Finis les groupuscules et les recoins de l'internet : l'extrême droite québécoise tente de se donner du poids et une crédibilité en passant des coulisses au centre de la scène. Des militants québécois de l'«alt-right» comptent créer un parti politique à temps pour les prochaines élections, tandis que le plus actif des groupes d'extrême droite de Québec se donnerait pignon sur rue en ouvrant un «club de boxe identitaire».
«Une chose est certaine, aux prochaines élections, on va être présents! C'est sûr que je vise d'avoir 125 candidats», a affirmé Sébastien Poirier en entrevue. Cet ex-dirigeant de l'organisation xénophobe PEGIDA Québec a officiellement réservé le nom de parti Mouvement traditionaliste du Québec, le 9 août dernier, auprès du Directeur général des élections du Québec (DGEQ).
L'étudiant de 21 ans assure qu'il déposera sa demande formelle pour former un parti politique provincial dès la semaine prochaine. Il ne lui manquerait qu'une poignée de signatures. Les futurs membres du parti proviennent principalement d'organisations de la droite «alternative», et non de PEGIDA Québec, selon Sébastien Poirier. Parmi les 19 partis provinciaux autorisés par le DGEQ, aucun n'adhère aux idées d'extrême droite.
Sébastien Poirier martèle ainsi que son organisation politique n'a aucun lien avec PEGIDA Québec, section québécoise d'un mouvement allemand islamophobe et anti-immigration qu'il juge «plus extrémiste» qu'eux. Or, le président de PEGIDA Québec, Stéphane Asselin, parlait toujours hier de Sébastien Poirier comme de son «bras droit» en entrevue. «En fait, je l'aide, mais je ne suis plus administrateur. Je ne participe plus avec PEGIDA», s'est défendu le futur chef du Mouvement traditionaliste du Québec.
Ce parti de la «droite alternative», inspiré du Front national français, vise à «protéger la culture et les traditions locales québécoises», selon Sébastien Poirier. «Le parti est principalement identitaire. C'est notre premier combat. On prône une fermeture totale des frontières. On trouve complètement aberrant qu'on soit en train de construire des camps de réfugiés aux frontières», soutient-il.
Sur sa plateforme électorale, le futur parti politique tire à boulets rouges sur les musulmans et «l'islamisation de notre société». «C'est une religion - dans le Coran, du moins - qui est très, très fermée, très, très, très belliqueuse. On n'encourage pas du tout ça », explique Sébastien Poirier. Sur sa page Facebook, le jeune politicien de la région de Montréal diffuse régulièrement des publications islamophobes et d'extrême droite. Il dénonce aussi l'égalité entre les sexes, une «construction sociale fantaisiste établie par la gauche».
Une coalition de groupes identitaires
Même s'il n'a pas d'ambition politique, le dirigeant et fondateur de PEGIDA Québec Stéphane Asselin souhaite pour sa part former une grande coalition de «groupes identitaires» québécois avec les principales organisations ultranationalistes : La Meute, Les soldats d'Odin et Atalante. «C'est le moment de se rallier et de se tenir ensemble. Oui, ça a déjà été discuté, j'ai fait des réunions à ce propos à Drummondville», explique-t-il, sans plus de détails.
Stéphane Asselin assure ne pas être raciste ou d'extrême droite, mais il lance des accusations d'une extrême véhémence envers nos élus. «La loi libérale sur l'immigration, c'est encore pire que le nazi. [...] Le gouvernement Trudeau, c'est un gouvernement de nazis! Et Couillard, c'est encore pire! Trudeau est en train d'effacer complètement l'identité canadienne, c'est quoi sinon un génocide ? C'est un génocide, mais tranquille», rage-t-il.
Stéphane Asselin assure néanmoins que des politiciens de la scène provinciale et fédérale adhèrent à son organisation anti-immigration. «Je vais taire leur nom pour une question de sécurité», dit-il. Hier, le sénateur conservateur Pierre-Hugues Boisvenu était membre du groupe privé de PEGIDA Québec sur Facebook. C'est toutefois La Presse qui l'a informé de son adhésion. «C'est peut-être un accident. Je n'ai aucune connaissance de ce groupe-là. Je n'adhère à aucun groupe qui s'oppose à l'immigration», a-t-il plaidé. Le sénateur a ensuite rappelé La Presse pour indiquer avoir quitté le groupe rejoint par erreur.
Un «club de combat» identitaire
Le groupe d'extrême droite qui a installé lundi à Québec des bannières anti-immigration jugées haineuses par la police continue de se mobiliser. Atalante-Québec se donnera pignon sur rue dès le mois prochain en ouvrant un «club de combat» identitaire, a appris La Presse.
Cette petite organisation, qui multiplie les coups d'éclat dans la Vieille Capitale et compte des militants condamnés pour des attaques racistes au couteau, l'a du moins déclaré à un média serbe du même courant idéologique, au début d'août.
«Si je peux vous révéler quelque chose, le mois prochain, nous ouvrirons notre premier local qui accueillera notre propre club de combat [fight club] nommé "La Phalange - Club de boxe identitaire"», a affirmé un porte-parole d'Atalante-Québec.
Hier, il a été impossible de confirmer le sérieux du plan. Comme à son habitude, le groupe a refusé de répondre aux questions de La Presse. Le groupe n'a pas non plus voulu confirmer que le local serait situé à Québec. Notons que toutes ses activités sont dans la Vieille Capitale.
L'ouverture d'un tel local marquerait un jalon dans la progression de la scène ultranationaliste à Québec : si ces groupes ont leurs bars de prédilection, ils ne disposaient jusqu'à maintenant d'aucun endroit proprement à eux.
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