En attendant le Messie

Un bon gouvernement

Le seul bon gouvernement possible

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Tribune libre

Un grand nombre de militants ont été déçus du choix de Jean-François Lisée comme chef et de la mise en veilleuse de l’option indépendantiste. Il faut pourtant admettre qu’au cours des vingt dernières années, à part Pierre-Karl Péladeau, personne ne s’est montré capable de faire avancer le ballon indépendantiste rapidement. Cela viendra mais pour l’instant il y a une élection et pour tout nationaliste la seule option est de soutenir le Parti québécois. On a critiqué l’objectif de former un bon gouvernement mais parce qu’il est nationaliste, le PQ est le seul qui peut former un gouvernement aux services des Québécois. Le démontrer, en campagne électorale et une fois au pouvoir, c’est un pas vers l’indépendance.


Le nationalisme constitue une barrière au libéralisme économique et à la mondialisation sans limite. Le PQ est le seul qui promet de ne pas baisser les impôts parce qu’il veut rétablir la disponibilité et la qualité des services publics. Il est le seul qui peut décider d’une réduction significative des cibles annuelles d’immigration. Il est le seul qui peut proposer des interventions ciblées pour renforcer l’économie du Québec.


Le PLQ et la CAQ sont prisonniers de leur idéologie néolibérale et ils sont prisonniers de leur dépendance aux commanditaires fédéralistes. La stratégie du laisser-faire et le renoncement à notre part des dépenses fédérales structurantes se sont traduits par une performance économique médiocre au cours des quinze dernières années. De 2001 à 2016, le PIB réel du Québec s’est accru de seulement 1,5% par année en moyenne et le PIB par habitant de seulement 0,7%. À titre de comparaison, de 1981 à 2001, le PIB réel s’est accru de 2,1% en moyenne, et le PIB par habitant de 1,5%. On pourrait penser que c’est la crise financière de 2008 qui a eu un impact très négatif sur la croissance mais en réalité cet impact a été très limité. Les taux de croissance ont été de de -0,8%, +2,0 et +1,9% respectivement de 2008 à 2010 tandis que, lors de récessions précédentes, l’économie avait reculé de 2,6% en 1991 et de 3,8% en 1982.


Les statistiques sur l’emploi peuvent sembler plus encourageantes mais il faut comprendre que l’arrivée de plus de cinquante mille immigrants par année génère à elle seule une trentaine de milliers d’emplois sans accroître la richesse en termes de PIB par habitant et sans résoudre un supposé problème de pénurie généralisée de main-d’œuvre.


La dynamique de croissance reposant sur la spéculation immobilière, sur les immobilisations publiques, sur un déficit commercial avec l’étranger et sur l’immigration n’est pas soutenable et il faut s’attendre à une croissance encore plus faible dans le futur si nos gouvernements continuent à laisser faire.


Au Québec, le virage néolibéral a été radical. Le dogme de l’efficacité des marchés laissés à eux-mêmes en est venu à signifier que le gouvernement doit souscrire à la vision économique des gens d’affaires car eux seuls sauraient ce qui est bon pour l’économie. La proximité des ministères avec les milieux d’affaires, renforcée par la présence importante de gens d’affaires au sein du gouvernement, ont accru les risques de conflits d’intérêt et de corruption mais cette proximité influence aussi les décisions du gouvernement non seulement dans le développement économiques mais aussi dans tous ses domaines d’intervention. Ainsi, nos gouvernements dépensent sans contrôle dans les infrastructures publiques, une manne pour les entrepreneurs, tandis qu’ils compressent les dépenses courantes. Ils se sont donnés comme objectifs de réduire les impôts payés sur le revenu et, pour y arriver, de faire payer davantage de services publics par la tarification et par la privatisation, en plus de réduire l’offre et la qualité des services publics. De cette façon, l’État a pratiquement abandonné son rôle de redistribution de la richesse.


C’est pourquoi une bonne partie de la population a l’impression que le Québec s’appauvrit alors que la richesse s’accroît de 1,5% par année. La mondialisation creuse les écarts de revenus entre les citoyens qui sont frappées dans leur activité par la concurrence des pays pauvres, et ceux qui sont à l’abri de cette concurrence. Les gouvernements auraient un rôle à jour pour réduire ces écarts mais les gouvernements néolibéraux ont délaissé ce rôle et ont souvent tendance à favoriser les mieux nantis.


En jouant bien la carte de l’identité, de la langue et de l’immigration le PQ peut causer des surprises d’ici l’élection. C’est cependant la gestion de l’économie et des finances publiques qui risque encore d’être l’enjeu déterminant. À cet égard, il faut contester la prétendue compétence des gouvernements libéraux. On peut le faire en attaquant du même coup la CAQ puisque celle-ci considère aussi que pour créer la prospérité le gouvernement doit se plier aux volontés des milieux d’affaires.


François Legault critique la performance économique des libéraux mais sa principale promesse économique est de remettre de l’argent dans les poches des citoyens en baissant les impôts. Ce n’est rien pour dynamiser l’économie et c’est incompatible avec ses promesses de mettre plus d’argent en éducation,  en santé et pour les ainés. Il annonce aussi des dépenses de dix milliards de dollars dans des infrastructures publiques qui, par la mécanique du Fonds des générations, vont entraîner d’autres coupures dans les services publics.


