Après la déclaration du faucon John Bolton le 29 avril qui faisait allusion au modèle libyen pour résoudre le conflit diplomatique entre Washington et Pyongyang sur le programme de dénucléarisation, Donald Trump joue-t-il au pompier pyromane ?
Alors que les relations entre les Etats-Unis et la Corée du Nord semblaient en passe de devenir moins glaciales, il se pourrait que Donald Trump ait commis un nouvel impair : interrogé sur la référence de son conseiller à la Sécurité nationale au «modèle libyen» (c'est-à-dire le programme de dénucléarisation de la Libye en décembre 2003) en date du 29 avril, le président américain a visiblement compris le terme «modèle libyen» comme une évocation de la chute du président libyen en 2011, soit quelque cinq années après la reprise du dialogue diplomatique avec les Etats-Unis. Sans gouvernement stable, le pays a ensuite sombré dans le chaos.
«Si vous regardez bien le modèle libyen, ça a été un vrai massacre, nous sommes allés là-bas pour l'abattre [Kadhafi]. C'est très probablement le modèle qui se mettrait en place si on ne trouvait pas un accord [avec Kim Jong-un]. En revanche, si nous trouvons un accord, je suis sûr qu'il en sera très, très satisfait», a déclaré le président américain à la presse depuis la Maison Blanche le 17 mai. Donald Trump semble ainsi avoir promis une fin «à la Kadhafi» à Kim Jong-un en cas d'absence d'accord avec les Etats-Unis.
Ce n'était pourtant pas le sens des propos de son conseiller à la Sécurité, le néo-conservateur John Bolton, eux-mêmes déjà très maladroits, voire ambigus. Il avait fait référence au «modèle libyen» pour rappeler que Tripoli avait abandonné son programme de développement d'armes chimiques, biologiques ou nucléaires en 2003 afin de restaurer ses relations avec l'Occident, après neuf mois de négociations secrètes avec les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Une décennie plus tard, le dirigeant libyen était assassiné lors de l'intervention militaire occidentale.
Ca a été un vrai massacre, nous sommes allés là-bas pour l'abattre
Le 12 juin, une rencontre historique est toujours prévue à Singapour entre les dirigeants de la Corée du Nord et des Etats-Unis. Mais si la déclaration de John Bolton avait déjà chahuté les relations diplomatiques entre Washington et Pyongyang, il se pourrait que la déclaration de Donald Trump, qui se voulait probablement rassurant en déclarant qu'il ne voulait pas du «modèle libyen» en Corée du Nord, n'arrange pas la précaire entente entre les deux pays. Kim Jong-un retiendra-t-il la menace voilée ou l'assurance des meilleures volontés de Donald Trump ?
Le président américain l'a affirmé lors de cette même déclaration à la presse : «Si on traite avec Kim Jong-un, il sera là. Il dirigerait lui-même son pays. Son pays serait très riche. Nous sommes prêts à concéder beaucoup et... lui aussi. Je crois que nous allons entretenir de bonnes relations, à condition que notre rencontre ait lieu et qu'elle débouche sur quelque chose. Et il aura accès à une très puissante protection.»