Saint-Jean-sur-Richelieu - Des services de génie-conseil à 2300 $ l'heure

L'affaire BPR

Kathleen Lévesque , Alec Castonguay - Les services de génie-conseil coûtent cher au monde municipal. La Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu a payé des tarifs allant jusqu'à 2300 $ l'heure pour que des ingénieurs préparent des plans et devis d'infrastructures, a découvert Le Devoir.
Les archives des deux dernières années de cette municipalité de la Montérégie démontrent que les firmes de génie-conseil BPR et Les Consultants SM remportent la palme des tarifs horaires. Pour un contrat obtenu sans appel d'offres en 2009, BPR a rédigé des plans et devis dont la facture a totalisé 368 000 $, soit un tarif équivalant à 2300 $ l'heure.
Les Consultants SM ont quant à eux réalisé un contrat de plans et devis en 2008 pour lequel Saint-Jean-sur-Richelieu a accordé 89 500 $, ce qui représente un tarif horaire de 746 $.
À titre de comparaison, un décret du gouvernement du Québec d'avril 2009 fixe à 133 $ l'heure le tarif d'un «ingénieur senior principal» du secteur privé qui exécute un mandat pour le gouvernement. Il arrive toutefois, dans certains contrats, que le tarif horaire d'un ingénieur senior oscille entre 150 et 200 $ l'heure.
Pour chacun des projets analysés, Le Devoir a pris en compte le montant des contrats et le nombre de semaines nécessaires pour son exécution. Pour avoir une mesure le plus objective possible, la période considérée débute avec la date d'octroi du contrat et se termine avec l'approbation des plans et devis par le comité exécutif. Pour des fins de calcul, une semaine de travail de 40 heures a été considérée.
Les délais de réalisation des travaux peuvent surprendre, tout comme le montant de la facture. C'est le cas d'un contrat réalisé par Les Consultants SM en 2008. Le 23 octobre 2008, le comité exécutif de la Ville de Saint-Jean accorde à la firme de génie-conseil un mandat de 89 500 $ pour la réalisation des plans et devis d'infrastructures sur l'île Sainte-Thérèse.
À peine trois semaines plus tard, le comité exécutif approuve les plans et devis. En exactement 15 jours ouvrables, Les Consultants SM ont obtenu le contrat, choisi l'ingénieur, démarré les travaux, réalisé le mandat sur le terrain, rédigé le rapport et remis le document à la Ville, qui l'a approuvé.
Après avoir fait une demande d'accès à l'information auprès de la Ville de Saint-Jean, Le Devoir a appris que ce contrat a été réalisé par un seul ingénieur senior. En prenant comme base comparative une facturation de huit heures par jour et 40 heures par semaine, on arrive à un tarif horaire de 746 $.
Les Consultants SM sont une grosse firme de génie-conseil au Québec, qui oeuvre beaucoup dans le milieu municipal. L'actionnaire majoritaire est Groupe SM, un holding québécois qui a différentes divisions, notamment SM International, qui oeuvre à l'étranger.
De gré à gré avec BPR
Quant à BPR, c'est une firme très présente dans les municipalités de la Montérégie, notamment dans les projets concernant l'assainissement des eaux ainsi que la gestion de l'eau potable. Aussi, BPR a fait régulièrement les manchettes depuis deux ans pour son implication dans le scandale des compteurs d'eau à Montréal.
Dans le dossier de Saint-Jean-sur-Richelieu, BPR a reçu un mandat du conseil municipal le 16 février dernier pour un projet dans le secteur de Saint-Athanase Sud. Il s'agissait de faire les plans et devis pour des infrastructures. En quatre semaines, soit le 13 mars, tout était complété. Ce contrat de 368 000 $ équivaut à un tarif horaire de 2300 $ l'heure.
Saint-Jean-sur-Richelieu a invoqué le fait que le processus avait débuté avant juin 2002, c'est-à-dire avant que le gouvernement du Québec établisse de nouveaux critères d'adjudication de contrat pour la fourniture de certains services professionnels, pour octroyer le contrat de plans et devis de gré à gré.
L'origine du contrat remonte d'ailleurs à janvier 2001, soit quelques jours avant la fusion de la municipalité de Saint-Athanase avec Saint-Jean-sur-Richelieu. Le conseil municipal de Saint-Athanase accordait alors un contrat d'études préliminaires à l'entreprise Enviraqua. Cette première phase du projet s'est faite sans appel d'offres public compte tenu du fait qu'Enviraqua avait offert gratuitement son expertise à la petite municipalité pour faire l'estimation du projet.
En 2003, la firme BPR a avalé Enviraqua, et par la même occasion son expertise. Cette fusion a servi de prétexte à BPR pour convaincre la municipalité de Saint-Jean de lui octroyer le contrat de plans et devis du projet sans appel d'offres. La Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu a été incapable de fournir des détails quant au nombre d'ingénieurs ou de techniciens qui ont travaillé sur ce projet puisque aucune soumission n'a été déposée.
Le 6 juillet, le conseil municipal lançait officiellement ce chantier de 7,8 millions de dollars en accordant le contrat de construction à l'entrepreneur P. Baillargeon. À la même date, BPR a obtenu le mandat de surveillance des travaux, un autre contrat s'élevant à 289 000 $ avant taxes.


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