Un PQ en crise ou un Québec en crise

la problématique du référendum

Tribune libre

La problématique du référendum.
Toute la question de l’opportunité de tenir un référendum, avant de mettre en marche le processus d’indépendance du Québec, crée en elle-même, une dynamique politique spécifique et a créé, depuis que le PQ a décidé de tenir cette consultation, un climat, politique, social et économique empoisonné qui ne cesse de s’aggraver.
Pour de nombreux citoyens, ce n’est plus l’indépendance qui est le problème, c’est le référendum.
En fait, la problématique du référendum soulève deux axes de réflexion qui selon mon souvenir, n’ont plus été abordés par les souverainistes depuis bien des lunes.
D’un côté, il est essentiel de préciser, pédagogiquement, ce qu’est un référendum et ensuite le pourquoi de cette démarche et conséquemment, sa pertinence.
Qu'est-ce qu’un référendum
Un référendum est la forme la plus démocratique de consultation. Dit autrement, c’est essentiellement un sondage légal et encadré auprès d’une population déterminée. Chaque citoyen doit s’exprimer sur le sujet mis de l’avant. Une autorité légale, état, municipalité vont demander à chaque citoyen de se prononcer sur une question d’intérêt général, le peuple répondra par un oui ou par un non. À la marge, chaque citoyen peut toujours annuler son vote.
L’autorité ayant posé la question a, alors, la légitimité pour mettre en marche le processus qui permettra la mise en application de l’objectif souhaité si, bien sûr, la population a exprimé son accord.
Historiquement, la population du Québec est peu familière avec cet outil aussi, nos vainqueurs et les fédéralistes du Québec s’en sont-ils donné à cœur joie pour attaquer, dénaturer le sens cette option fondamentalement démocratique.
Il est tellement plus facile d’agir ainsi et surtout, bien plus facile que de s’attaquer au droit à l’autodétermination d’un peuple.
L’objectif de notre référendum, l’indépendance du Québec, a pratiquement été annihilé devant la nécessité ou la pertinence de celui-ci.
Quand faut-il le faire ? Dans la première année du mandat ou dans un second mandat ?
Le Parti Québécois ne cache-t-il pas ses vraies intentions?
Tel chef le fera que s’il est certain de le gagner !!! Tel autre va le mettre en veilleuse, etc., etc.
Dans la mesure où ceux-ci demeurent honnêtes, reconnaissons que c’est de «bonne guerre» de la part des fédéralistes de dénigrer les «séparatisses», mais nous savons tous que cela n’a jamais été le cas, tout particulièrement pour le dernier référendum, avec leurs, «nous vous aimons» oui et avec quel argent ? Puis avec ce que nous savons des commandites et autres prises de citoyenneté accélérées pour «faire des émigrants» tout neufs.
Non, je ne peux oublier!
Toutefois, ce qui m’étonne, c’est que personne, dans le camp des indépendantistes, n’ait tenté de rétablir la vérité sur les fondements de cette démarche.
En effet, comment se fait-il que si peu de personnes n'ait soulevé cette perversion du sens même du référendum et remis en place le rôle fondamental de cette action?
Un référendum c’est une consultation.
Chez nous, au Québec, c’est le référendum qui devenu un objectif et non plus l’indépendance du Québec. Ne trouvez-vous pas cela ridicule ?
Pertinence d’un référendum sur l’indépendance du Québec
En 2011, ma seconde interrogation porte, plus que jamais, sur la pertinence de faire un référendum pour connaitre la volonté des Québécois.
Veulent-ils oui ou non construire un nouveau pays? Un pays libre, en dehors des balises et des contraintes imposées par le vainqueur de la bataille des plaines d’Abraham, un vrai pays, comme tous les pays dans ce monde.
Nombreuses sont les questions que soulève cette démarche très démocratique, mais qui, appliqué au contexte québécois, présente depuis le début un biais pratiquement insurmontable et, ce ne sont pas les résultats de la consultation de 1995 qui va changer ma perception sur la pertinence de cet exercice.
Oui, je le réécris, les fédéralistes nous ont volé notre indépendance et nous nous sommes inclinés docilement, sans chicane.
Sans chicane
Mais revenons sur la pertinence de refaire une autre consultation dans le futur.
Tout d’abord, rappelons-le, comme peuple vaincu, nous aurons toujours des citoyens qui seront rebelles au vainqueur.
D’autres citoyens qui accepteront de collaborer.
Enfin, il y a ces citoyens, qui selon la nature des arguments mis en évidence par les fédéralistes tout au long de la campagne référendaire et suite à l’évaluation subjective, inhérente à leurs peurs, qu’ils feront, ils choisiront tantôt l’indépendance, tantôt le lien fédéral.
Or, compte tenu du contexte québécois et de notre inconscient collectif, ce sont ces citoyens aux convictions très volatiles qui feront encore toute la différence.
Mais si nous étions effectivement un peuple ayant été réellement colonisé et non pas vaincu et vivant sur sa vraie terre «ancestrale», je pense que devant le choix d’un pays, c’est, avant tout, l’expression d’une fierté qui s’exprimerait ainsi que l’on fait tous ces peuples qui, depuis la fin de la guerre 39-45, ont affirmé leur volonté de liberté, souvent par les armes.
Mais ici, nous sommes d’ex-colonisateurs, vaincus par les armes, abandonnés, par nos leaders politiques de l’époque, notamment «le bon roi de France», puis, réprimés, diminués, dénigrés, encadrés par les autres colonisateurs, mais ils ce sont eux les vainqueurs. Puis assujettis au repli sur soi par notre clergé, en attente d’une paix éternelle dans un au-delà incertain, nous préférons-nous dévorés entre nous.
Et c’est toujours notre lot du jour
Que certains optent, en toute objectivité, pour un modèle fédéraliste, je le conçois. L’Allemagne, la Suisse, les États-Unis sont des fédérations et cela fonctionne fort bien, notamment parce que les relations entre les composantes sont basées sur un rapport égalitaire.
Mais la fédération Canadienne, qui, dès sa première mouture, n’a fait pas l’objet de consultation populaire, c’est une constitution imposée par Londres :
« Le 6 décembre 1866, les négociations entre les trois colonies
reprennent à Londres, sous le patronage des autorités britanniques et aboutissent, le 24 décembre, à l’adoption de nouvelles résolutions, qui reprennent celles de Québec avec quelques modifications importantes et un grand nombre de changements mineurs. Les soixante-neuf Résolutions de Londres, sur lesquelles, ni le peuple, ni la législature ne sont invités à se prononcer dans aucune des trois colonies, sont ensuite présentées au gouvernement impérial et transposées dans un projet de loi que les deux chambres du Parlement britannique adoptent sans que cela suscite beaucoup d’intérêt.
Le British North América Act, 1867 reçoit la sanction royale le 29 mars 1867 et entre en vigueur le 1 juillet suivant : le Dominion du Canada était né».
Réf : Les constitutions du Canada et du Québec de régime français à nos jours.


