Une consultation sur le racisme sans Québec

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La pleurniche victimaire des associations subventionnées atteint un sommet

Pied de nez au Forum sur l’intégration des immigrants en emploi qui s’ouvre aujourd’hui sur fond de critiques : une cinquantaine d’organismes de la société civile lanceront une consultation parallèle pour parler de racisme.

 

C’est ce que doivent annoncer aujourd’hui en conférence de presse des syndicats, des organisations féministes, LGBT et de défense des droits des immigrants aux côtés de la Table de concertation sur le racisme systémique (TCRS), dont plusieurs membres militent depuis la première heure pour la création d’une commission publique sur le sujet.

 

Ces groupes estiment que le gouvernement « a abandonné » l’idée d’une commission indépendante sur ces enjeux et mèneront eux-mêmes cette démarche citoyenne indépendante, dont les contours sont encore à définir.

 

L’idée est de parler des « alternatives », a indiqué la porte-parole de la TCRS, Émilie Nicolas. « On veut lancer les choses avant que tout soit complété et on veut assurer une participation large au brainstorm », dit-elle. « On est dans le constat que rien ne va bouger avec le gouvernement. »

 

 

Cynisme et scepticisme

 

Le forum, qui recevra essentiellement des conférenciers du milieu des affaires, s’amorce également sur fond de cynisme et de scepticisme de la part de nombreux organismes.

 

Déjà au moins 6 des 31 organismes mandatés par le ministère de l’Immigration (MIDI) pour mener des consultations locales se sont retirés du processus depuis que le ministre David Heurtel a annoncé une réorientation axée sur l’emploi de la consultation.

 

Certains boycotteront l’événement — tandis que d’autres se sont désistés après avoir appris qu’ils n’auront qu’un statut d’observateur.

 

« On ne veut pas se déplacer jusqu’à Québec et ne pas avoir l’occasion de discuter directement des enjeux avec les décideurs et les décideuses », a dit Marie-Pierre Boisvert, directrice du Conseil québécois LGBT.

 

Inès Cherbib, du Centre communautaire Essalam, à Terrebonne, ne se retire pas du processus, mais boycottera néanmoins l’événement. « Je respecte les gens qui vont être présents au forum, mais nous, on ne veut pas être là pour voir des gens qui vont parler et s’écouter parler », a-t-elle dit.

 

Jérôme Di Giovanni, de l'Alliance des communautés culturelles pour l'égalité dans la santé et les services sociaux, déplore que le forum se tienne dix jours avant la remise des rapports des organismes partenaires, attendus le 15 décembre. Il aurait aussi aimé que qu'il ait lieu à Montréal, là où la plupart des organismes se trouvent.

 

«C'est un total manque de respect à notre égard», a-t-il déclaré.

 

Un forum de gens d’affaires

 

Plusieurs organismes dénoncent l’improvisation du forum. Le programme de la journée n’a été publié que lundi en après-midi et il n’a pas été possible de l’avoir avant, malgré des demandes répétées. Même les experts invités n’ont eu que des bribes d’information concernant le déroulement de la journée.

 

Le MIDI n’a pas non plus été capable de confirmer au Devoir le nombre de participants et de désistements, ni de fournir le nombre de mémoires déposés et de questionnaires remplis en ligne qui devaient alimenter le forum. La rumeur veut que le taux de participation en ligne ait été famélique.

 

Pour chacun des trois thèmes des plénières — emploi, lutte contre la discrimination, formation et francisation —, des conférenciers feront de courtes présentations suivies d’une période de questions de 10 minutes.

 

Parmi les 13 conférenciers, dont des représentants de chambres de commerce, des banques et des gens d’affaires, le Centre R.I.R.E. 2000 à Québec est l'un des rares organismes issus de la société civile, ce que déplore Haroun Bouazzi, co-porte-parole de l’Association des musulmans et des Arabes pour la laïcité (AMAL-Québec).

 

« Le gouvernement veut couper les ponts avec la société civile », croit-il. « Il est dans le monde des affaires et ne répond qu’au besoin du monde des affaires. »

 

Exit le racisme

 

Avec d’autres experts du milieu de l’immigration et représentants de groupes racisés, M. Bouazzi a fait partie d’un comité-conseil qui devait fournir des lignes directrices à l’ancienne ministre Kathleen Weil sur la manière de mener la consultation.

 

Ce comité a notamment recommandé que son mandat soit confié à la Commission des droits de la personne — ce qui fut d’abord fait, mais défait ensuite par le ministre Heurtel avant d’être finalement invité à titre d’observateur —, qu’elle contienne les mots « racisme et discrimination systémique » dans son titre et qu’elle fasse une place aux groupes autochtones.

 

« Ça n’a rien à voir, c’est des pommes avec des oranges. Si on compare le document de recommandations avec le forum actuel, on dirait qu’on est devant un gouvernement de la CAQ [Coalition avenir Québec] », a dit Émilie Nicolas.

 

Le comité-conseil dont elle a fait partie recommandait que la consultation débute « idéalement en 2017, afin de ne pas s’inscrire dans le calendrier électoral ». C’est raté, croit-elle.

 

« Je comprends que le forum va lancer des solutions concrètes, mais ce sont des choses “cannées” d’avance que le ministre aurait annoncées de toute manière. C’est une stratégie de relations publiques. »

 

L’ex-ministre Weil a annoncé la tenue de la consultation à la fin juillet et elle a été recadrée et relancée début novembre par le ministre Heurtel nouvellement en poste. Celui-ci a mené une tournée dans plusieurs régions du Québec pour comprendre in situ les problèmes d’intégration.


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