Avec une plateforme économique convaincante, le PQ peut faire mal paraître le jovialiste François Legault. La politique économique doit s’adapter à une nouvelle réalité. Le Québec n’a plus comme principal défi de créer de l’emploi pour absorber un surplus de main-d’œuvre. En raison de facteurs démographiques nous sommes près du plein emploi ce qui se traduit par des pénuries de main-d’oeuvre dans certains secteurs et pour certaines compétences.


Il n’est plus pertinent de promettre la création de dizaines de milliers d’emplois alors que ces emplois ne peuvent être comblés que par l’immigration et que cette immigration, par ses besoins en biens de consommation, en services publics et en logement, accentue la pénurie de main-d’œuvre. L’enrichissement collectif ne peut être assuré que par le déplacement de travailleurs vers des emplois plus payants pour l’individu et pour la société. C’est pourquoi certains programmes de soutien à la création d’emplois devraient être remplacés par un programme de soutien aux entreprises pour l’investissement en machinerie et en équipement.


La plateforme économique doit aussi inclure une gestion sensée des finances publiques. Le PQ a promis de ne pas réduire les impôts, c’est très bien, mais il faut aussi que tous  les revenus disponibles soient réinvestis dans les programmes de base en éducation en santé et en services sociaux qui ont vu leurs budgets stagner pendant plusieurs années. Il ne faut pas inventer des promesses pour aller chercher des votes, ce qui cautionne les coupures libérales. Le discours libéral laisse croire que le gouvernement a réussi à rétablir l’équilibre budgétaire, ce qui donnerait des surplus à réinvestir. C’est une interprétation ridicule. Le gouvernement libéral a trop coupé dans les dépenses, il remet une petite partie des surplus en cadeaux sans rétablir les programmes essentiels. La CAQ veut aussi utiliser à des fins électorales ces surplus acquis malhonnêtement. Il faut que le PQ dénonce ces voleurs du Temple.


Finalement, il faut comprendre qu’il est urgent d’éloigner autant la CAQ que les libéraux du pouvoir. En tant que fédéralistes, ils considèrent que la réduction du rôle de l’État prônée par le libéralisme est un bon prétexte pour ramener l’État québécois à une simple province canadienne. Nos politiciens fédéralistes ont perdu le sens de l’État, notre État.



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3 commentaires

  • Pierre Gouin Répondre

    29 juin 2018

    @ M. Morin


    Les sondeurs essaient de mener le jeu et vous les accommodés. Pour moi il y a longtemps qu'on a pas eu de bons gouvernements péquistes mais à l'époque ils ont été tres bons. Ce que j'attends de Jean-François Lisée , je ne suis pas sûr qu'il va le livrer.



  • Jean-Charles Morin Répondre

    26 juin 2018

    Je trouve votre analyse économique bien sympathique, à la différence toutefois que sur le plan politique vos conclusions tiennent davantage du "wishful thinking" que d'une vision véritablement objective.


    Premièrement, il faut convenir que pour les élections du 1er octobre prochain, les jeux sont faits. La tendance est lourde: à moins d'une très grosse surprise la CAQ va se retrouver au pouvoir et le PQ sera relégué au rang de tiers parti avec environ une demi-douzaine de sièges. Pire encore: ses tentatives de nuire à la CAQ d'ici les élections ne pourront à court terme que favoriser la réélection des libéraux. C'est triste à dire mais le contexte électoral actuel confine pour le moment les stratèges péquistes à des actions carrément non-productives.


    Deuxièmement, la stratégie du "bon gouvernement" provincial a déjà montré ses limites comme voie d'accès royale à l'indépendance. Dans les faits, elle a mené par deux fois à un cul-de-sac. La raison en est bien simple: démontrer qu'un Québec provincial au sein du Canada peut se tirer d'affaire par une "bonne gouvernance" éclairée à saveur nationaliste revient à dire que l'indépendance est inutile et que le risque n'en vaut pas la chandelle. En fait, cela revient à terme à se tirer dans le pied. 


    Dans un tel contexte, il est clair que le chemin vers l'indépendance nécessite à partir de maintenant un sérieux changement de paradigmes. Lequel? Une chose semble certaine: le référendum ne constitue plus la solution: à preuve, les indépendantistes catalans ont gagné leur référendum sans toutefois réussir à faire de leur état un pays indépendant. Alors à quoi bon s'accrocher à des solutions qui dans les faits n'en sont pas. D'ici à ce qu'une réponse pleinement satisfaisante soit trouvée et une nouvelle volonté soit dégagée, on ne pourra pas en vouloir aux Québécois d'éprouver des hésitations, sinon de l'indifférence, à suivre les politiciens actuels.


  • Pierre Gouin Répondre

    23 juin 2018

    J'avais écrit Messi dans mon titre, ce n'était pas une erreur. Je voulais dire que ce n'est pas Dieu qu'on attend mais juste un champion, ça ne prendra pas mille ans.