Être Québécois c'est accepter de vivre dangereusement (Marcel Rioux)

Pour un Parti québécois nouveau.

Tribune libre

Un PQ nouveau ?
Je ne ferais pas ici l'analyse des errances historiques qui ont accompagné le Parti québécois. Non, pour moi, je l'ai souvent écrit, ce Parti a toujours représenté l'espoir de lendemains dignes par lequel un peuple debout construira un futur à son image.
Sa sociale démocratie, ses options politiques tranquilles me convenaient.
Ayant, dans une vie antérieure, intimement vécu l'effondrement turbulent de la puissance coloniale de mon pays de naissance, j'ai toujours douté que le Québec puisse, un jour, accéder sereinement à son indépendance.
Je suis de ceux qui pensent que la liberté ne se quête pas.
Elle se prend.
C'est d'autant plus vrai si l'on est tant soit peu de gauche, ce qu'était sans conteste le PQ à sa naissance !
J’ai souvenir de longs échanges sur le sujet avec mon ancien patron, Pierre Marois. Il me démontrait qu'une indépendance tranquille était réalisable. Ses arguments reposaient, entre autres, sur la prise de pouvoir pas Allende. « Tu vois bien que c'est possible me disait-il ». C'était avant Pinochet et les États-Unis.
J'ai donc voulu y croire. D'ailleurs, avions-nous d'autres choix ?
Mais aujourd'hui, quelque 45 ans plus tard, dans la suite de l'historique de ce 7 avril 2014. Où en sommes-nous ?
Les gérants d'estrade, dont je suis, s'affairent. Alors, ne nous privons pas.
Voici ma modeste participation.
J'ai l'étrange sentiment que le Québec vient de perdre une grosse partie de poker. Se pourrait-il que les fédéralistes viennent de ramasser la mise ?
Cette partie à commencée un certain 14 octobre 1968, rappelez-vous René Lévesque : « … il suffit de regarder en nous même avec soin et décider si nous pouvons gagner un simple pari. Pari normal que tant de peuples ont fait avant nous …»
http://archives.radio-canada.ca/politique/partis_chefs_politiques/clips/6138/
Pari perdu !
Dans l'âme des 40 % de patriotes québécois, l'espoir et la passion du pays vont survivre. Nous allons devoir faire preuve d'un profond réalisme comme rarement nous avons eu à le faire dans notre histoire récente, mais, surtout le déni est formellement interdit !
Car, les outils que nous privilégions ainsi que notre chemin ont été anéantis.
Nos outils, c'était deux Partis politiques.
Le Bloc québécois sensé défendre nos intérêts dans le cadre confédératif d'Ottawa cela, jusqu'à un OUI référendaire.
Mais surtout, c'est ici, à Québec, avec le Parti Québécois, cet instrument magique sur lequel ont reposé tous nos espoirs.
Or, tous les citoyens engagés dans cette démarche hautement démocratique depuis René Lévesque, en passant par Gilles Duceppe et, jusqu'à Pauline Marois ont péché par honnêteté.
La magouille n'a jamais été inscrite dans la liste des valeurs du PQ.
Notre chemin, il a été celui du respect. Respect du cadre démocratique et des règles que nous a si bien imposé cette chère Albion.
Pas besoin de détailler, vous les connaissez, Constitution et tutti quanti.
Aujourd'hui, c'est pari perdu monsieur Levesque.
Les citoyens du Québec sont devenus une mosaïque politique éclatée. Ils se retrouvent dans la situation souhaitée par ce très cher Lord Durham. (...) «Je ne doute guère que les Français, une fois placés en minorité, par la suite du cours naturel et légitime des événements et par le fonctionnement de causes naturelles, abandonneraient leurs vaines espérances de nationalité. (…) la perte irrémédiable de tout espoir de succès atténuerait peu à peu les haines actuelles et porterait graduellement les Canadiens français à accepter leur nouveau statut politique ».
Le rapport Durham l'HEXAGONE. Poche Typo n° 50 p 251.
Vous connaissez la légende le nœud gordien elle date de 333 av. J.-C.. Ce nœud attachait le joug au timon de la charrette de laboureur du roi Gordias, celui qui parviendrait à le défaire posséderait l’empire d’Asie. Alexandre trancha le nœud d'un seul coup d'épée. Il fut cet homme, il fonda et pu ainsi posséder son empire d'Orient.
Trancher le nœud gordien c'est résoudre un problème insoluble.
Il y eut, dans ce geste inattendu, toute l'innovation pertinente et nécessaire au développement créatif du nouvel empire.
Nous en sommes là !
Saurons-nous faire place à la créativité pour le développement de notre pays ?
Le Parti Québécois doit devenir l'épée par lequel sera tranché le lien constitutionnel canadien.
En ma qualité de gérant d'estrade, voici ce que je pense qu'il nous faut faire, sans complexe.
Nous avons quatre années devant nous pour nous préparer à reprendre le pouvoir puis quatre autres années pour structurer notre indépendance.
Il nous faut donc concevoir une double approche.
Une première, dès maintenant.
Le Parti québécois doit rompre avec son approche traditionnelle. Il doit agir comme un parti d'opposition traditionnel devant le gouvernement libéral actuel, mais surtout cesser son approche "souverainiste" pour mettre de l'avant une vision "indépendantiste".
C'est-à-dire, changer sa culture.
En d'autres mots cesser d'être "réactif" pour être "créatif".
Notre chef, monsieur Stéphane Bédard, devrait assumer l'intérim jusqu'à l'automne 1017 soit, approximativement un an avant la prochaine élection.
La seconde approche est aussi totalement novatrice et sa durée de vie est limitée jusqu'à la future élection provinciale de 2018.
L'objectif de cette seconde phase est de préparer la plate-forme de cette élection.
Pour coordonner ces deux approches, le Parti devrait se doter d'un Comité directeur composé ; du chef intérimaire, du président du PQ, et des responsables des chantiers visant à élaborer les futures politiques.
Un premier chantier centré sur la dimension francophone du Québec