Jacques-Yvan Morin et José Woehrling. Les Éditions Thémis 1994. Page 153
Le rapatriement unilatéral
Voilà pour la construction du «plus meilleur pays au monde» et encore bravo pour la démocratie.
On aurait pu espérer que lors du rapatriement de cette constitution par P.E. Trudeau, on aurait amélioré le rapport de force. Mais vous connaissez la suite…
Regardons ce qu’écrivait le prestigieux journal Le Monde, cité dans Perspective Monde. (Site de l’Université de Sherbrooke)
«...La « question canadienne », qui est aussi vieille que la Confédération, n'est pas réglée pour autant. Québécois anglophile, le premier ministre fédéral a joué au chat et à la souris avec les indépendantistes de sa province natale. Profitant de leur échec au référendum du 20 mai 1980, il leur a infligé un grave revers. Mais, dans son désir de mieux sceller le destin de la nation, il a inscrit dans le texte même de la Loi fondamentale des dispositions qui font du Québec une province comme les autres; ce qui ne correspond pas à la réalité. Il suffit de parcourir le Canada pour comprendre que les « deux peuples fondateurs », selon l'expression traditionnelle, restent fort différents, même s'ils ont depuis deux siècles appris à vivre ensemble, à mieux se comprendre et même à apprécier leurs qualités réciproques. On ne peut mettre le Québec sur le même plan que l'île du Prince Édouard, à moins de préférer la fiction à la réalité. Il faut espérer que le pragmatisme qui a toujours caractérisé la vie politique canadienne permettra d'atténuer les conséquences de cette sorte de péché originel qui a frappé la nouvelle Constitution. »
Le Monde (France), 18 et 19 avril 1982, p. 1.

