Une citoyenneté à deux vitesses

Les libéraux et Québec solidaire dénoncent le projet de Pauline Marois

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Petits calculs

Pauline Marois
Photo: Jacques Nadeau
Le projet du Parti québécois d'instaurer une citoyenneté québécoise basée sur la connaissance du français est décrié par les libéraux et Québec solidaire. On se montre toutefois plus ouvert à l'égard du projet de Constitution du Québec. Quant à l'opposition officielle, elle est restée muette: l'Action démocratique du Québec n'avait rien à dire au sujet des questions identitaires.
Québec -- Les libéraux et Québec solidaire sont tombés à bras raccourcis sur le Parti québécois hier. Ils dénoncent l'intention de Pauline Marois de créer une citoyenneté québécoise qui aurait pour effet, selon eux, d'établir deux classes de citoyens.
Dans le projet de loi 195 sur l'identité québécoise, la chef du PQ propose de créer une citoyenneté québécoise qui serait offerte à tous les citoyens canadiens domiciliés au Québec, sauf aux nouveaux arrivants qui ne parleraient pas le français. Ceux-ci seraient privés du droit de se présenter aux élections scolaires, municipales et législatives au Québec. Ils ne pourraient ni financer les partis politiques ni soumettre des pétitions à l'Assemblée nationale.
«Le gros défaut [de cette citoyenneté], c'est que ça constitue deux classes de citoyens avec deux types de droits différents. C'est un vice fondamental», a affirmé le ministre responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes, Benoît Pelletier, au cours d'un entretien téléphonique.
De passage dans la communauté huronne de Wendake, le ministre de la Santé et des Services sociaux, Philippe Couillard, s'est fait virulent. Le projet péquiste rappelle la déclaration de Jacques Parizeau le soir du référendum de 1995 sur «le vote ethnique», a-t-il dit. Le ministre y voit une manifestation de «fermeture» de la part du PQ.
Françoise David, la co-tête d'affiche de Québec solidaire, s'est dite «choquée» par cette citoyenneté québécoise à laquelle les immigrants qui ne parlent pas français ne pourraient pas accéder. «On est en train de déraper sérieusement», estime-t-elle.
Mme David a rappelé que 46 % des immigrants qui débarquent au Québec ne parlent pas français. Il est selon elle «inadmissible» de retirer des droits démocratiques à certains citoyens qui ne maîtrisent pas suffisamment le français. Ce projet de loi, qui préconise «une approche répressive», est «la caricature d'un nationalisme fermé et frileux qu'on croyait disparu depuis l'ère Duplessis», s'est indignée Mme David, disant croire que Pauline Marois «chasse sur les terres de Mario Dumont».
«En quoi l'identité québécoise est-elle menacée par des immigrants qui ne demanderaient pas mieux que de connaître le français?», s'est-elle demandé. Mme David voit par ailleurs d'un bon oeil l'intention inscrite au projet de loi d'entreprendre la francisation des PME comptant de 25 à 50 employés. Elle croit que la francisation des immigrants passe par des mesures concrètes.
Valable, la Constitution
Benoît Pelletier juge que le projet de doter le Québec d'une constitution est «valable» et sera examiné par le gouvernement. «On sent que les Québécois sont encore en quête de leur identité», estime-t-il. «Tout le monde convient que, quelle que soit la forme que ça puisse prendre, c'est important de faire le point sur nos valeurs communes au Québec.»
La démarche du PQ en matière constitutionnelle est toutefois «suspecte» aux yeux des fédéralistes, a signalé M. Pelletier, car les péquistes «l'interprètent comme étant une première étape vers l'acquisition par le Québec de sa souveraineté».
L'opposition officielle n'avait rien à dire hier à propos du projet de loi déposé par le PQ. Or l'adoption d'une constitution du Québec est un des principaux éléments du programme de l'ADQ.
Contrat d'intégration
Benoît Pelletier ne rejette pas d'emblée l'idée d'un «contrat moral» aux immigrants, une mesure qu'avait préconisée au début des années 90 Monique Gagnon-Tremblay, alors ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration. Dans le projet de loi péquiste, il s'agit d'un «contrat d'intégration» d'une durée de trois ans qui comprend l'obligation pour le nouvel arrivant d'apprendre le français. «L'immigrant a le devoir de chercher à s'intégrer et, en même temps, l'État québécois a lui-même un devoir, qui est de favoriser son intégration», a fait valoir M. Pelletier.
Rappelons qu'en 2001, le gouvernement péquiste s'était penché sur la possibilité de créer une citoyenneté québécoise, comme l'avait recommandé la commission Larose sur l'avenir du français. Alors ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, Joseph Facal, que Mme Marois consulte aujourd'hui, jugeait que cette citoyenneté québécoise au sein du Canada serait «un gadget symbolique» qui diviserait les Québécois, un moyen de «s'égarer dans les chemins de traverse», alors qu'une citoyenneté significative est indissociable de la souveraineté.
Le Devoir
Avec la Presse canadienne


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