Volet 1
Élaboration d'une stratégie de soutien internationale du Québec pour sa reconnaissance comme état souverain lors de sa déclaration d'indépendance.
Volet 2
Élaboration d'un projet politique en matière de relations internationales privilégiant une collaboration des pays membres de la francophonie mondiale.
Volet 3
Élaboration d'une politique globale de développement culturel du Québec francophone.
Un second chantier centré sur la dimension économique du Québec
Volet 1
Élaboration d'une politique de développement économique global du Québec.
Cette politique devrait cibler en priorité le développement de projets de mise en valeur des ressources naturelles, tels les produits de la forêt , nos richesses énergétiques, la transformation au Québec des matières premières.
Ce plan devrait inclure l'ensemble des productions agroalimentaires du Québec.
Cette politique devrait prévoir un projet de promotion internationale des produits fabriqués au Québec.
Volet 2
Le développement harmonieux du Québec doit tenir compte du potentiel des régions et de leur spécificité. Celles-ci qui devraient être évaluées sous tous les angles, le tourisme, leur gastronomie, leur histoire, les loisirs, la chasse et la pêche, leurs richesses naturelles, etc.
Un plan de mise en valeur de ces ressources devrait être proposé aux Québécois.
Volet 3
L'indépendance entrainera le Québec dans négociations politiques avec Ottawa et les autres provinces en ce qui regarde le partage des responsabilités financières entre les protagonistes.
Suite aux études menées par le groupe de gestion du processus d'accession à l'indépendance, il conviendrait de prévoir les politiques économiques visant à permettre au gouvernement du Québec d'administrer sainement la période transition.
Il conviendrait notamment d'évaluer de la pertinence de mettre en place une politique avantageuse du rachat de la dette par la population et les multiples instances financières québécoises.
Volet 4
La mise en place des outils de soutien au développement des entreprises en économie sociale devrait être étudiée en profondeur. Le fondement de cette approche étant l'appropriation et l'implication des travailleurs dans l'entreprise, il conviendrait d'évaluer la pertinence d'adapter en conséquence, l'ensemble des lois régissant le monde du travail.
Un troisième chantier centré sur notre modèle éducationnel
Volet 1
Ciblerait la restructuration du système éducatif du Québec. Inspirer de la Commission Parent, ce projet engloberait l'ensemble de notre modèle éducatif, de la petite enfance à l'université en y incluant l'éducation continue. Une attention particulière devrait être apportée sur les formations professionnelles, techniques et universitaires qui répondent aux besoins des entreprises. L'alternance études/travail devrait être évaluée de très près.
Volet 2
Ce volet se veut une dimension novatrice du regard que devrait apporter une société à ses citoyens dans le domaine de leur santé.
Il conviendrait d'évaluer la pertinence de mettre en place une politique globale de prévention de la santé de la naissance à la fin de la vie.
Cette politique de prévention de la santé devrait être hors du champ des compétences des professionnels de la santé. Et devrait faire l'objet d'un nouveau champ éducatif.
Elle toucherait autant la pratique de l'exercice physique que la saine alimentation ou la recherche dans le domaine de la qualité de l'environnement pour les citoyens.
Un regard attentif devrait être porté sur les infrastructures pertinentes à développer.
Pourrait-on envisager la création d'un ministère de la qualité de vie ?
Un quatrième chantier centré sur un Québec culturellement écologique
Volet 1
La planète est en effervescence. Nous allons vivre très rapidement des changements climatiques majeurs. Cette transformation va entrainer de nombreuses modifications dans vraisemblablement tous les domaines de la vie sur terre.
Le Parti québécois a devant lui une opportunité incroyable de devenir un leader mondial dans la mise en place de modèle visant adaptation à ces changements.
Le Parti devrait évaluer la pertinence d'inclure dans son futur programme de gouvernement l'élaboration d'une politique écologique responsable.
++++++
Je pense, suffisantes mes propositions de gérant d'estrade. Toutefois, évidemment, rien n'exclut que d'autres chantiers puissent compléter ma liste d'épicerie.
La mise en marche des chantiers devrait pouvoir démarrer vers le début de l'automne 2014.
Il convient de voir comment les règlements du PQ permettent la mise en place du comité de direction et les nominations des députés, responsables des chantiers.
Je pense que pour mener à terme les travaux de recherches de toutes les études il serait possible de faire appel à des indépendantistes membres ou non du PQ issu du bassin des baby-boomers retraités.
Ces projets seraient présentés, au fur et à mesure de l'avancement des travaux, à la population du Québec (éducation oblige) et finalement aux membres du PQ pour acceptation.
Ces projets seraient la base de la plate forme électorale du PQ et le nouveau leader du Parti Québécois en serait le porteur.
Utopie ?
Peut-être mais que serait le monde sans ces utopistes farfelus qui ont sillonné le temps ?
À suivre…
Rappel : (Réf. Mon dernier texte). Le PQ n'assume aucune responsabilité quant à la gestion du processus d'accession du Québec à l'indépendance.
Un superbe bouquin que chacun de nous devrait lire. Il traite notamment de la mise en place d'une pédagogie indépendantiste par opposition à une pédagogie souverainiste. (Réf. Roger et Jean-François Payette. Ce peuple qui ne fut jamais souverain. Fides 2013 p.119 et suivantes)

