Plaidoyer de Ghislain Picard

Sortir les nations autochtones de l'insignifiance et de la dépendance

Forum socio-économique des Premières nations


par Dutrisac, Robert
Mashteuiatsh - Le chef régional de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL), Ghislain Picard, a plaidé hier pour la création d'une «nouvelle alliance» afin de permettre aux peuples autochtones de sortir de «l'insignifiance» et de la «dépendance».
«Une nation dont le développement est planifié par d'autres, dont le territoire est aménagé et exproprié par d'autres, dont les droits sont établis et interprétés par d'autres et au profit des autres, une telle nation est réduite à l'insignifiance et à la dépendance. Les questions touchant le territoire et les ressources sont incontournables et entravent notre route», a déclaré Ghislain Picard lors de son discours à l'ouverture du Forum socioéconomique des Premières Nations.
Ce forum est coprésidé par le chef Ghislain Picard, le premier ministre Jean Charest et le ministre fédéral des Affaires indiennes et du Nord, Jim Prentice. Dans son allocution, M. Charest a qualifié ce forum de «moment unique de notre histoire commune» et de «point tournant» dans les relations entre l'État du Québec et les Premières Nations. «Notre avenir est lié et notre avenir est commun», a dit le premier ministre.
Soulignant souhaiter que la Loi canadienne sur les Indiens soit abolie d'ici cinq ans, Ghislain Picard a rappelé que les autochtones n'ont jamais renié leur statut de nation, d'ailleurs reconnu par l'Assemblée nationale en 1985. «Quoi qu'on dise, quoi qu'on fasse, les cultures, les valeurs et les philosophies de nos peuples étaient et sont restées fondamentalement différentes de tout ce qui caractérise la société dominante québécoise. Soyons clairs et disons les vraies affaires: je ne suis pas canadien, je ne suis pas québécois, je suis innu», a-t-il dit.
«On continue, encore aujourd'hui, de refuser à nos peuples le droit de façonner leurs sociétés et leurs institutions conformément à leurs valeurs», a poursuivi M. Picard.
Le chef de l'APNQL en a appelé à une «nouvelle alliance entre nos gouvernements respectifs». Il n'y a pas «36 solutions», a-t-il soutenu: les Premières Nations doivent contrôler les ressources qui leur permettront d'être responsables de leur propre destin et édifier leurs propres institutions. «Nous n'avons pas le droit d'échouer et de décevoir une jeunesse montante qui, dans bien des cas, n'a même plus les moyens de vivre d'espoir.»
10 000 emplois
À son entrée au forum, le chef de la communauté innue de Mashteuiatsh, Gilbert Dominique, a signalé que le partage des ressources naturelles doit faire partie des discussions. «Nous avons des droits, les Premières Nations. Inévitablement, si on veut construire dans l'avenir, il faut asseoir notre économie sur quelque chose de durable. C'est clair que c'est le partage des ressources naturelles.»
Au-delà de la reconduction du fonds de développement par le gouvernement du Québec, des «engagements de fond» sont nécessaires. «Ce n'est pas 1000 emplois mais une dizaine de milliers d'emplois qu'il faut créer demain matin», a dit M. Dominique.
Le chef du Parti québécois, André Boisclair, croit que l'entente de la Paix des Braves, signée sous l'impulsion de Bernard Landry, est la voie à suivre. «L'idée de convenir d'ententes négociées de nation à nation où nous arrivons à définir un avenir commun sur une façon d'occuper ensemble le même territoire mais aussi sur la façon de partager les ressources nous apparaît la voie la plus porteuse», a dit M. Boisclair alors qu'il faisait son entrée au forum.
Dans une lettre qu'il a envoyée aux journaux, M. Boisclair a dénoncé la Loi canadienne sur les Indiens et son système de réserves, qui contribuent «à perpétuer une vision colonialiste de nos relations, pourtant révolue depuis longtemps».
Priorité aux jeunes
De son côté, le chef de l'Action démocratique du Québec, Mario Dumont, estime que la priorité doit être accordée aux jeunes autochtones. «Il faut être allé dans des communautés autochtones pour voir qu'il y a une réalité complètement différente du Québec. Il y a des enfants, il y a beaucoup d'enfants», a-t-il dit, et c'est une «responsabilité collective» de leur donner des perspectives d'éducation et d'emploi.
Le développement socioéconomique des Premières Nations passe par leur autonomie et par le partage des ressources naturelles, estime M. Dumont. Mais ce ne sera possible qu'à la suite d'une «véritable décentralisation» en faveur des régions du Québec. Le chef adéquiste estime que c'est là le problème de l'Approche commune. «C'est difficile de donner à des communautés une participation à des redevances sur des ressources naturelles et ne pas donner la même chose à une région comme la Côte-Nord», croit M. Dumont.
Le Forum socioéconomique des Premières Nations est un événement d'envergure qui réunit pour la première fois les dirigeants politiques des communautés autochtones, du gouvernement du Québec et du gouvernement fédéral. Au cours des trois jours que durera le forum, les quelque 250 participants aborderont les thèmes suivants: économie et emploi, éducation et culture, santé et services sociaux, infrastructures et logement, développement communautaire.


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