Tony Accurso, figure de proue de la construction

Crime organisé et politique - collusion (privatisation de l'État)

L'entrepreneur Tony Accurso est décrit comme un des leaders de l'industrie de la construction au Québec. Des personnalités publiques ont été invitées sur son yacht, le Touch. Et il fait partie du consortium ayant raflé le plus important contrat de toute l'histoire de la Ville de Montréal, d'une valeur de 355 millions, pour installer et entretenir des compteurs d'eau. La Presse a essayé d'en savoir plus sur les activités professionnelles de Tony Accurso et sur ses liens d'affaires avec la FTQ.
Depuis 2002, deux entreprises dirigées par Tony Accurso, Construction Louisbourg et Simard-Beaudry, ont raflé plus de 125 millions de dollars de contrats à la Ville de Montréal et dans ses arrondissements, ce qui en fait l'un des plus importants entrepreneurs travaillant en ville, selon un relevé des documents municipaux.

Cela s'ajoute au contrat de 355 millions octroyé au consortium formé par Simard-Beaudry et le groupe d'ingénierie Dessau pour installer et entretenir des compteurs d'eau dans les secteurs industriel, commercial et institutionnel de la ville, ainsi que des chambres de contrôle sur le réseau d'eau.
Tous ces contrats ont été accordés à la suite d'appels d'offres en bonne et due forme. En 2004, la Ville de Montréal a commencé à commander beaucoup plus de travaux d'infrastructures, car elle voulait combler le retard accumulé par l'ancienne administration du maire Pierre Bourque. C'est dans ce contexte que le nombre de contrats octroyés aux entreprises de M. Accurso a fortement augmenté, comme celui d'autres compagnies. Mais peu d'entre elles peuvent se targuer d'avoir obtenu autant de contrats aussi payants.
De nombreux contrats
Au début des années 2000, Simard-Beaudry et Construction Louisbourg obtenaient deux ou trois contrats par an, d'une valeur totale de trois à quatre millions de dollars par année. En 2005, le nombre de contrats est passé à 11 et se maintient depuis à une vingtaine de millions de dollars par année en moyenne.
Les contrats sont accordés non seulement par le conseil d'agglomération et par le comité exécutif de la Ville, mais aussi par les arrondissements comme celui de Saint-Léonard, mais surtout celui d'Anjou. Dans cet arrondissement, Construction Louisbourg occupe une place privilégiée, réalisant la plupart des grands travaux.
Les activités des entreprises de Tony Accurso dépassent, et de loin, les frontières de l'île de Montréal. Elles se manifestent aussi à Laval et, en fait, dans toute la grande région de Montréal. M. Accurso est un homme d'affaires aguerri et très influent. Son importance dans la construction est reconnue depuis au moins 15 ans, et même par des hommes d'affaires américains.
Dans une déclaration sous serment datant de 1994 et déposé à la Cour de justice de l'Ontario, Michael Ropper, alors vice-président de la United States Pipe, a noté «qu'aucune compagnie ne pourrait évoluer avec succès dans l'industrie de la construction en Ontario et au Québec sans la pleine coopération de certains leaders de l'industrie, dont Tony Accurso».
Tony Accurso dirige ou supervise de très nombreuses entreprises. Les plus connues sont Simard-Beaudry et Constructions Louisbourg, mais il y a aussi Gastier, Hyprescon, Construction Marton, les Ciments Lavallée, Cemco, Écolosols, etc. M. Accurso cultive des amitiés dans tous les milieux, tant syndicaux que politiques, tant au municipal qu'au provincial.
Yacht reconstruit
Son succès est aussi flamboyant que sa discrétion. Il ne se laisse pas photographier ni interviewer, sauf exception. La Presse a souvent laissé des messages dans sa boîte vocale, y compris hier, mais il n'y a jamais donné suite. Un des rares journalistes à avoir pu lui parler préparait un article pour ShowBoats International, une revue spécialisée.
M. Accurso lui a décrit comment il s'est retrouvé propriétaire de son yacht, le Touch, amarré dans les îles Vierges. Il ne trouvait aucun bateau qui lui convenait. Il a donc décidé d'en reconstruire un. «Je suis un entrepreneur, a-t-il dit. Alors je crois que je peux construire n'importe quoi. Je ne trouvais pas de bateau avec quatre lits grand format, un bain tourbillon pour six personnes sur le pont, deux laveuses et deux sécheuses...»
L'entrepreneur a acheté un yacht en Floride, l'a transporté au Québec et l'a complètement rénové. Jusqu'à 75 ouvriers pouvaient se trouver en même temps sur son chantier naval. (Les curieux pourront lire tous les détails et regarder les photos en tapant «Tony Accurso» et «ShowBoats International» dans Google.)
La chance ne lui a toutefois pas toujours souri. Dans les années 80, une tragédie a frappé sa famille. Son ancien beau-frère et ex-partenaire, Mario Taddeo, a été abattu par un inconnu, un tueur à gages selon la police. Les enquêteurs n'ont jamais pu déterminer qui était responsable du meurtre.

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André Noël30 articles

  • 20 098

André Noël a étudié en géographie à l'Université de Montréal et en journalisme à Strasbourg. Après avoir été rédacteur à la Presse canadienne, il est entré à La Presse en 1984. Il a toujours travaillé dans la section des informations générales, où il a mené des enquêtes très variées.





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