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Jean-Pierre Pfisterer32 articles

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Un néo-québécois, souverainement québécois

Retraité, membre démissionnaire de l’exécutif de Vanier.





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3 commentaires

  • Marcel Haché Répondre

    3 mai 2014

    La société totalitaire dans laquelle nous vivons ne permet pas aux utopistes qu’ils puissent avoir de l’influence. Par ailleurs, l’Indépendance n’est pas une utopie. Si « nous avons déjà le pays », s’il nous en manque seulement le contrôle, il n’est pas nécessaire de faire miroiter ce qu’il aura l’air le pays. Les électeurs ne sont pas des enfants à faire rêver. Ils sentent déjà qu’ils ont un certain contrôle sur les évènements puisqu’ils peuvent décider par un simple vote qu’il n’y en aura pas de référendum.
    Les québécois se méfient des Rêves. Mais ils ne se méfient pas d’eux-mêmes. Ce sont les politiciens qui se méfient des québécois et qui engendrent, gracieuseté de nos sales qui mènent les médias, toute une atmosphère empreinte de cynisme, profitable à seulement quelques uns. La parade des indépendantistes à pareille situation n’est pas si compliquée, mais exigerait tout un effort leur part.
    Avant d’avoir l’air et l’apparence de quoi que ce soit, le Pays, ce serait peut-être utile de lui faire valoir au fameux « peuple du Québec », que le futur Pays sera à lui et lui seul, et qu’il décidera bien lui-même d’en faire ce qu’il voudra bien. Les enfants sont tout à leur plaisir d’avoir des jouets. Les adultes le sont à la propriété d'en avoir… Non mais…

