Raymond Bachand, ministre des Finances du Québec Photo: Archives Reuters
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Peut-être avez-vous sourcillé lorsque Raymond Bachand a récemment présenté son budget. Vous avez sans doute rigolé au moment où monsieur le ministre a qualifié ce budget de révolution culturelle, songeant du même élan que Mao Zedong devait se retourner dans sa tombe. Il n'y a pas de quoi rire. Quand les néolibéraux s'attaquent à l'économie, c'est sérieux.
Il faut savoir que la révolution néolibérale est planétaire et qu'elle est dirigée par le milieu des affaires. La nouvelle droite n'a plus rien à voir avec l'ancienne. Le néolibéralisme ressemble à maints égards au fascisme. Son principal objectif est de détruire l'État-Providence et de le remplacer par une dictature. La nouvelle droite se moque du développement économique, de l'emploi, de la sécurité sociale et de la paix dans le monde. Les néolibéraux estiment que l'entrepreneur est un animal autonome, agissant sans l'appui de la société, comme s'il n'avait jamais eu de parents, de culture, ni de relations pour se déifier, tandis qu'il réifie les classes sociales inférieures.
Ridicule solidarité
Selon les néolibéraux, la société ne garantit pas les libertés individuelles. Elle ne sert qu'à enrichir les mieux nantis. La solidarité consiste en une chose ridicule, les problèmes sociaux, en une illusion. Seules les inégalités naturelles demeurent vraies. Les patrons, ces surhommes autocréés comme dans la mythologie pharaonique égyptienne sont plus talentueux que la moyenne, parce qu'ils travaillent énormément, non parce qu'il s'agit fréquemment de fils à papa. Les chômeurs, ces ignorants paresseux devraient se chercher un emploi à tout prix, se suicider, ou se tuer à l'ouvrage pour un salaire de misère, au lieu de ternir l'image du gouvernement. La belle affaire!
La vérité, c'est que du berceau à la tombe, la société est responsable de tout. Elle conditionne la morale, les lois, l'éducation, etc. On ne choisit pas sa famille, ni sa langue maternelle, ni son territoire, ni sa culture. C'est surtout à l'âge adulte que nous faisons des choix rationnels modifiant notre personnalité et notre trajectoire sociale.
Un idiot rationnel et prévisible
Les néolibéraux ne sont responsables de rien ni de personne. Ils affirment que les perdants doivent assumer leurs choix. La rationalité néolibérale est réductrice, elle fait de l'Homme, un homo oeconomicus, c'est-à-dire un idiot rationnel et prévisible. Ceux qui n'ont pas la fibre génétique entrepreneuriale sont voués à l'échec. Ce sont les lois incontournables de l'évolution et de la sélection naturelle qui commandent la guerre de tous contre tous, la compétition entre prédateurs. La logique néolibérale justifie les conflits, la torture et l'agressivité, parce que les moteurs de l'histoire sont la compétition économique entre les nations et la répression. Il ne faut donc point s'étonner si la lutte économique mondiale produit quelques terroristes. Qu'en est-il alors de la faculté de penser qui façonne les relations humaines et sociétales?
Messieurs les exploiteurs, sachez que nous ne troquerons guère nos acquis sociaux contre des frites et du «baloney», même si vos politiques renforcent l'identité ethnique et religieuse, incitant la population à se réfugier dans le communautarisme, l'intégrisme et le différentialisme exacerbé. L'État-gendarme peut toujours sévir. Nous ne cèderons pas au chantage des financiers, car nous sommes écoeurés des risques collectifs et des profits privés.
Tant qu'à travailler pour une bouchée de pain, autant le faire dignement en toute solidarité. Mettre de la pression sur quelques rebelles ou déviants, c'est stratégique, mais sur la majorité des citoyens, c'est révolutionnaire. Comme il n'y a plus de différences idéologiques notables entre l'ADQ, le PQ et le PLQ (ces partis sont somme toute analogues une fois parvenus au pouvoir), et que la révolution culturelle du ministre Bachand, assortie d'un budget, repose sur une démocratie en déroute, une révolution démocratique et pacifique s'impose. (Ces propos s'inspirent de l'ouvrage de Jacques Généreux, Pourquoi la droite est dangereuse, 2007).
Luc Benoit, Trois-Rivières
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