Se séparer de Québec

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La stratégie de Legault





L’élément le plus important pour comprendre la finalité du virage nationaliste que la Coalition avenir Québec opère en fin de semaine réside dans le lieu où l’opération sera tenue.


On a choisi Laval, capitale du 450.


En fondant la CAQ, le discours de François Legault s’articulait sur deux piliers, soit le rejet de la question nationale et une priorité à l’économie. Il y avait là communauté d’esprits avec l’ADQ, dont il fallait rallier la base.


Depuis, la donne a changé. La région de Québec, où Mario Dumont avait connu des jours heureux, est virée au rouge. Puis, le dernier chef adéquiste, Gérard Deltell, est parti à Ottawa.


Surtout, les choses ont bougé chez les «vieux partis» que la CAQ visait à remplacer. Philippe Couillard lui a ravi son discours sur la responsabilité fiscale, ce qui plaît à Québec. Pierre Karl Péladeau lui a volé ses habits d’entrepreneur. Les deux hommes mettent la table pour un match électoral polarisé sur la question nationale, en 2018.


François Legault cherche son espace, ce qu’il n’avait pas caché lors d’une dernière fin de session erratique.


Vers le sud


La défaite dans Chauveau en juin a officialisé le divorce: c’est maintenant auprès des «Serge» du 450 que François Legault voit son salut. C’est une clientèle jeune, qui souffre d’un endettement empiré par les taxes et les tarifs. À la différence de son équivalent de Québec, la proximité d’une Métropole qui s’anglicise et se métisse fait en sorte que les enjeux identitaires lui parlent encore. C’est à eux que la CAQ s’adresse désormais.


C’est d’ailleurs en Montérégie, dans les Laurentides et dans Lanaudière qu’elle a fait ses principaux gains, en 2014. Plusieurs de ces nouveaux élus viennent du PQ ou du Bloc.


Il faudra voir maintenant combien de temps ce virage va durer.


De droite à gauche


François Legault aime se présenter comme un homme qui a toujours avancé dans la même direction. Or, son parcours rappelle plutôt celui du véliplanchiste. Parfois à droite, parfois à gauche, jamais tout droit.


Au PQ, il réclamait une attitude plus volontaire visant la tenue d’un référendum.


Une fois à la CAQ, il se faisait tirer l’oreille pour parler des scandales de collusion dans la construction. Puis, recrutant Jacques Duchesneau, il place l’intégrité au centre de sa campagne de 2012.


Les mois qui ont suivi ont été difficiles. Une saison, sa priorité est l’économie. Une autre, c’est l’éducation. On invente ensuite le Plan Saint-Laurent. Désespéré en 2014, enfourchant la défense du contribuable, il mène une campagne courageuse. Son résultat surprend. Quelques jours de plus et il dépassait le PQ. François Legault est davantage un sprinter qu’un marathonien.


Plus efficace en élections qu’au Parlement, combien de temps saura-t-il tenir le rythme, cette fois-ci?


Il se pourrait bien qu’après trois ans suivis d’une campagne de 35 jours sur fond référendaire, ça redevienne payant d’être celui qui dit que la question nationale n’est plus la priorité des Québécois. C’est ce que tendent à accréditer les résultats du dernier scrutin fédéral, entre autres indicateurs.


C’est peut-être justement pour tenir jusque-là que François Legault prend aujourd’hui ce virage. Il s’en va dans le 450 pour revenir plus tard à Québec.



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Claude Villeneuve137 articles

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L’auteur est blogueur au Journal de Montréal et au Journal de Québec. Il a été président du Comité national des jeunes du Parti Québécois de 2005 à 2006 et rédacteur des discours de la première ministre Pauline Marois de 2008 à 2014.





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