Ses intérêts d'abord

Le parti de Harper veut affamer les partis, tout en se gavant à même le Trésor public

Si le refus de la subvention au festival Divers/Cité a fait jaser à Montréal, c'est tout le Programme des manifestations touristiques majeures (PMTM) qui irrite sérieusement le National Post. La goutte qui a fait déborder le vase cette semaine est la révélation que la Canadian National Exhibition de Toronto allait utiliser une partie de sa subvention pour inviter l'ancien président Bill Clinton.
Mais qu'est-ce que cela a à voir avec la relance économique, demande le Post? De l'avis du quotidien, le PMTM et ses 100 millions sont devenus un outil électoral pour les conservateurs, qui financent des festivals qui n'en ont même pas besoin. Le Post cite un festival d'Ottawa, ville du ministre John Baird, qui a dû trouver en catastrophe un artiste qui lui permettrait de dépenser les 338 000 $ accordés à la dernière minute. «Les Canadiens se sont fait dire qu'ils devraient accepter des années de déficits afin de financer des dépenses ciblées destinées à créer des emplois et à construire des infrastructures. Les conservateurs alimentent plutôt des soupçons bien fondés que le programme de relance n'était pas aussi nécessaire qu'on le prétendait et que des dizaines de milliards de dollars sont gaspillés inutilement au nom de l'opportunisme politique.»
Les conservateurs sont aussi pris à partie pour multiplier les annonces -- on parle de milliards depuis le début de l'été -- faites dans le seul but de mettre leurs députés et ministres en valeur. Tout est prétexte à les faire parader. Même le premier ministre Harper participe au manège. La semaine dernière, il a tenu une cérémonie sur un pont local en Colombie-Britannique. Gordon Gibson n'en est pas revenu dans le Globe and Mail. Et pourquoi une cérémonie maintenant alors que le pont ne sera ouvert à la circulation qu'à la fin de l'année? Pour tenter d'en appeler tout de suite à la gratitude des électeurs? «Et ceci se répète à travers le pays, écrit Gibson. Je ne peux que supposer que le bureau du premier ministre prend les citoyens pour des crédules.» Les résultats des futures élections diront qui a raison, le bureau du premier ministre ou le chef libéral Michael Ignatieff, qui n'arrive pas à transformer chaque détail politique en montagne médiatique. Gibson espère que ce ne sera pas l'approche conservatrice qui l'emportera car, dit-il, les choix à faire sont trop graves pour ne pas être expliqués avant les prochaines élections.
Indifférence
Le National Post aurait compris que les autorités canadiennes prennent quelques jours pour vérifier la version de Suaad Hagi Mohamud, cette ressortissante canadienne qui a été coincée au Kenya en raison d'un problème d'identification, afin de s'assurer qu'elle ne soit pas un imposteur ou une menace à la sécurité. Mais trois mois? La sympathie du quotidien va à la femme de 31 ans. Le Post croit qu'une enquête s'impose pour comprendre ce qui a bien pu se produire. «Mme Mohamud n'a commis aucun crime et mérite des excuses. Plus important encore, on se doit de lui assurer, ainsi qu'aux autres Canadiens, que tout sera mis en oeuvre pour éviter qu'un tel cauchemar se répète.»
Pour Christopher Hume, du Toronto Star, la conclusion est plus brutale. Le traitement réservé à Mme Mohamud n'est rien d'autre que du racisme. Le gouvernement Harper, dit-il, a montré par le passé qu'il y avait, selon lui, différentes catégories de citoyens. «La citoyenneté n'est plus affaire de résidence, de lieu de naissance, de serment d'allégeance ou de passeport, mais de couleur de votre peau», écrit Hume. Mohamud a eu beau présenter son permis de conduire, sa carte d'assurance maladie, son certificat de citoyenneté, rien à faire, son sort était scellé. Mais si elle avait été une mère blanche de Leaside, Hume est persuadé que Stephen Harper lui-même se serait porté à sa défense. Or, même après que Mohamud eut établi son identité, aucun membre de ce gouvernement n'a cru bon commenter le dossier. Haroon Siddiqui, lui aussi du Star, renchérit en notant que tous les Canadiens qui n'ont pas eu droit à l'aide empressée d'Ottawa depuis trois ans ont en commun d'être membres de minorités visibles et musulmans, contrairement à Brenda Martin, cette Canadienne reconnue coupable de fraude au Mexique mais que le gouvernement Harper est allé chercher à ses frais avec un avion nolisé.
mcornellier@ledevoir.com


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