  • François Ricard Répondre

    2 mai 2014

    Un processus beaucoup trop complexe pour le commun des membres militants.
    Sur le terrain, les gens nous demandent de quoi il aura l'air ce pays que nous voulons nous donner: un système comme celui que nous avons avec la reine; une république avec un président; un chef avec des aides.
    Ils nous demandent aussi quelle sont nos forces:
    La voie maritime, elle est chez nous. On devra nous payer, nous, pour son utilisation plutôt que de payer le fédéral.
    Si l'on veut transiter du pétrole dans un oléoduc, on devra nous payer pour chaque litre qui passe.
    Nos ressources naturelles nous les exploiterons de concert avec des entreprises pour bien nous assurer de recevoir notre juste part de revenu.
    Nous ne croyons pas à la guerre et nos soldats n'iront pas faire de tourisme militaire.
    Comme tout pays qui veut contrôler son économie, nous aurons notre dollar à nous.
    Voilà ce que les gens veulent s'entendre dire. Quand on leur présente l'indépendance sous cette forme, ils comprennent beaucoup mieux. Mais immédiatement,on nous dit:Pourquoi le PQ, pourquoi QS présentent-ils le tout de façon compliquée? Pourquoi un référendum, puis peut-être un deuxième? S'ils ont le pouvoir pourquoi n'agissent-ils pas?

  • Archives de Vigile Répondre

    2 mai 2014

    Vous écrivez que les fédéralistes ont ramassé la mise.
    Je le crois aussi. Les défaites du Bloc et du PQ (et Harel-Côté à Montréal) ont des causes structurelles importantes qui doivent être analysées. Et les résultats de l'Analyse ne seront pas drôle.
    Pierre Marois disait que c'était possible. C'est vrai, mais ça été raté.
    Dans un tel cas, il me semble que l'on doit recommencer à neuf et non pas développer des chantiers à l'intérieur du PQ. Si on recommence avec le PQ avec le type de chantiers que vous proposez, il me semble que l'on va se retrouver au même point dans cinq ou dix ans. IL faut reconnaître, même si c'est douloureux, que Lévesque et Marois avaient tort. Nous ne sommes toujours pas indépendants et nous avons indéniablement reculé depuis quelques années.
    Si on recommence, comme certains de Vigile l'Ont mentionné, à retourner au PQ pour en faire un néo-PQ, même avec PKP, on se retrouvera avec les mêmes résultats. À mon sens, il faut donc oublier la construction d'un seul parti pour faire l'indépendance. Il faut prendre acte:
    -que nous représentons toujours une force considérable politiquement parlant
    -que le PQ actuel (ou futur) ne réussira pas à réaliser le pays
    -que nous vivons dans un monde beaucoup plus pluraliste que celui de 1968 (Option-Québec de Lévesque)
    -que ce sera long, très long avant de réussir avec beaucoup de souffrances et de grincements de dents pour les militants et militantes
    -nous sommes dans un monde qui a perdu confiance (foi?) en ses dirigeants(sinon en l'avenir) et pour qui un gouvernement n'est jamais assez bon, les mesures ne font plus l'unanimité (et donc, out la théorie du bon gouvernement, à laquelle j'ai cru, personnellement)
    et
    comme écrivait M. Danic Parenteau dans le Devoir:"...il faut reconnaître que l'idée de souveraineté... défendue par le Parti québécois ne présente plus la même force qu'auparavant...le vaisseau amiral de la souveraineté doit aujourd'hui s'engager dans une réflexion de fond."
    Je crois que cette réflexion doit toucher les articles fondamentaux:
    -la souveraineté...et...
    -la sociale-démocratie liées
    -et surtout, la disparition du PQ lui-même
    J. Binette
    Montréal