendue. On célèbre périodiquement les années 1960-1970, on s’y réfère spontanément pour marquer la naissance d’une civilisation différente de celle qui l’a précédée. On les associe à l’idéal d’une société progressiste, transnationale et multiculturelle, à la sensibilité contestataire portée par la mouvance contre-culturelle. L’idéal démocratique se serait ainsi régénéré.»




— Mathieu Bock-Côté, Le multiculturalisme comme religion politique




 




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