«Sonder la politique est une science inexacte…»

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L'espoir de Lisée et du PQ


Si la population canadienne s’était basée uniquement sur les sondages et les analystes politiques, Justin Trudeau n’aurait jamais été élu. On a même annoncé son « suicide politique » en cours de campagne électorale en 2015. 60 jours plus tard, il avait effacé un déficit de 15 points dans les sondages et se trouvait, confortablement, majoritaire à la tête du pays.


Ce qu’il y a de bien avec les sondages politiques c’est que ceux-ci permettent aux analystes de faire du « temps d’antenne ». Pas besoin de faire des analyses fouillées, de la recherche, ni même de s’interroger sur la crédibilité du sondage, sur sa mécanique; non. On extrapole. On fait du temps.


Au départ, on doit rappeler qu’il est périlleux d’accorder plus d’importance aux sondages que ce qu’ils sont en réalité, c’est-à-dire un cliché imparfait de la situation à un moment très précis; un cliché dont la clarté tient à de nombreux paramètres, le plus important étant la méthodologie employée par celui qui sonde mais aussi le sérieux de la démarche de ceux qui analysent les résultats ensuite.


Par exemple, un spin doctor dont on connaît les allégeances politiques tentera de faire ressortir les éléments positifs de l’enquête pour son parti. La même chose pour le staff politique, les députés, ministres, etc. C’est de bonne guerre.


L’analyste politique « objectif » fera un peu plus dans la nuance, tentera d’établir des tendances en inscrivant le sondage du jour dans un contexte plus large; les autres sondages récents confirment-ils une remontée, un déclin?


Toutefois, à la base, il est impératif de souligner le principal : un sondage politique à plus d’un an des élections, ne veut pas dire grand chose à moins de présenter une donnée spectaculaire. Par exemple, le sondage CROP de 2011 qui annonçait la possibilité de 100 sièges pour la CAQ de François Legault! On se souvient de cette enquête là non parce qu’elle était réaliste, mais plutôt pour la manchette.


Rien de tout ça dans le Léger publié en fin de semaine.


Avant de commenter ce sondage en particulier, inspirons-nous un peu de la situation au fédéral et du climat politique qui prévalait à plus d’un an des élections. Suite à son couronnement à la tête du parti libéral du Canada, Justin Trudeau a joui d’une embellie dans les sondages. À plus d’un an des élections, le jeune premier récoltait souvent la faveur populaire.


Le test parlementaire a nui à Trudeau qui s’est rapidement fait déclasser par Thomas Mulcair, lui-même nouveau chef du NPD. Ainsi, en septembre 2014, des sondages comme celui de EKOS (25 septembre, méthode IVR) pouvaint créditer le PLC de Trudeau de près de 15 points d’avance sur les Conservateurs!


À partir de janvier 2015, les choses se sont corsées pour le PLC et les sondages du printemps 2015 ont souvent penché du côté des Conservateurs. Le 31 mars 2015, EKOS pointait dorénavant les Conservateurs à 5 points devant le Libéraux; un revirement de 20 points en 6 mois!


19 mai 2015, revirement pour EKOS, le NPD de Mulcair arrive en tête pour la première fois. L’élection devant être déclenchée plus tard dans l’année sera une course à trois selon la majorité des analystes.


À partir du 5 juin 2015, le PLC de Trudeau ne fera plus que descendre, lui qui, dix mois avant, jouissait d’une avance de 15 points. Pendant les semaines qui suivront, Mulcair arrivera en tête de presque tous les sondages publiés au Canada. Un revirement spectaculaire.


On connaît la suite. La campagne électorale la plus longue de l’histoire récente du Canada est lancée le 2 aout 2015 pour un devant se tenir le 19 octobre. Jour du lancement de la campagne électorale, Forum Research publie un sondage IVR de 1400 répondants. Résultat : NPD 39%, Conservateurs 28% et Libéraux à 25%. La course est lancée.


Tout se jouera au cours de la campagne électorale. Thomas Mulcair fera une campagne fade et désastreuse, Harper sera avalé par un mouvement populaire qui désire avant tout la fin de son règne. Trudeau mènera une campagne audacieuse à bien des égards, notamment par son positionnement plus « progressiste » alors que Mulcair abandonnait le sien au profit d’un réalisme centre-droit qui l’aura coulé.


Toutefois, les promesses de campagne qui ont fait pencher la balance pour Trudeau, comme ce coup d’éclat en fin de campagne qui promettait la « dernière campagne selon le mode de scrutin uninominal à un tour » n’auront été que façon de berner la population. Trudeau gouverne texto comme Stephen Harper, salade multiculturaliste indigeste et quotidienne en prime.


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Ce graphique montre la variation impressionnante des appuis politiques entre l’élection de 2011 et celle de 2015.

Pour prendre la mesure du désastre de la campagne du NPD de Mulcair, il faut comparer les résultats du premier sondage aux résultats de l’élection, 10 semaines plus tard : NPD 19,7%, Conservateurs 31,9% et Libéraux 39,5%.


Les analyses de début de campagne et les grands titres dévastateurs qui annonçaient, par exemple, le « suicide politique » de Justin Trudeau n’auront eu aucun effet sur le résultat de l’élection. Le tout s’est joué en campagne, en fonction du positionnement politique de chacun des chefs.


C’est précisément ce qu’espèrent, d’ailleurs, les partisans du parti Québécois au Québec. Que le tout se joue en campagne, leur chef étant meilleur débatteur que les autres.


Ce sera d’ailleurs l’objet d’un prochain texte.


(On trouvera ici le détails des différents sondages mentionnés dans ce texte )



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