Quel commentaire peut-on faire sur cette action empreinte d’humiliation envers les Québécois ?
Rien, aucun, car cette action identifie très bien la psychologie politique d’Elliott Trudeau, mépris, mépris et mépris.
En fait ce n’a été qu’un autre coup de force, en conformité avec l’attitude du dominateur britannique, victorieux qui vise essentiellement à nous rappeler, si nous l’avions oublié, que c’est le maître qui décide, c’est et ce sera toujours lui, même si maintenant, c’est à Ottawa que ça se passe !
Pourquoi un référendum ?
Toujours au regard de la pertinence, tentons de comprendre pourquoi le PQ s’est engagé à demander, par référendum, aux Québécois s’ils veulent construire un pays en dehors des liens fédéraux.
Il nous faut retourner à la naissance de ce parti.
Dans le premier programme (la Solution, page 99, aux éditions du jour inc. 1970) vous chercherez en vain les traces de référendum sur la souveraineté. Tout au plus peut-on lire :

« Le Québec négociera les modalités d’application de sa souveraineté acquise, soit avec l’État fédéral (si les autres états provinciaux lui permettent de négocier en leur nom), soit avec les représentants des autres États provinciaux, ce qui suppose la désignation de l’interlocuteur anglophone et un rapport d’égalité à établir entre les deux parties en présence».

Dès la prise du pouvoir, le PQ d’alors s’engageait donc à mettre en marche le processus d’accession à l’indépendance du Québec et il négocierait les modalités de sa souveraineté acquise par un vote majoritaire.
Mais pour faire l’indépendance, il faut être au pouvoir et dans l’état des évènements de l’époque, avec toutes les pressions négatives des élites économiques et anglophones (genre PQ = FLQ) il était pratiquement impossible, pour le PQ, d’accédé au pouvoir.
Rappelons que lors des élections de 1970, le Parti québécois ne récoltait que 23,06 % des suffrages exprimés et élisait 7 députés. (Notons qu’en 1966 le RIN et le RN n’avaient reçu ensemble que 8,76 % des votes) et que 3 ans plus tard, le PQ récoltait 30,22 % des votes (mais compte tenu de notre système électoral à un tour, il élisait seulement 6 députés.)
Or, comme les décideurs du Parti, René Lévesque en tête, connaissent bien leurs concitoyens, ils connaissent leurs craintes face à l’option, ils connaissent aussi et surtout leur insécurité congénitale.
La solution à ce problème sera de proposer aux Québécois, lors de la campagne électorale en 1976, un garde-fou, un référendum, qui leur demandera la permission, non pas de faire l’indépendance tout de suite, non, juste de négocier un processus…
La stratégie apaisante a fonctionné. Puisqu’en 1976 les souverainistes formeront le gouvernement avec 41,37 % des suffrages.
(À suivre; pouvons-nous encore gagner un référendum? Tristement, je vous dis : NON .Et, je vais tenter de vous expliquer pourquoi)
***
Jean-Pierre Pfisterer
Un néo, souverainement, québécois
Retraité, membre démissionnaire de l’exécutif PQ de Vanier.

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Jean-Pierre Pfisterer32 articles

  • 23 201

Un néo-québécois, souverainement québécois

Retraité, membre démissionnaire de l’exécutif de Vanier.





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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    28 novembre 2011

    Je fais partie de la masse populaire canadienne-Française, observatrice malgré ses apparences de nation colonisée et soumise mais qui, dans les faits et de façon incontestable, est emprisonnée de force.
    Pour le simple citoyen que je suis, sans connaissances approfondies des rouages concrets innérants à la politique et au fonctionnements internes des divers Partis politiques d'ici, votre texte me semble très instructif et sans fausses notes. J'attends la suite.
    Ceci dit, j'ajouterais ce que Monsieur Pierre Bourgault reprochait à un référendum portant soit sur la pertinence de l'indépendance du Québec, même si vous en parlez de juste façon, soit sur la création du Pays du Québec.
    Deux choses (principalement le 2e point):
    1- La précision de la question référendaire, qui doit être quelque chose d'aussi simple que «Voulez-vous que le Québec soit déclaré un Pays indépendant et souverain, oui ou non ?». Une question simple et courte.
    2- Le reproche de Monsieur Bourgault: Un référendum sur l'indépendance du Québec c'est donner une seconde chance à l'ennemi de battre le Parti qui propose à l'électorat québécois de faire du Québec un Pays. Cela revient donc, de cette façon (avec un référendum ciblé), à empêcher la naissance du Pays du Québec.
    Parce que concrètement et historiquement, nous savons très bien comment agironts les tenants du soi-disant fédéralisme canadien ainsi que les financiers et exploiteurs étrangers au Québec. Ceux-ci n'ont aucun intérêt à suivre et à embarquer dans l'évolution de la nation canadienne-Française et dans sa libération, puisqu'ils en sont les geoliers et les exploiteurs.
    Et en 2011 c'est aussi vrai que par le passé, d'autant plus qu'à présent on veut éliminer les indépendantistes de la scène politique, en même temps que les aspirations de ma nation canadienne-Française en les biaisant.
    Mais je vais suivre vos articles.
    [Réjean Pelletier, simple citoyen]

  • Archives de Vigile Répondre

    28 novembre 2011

    Monsieur Pfisterer
    Vous conviendrez avec moi, qu'en 1982, il y a eu un bris de contrat lorsque Trudeau a rapatrié unilatéralement la constitution "CANADIAN" sans l'accord du Québec. Nous fûmes évincés, sortis de ce pays sans même la tenue d'un référendum sur cette question nationale. Pas besoin d'être un constitutionnaliste chevronné pour comprendre que le gouvernement du Québec, face à cette rebuffade des autorités fédérales, n'avait qu'à faire appel au peuple par une élection, déclarer unilatéralement son indépendance, écrire sa propre constitution, la soumettre au peuple québécois pour ratification ultérieure et demander d'être reconnu dans son nouveau statut de pays au niveau international. Le reste n'est que de la boulechite pour endormir le peuple. J'attends toujours mon constitutionnaliste sur Vigile pour qu'il vienne me prouver le contraire.
    André Gignac 28/11/11

  • Archives de Vigile Répondre

    28 novembre 2011

    Il faudrait faire une distinction entre un référendum "classique" tels ceux qui ont eu lieu en 1980 et 1995 qui ont porté sur le statut du Québec à l'intérieur du Canada (souveraineté-association et souveraineté-partenariat) et un référendum qui porterait sur une constitution du Québec qui aurait été rédigée auparavant avec la participation des citoyens du Québec, comme on l'a fait récemment en Islande.
    La période de consultation serait beaucoup plus longue qu'une simple campagne référendaire de 30-40 jours et la participation des citoyens aurait raisonnablement des chances d'être beaucoup plus élèvée de même que leur niveau de compréhension des enjeux.
    Il serait plus facile également d'introduire dans cette constitution des clauses concrètes et emballantes qui protégeraient les citoyens dans leur vie quotidienne et qui deviendraient alors plus intéressantes qu'une simple description abstraite de la souveraineté de l'État.
    Avant de conclure qu'un troisième référendum serait automatiquement perdu, je tiendrais compte de ces remarques.
    Pour préparer le terrain de la constituante, je propose un projet de loi transitoire sur la nation québécoise qui servirait dans une phase transitoire à consolider l'État actuel, à offrir immédiatement aux citoyens des droits concrets et emballants et à illustrer le pays à venir.
    On serait ainsi en campagne référendaire avant, pendant et après les élections.
    Qu'en pensez-vous monsieur Pfisterer?
    Pierre Cloutier

  • Archives de Vigile Répondre

    28 novembre 2011

    «Enfin, il y a ces citoyens, qui selon la nature des arguments mis en évidence par les fédéralistes tout au long de la campagne référendaire et suite à l’évaluation subjective, inhérente à leurs peurs, qu’ils feront, ils choisiront tantôt l’indépendance, tantôt le lien fédéral.
    Or, compte tenu du contexte québécois et de notre inconscient collectif, ce sont ces citoyens aux convictions très volatiles qui feront encore toute la différence»
    Bien dit. Or le PQ-à-marde, depuis 40 ans, n'a mis aucun effort pour convaincre ces gens. Les péquistes (et bloquistes) se sont assis sur le vote souverainiste (40%) et ont fait des carrières complètes sans travailler le 10% qui manquait pour la Terre promise.
    Si vous lisez ma série sur la Guerilla à Ottawa, je concentre tout le focus sur la manière d'aller chercher ces gens qu'il nous faut absolument aller chercher.