Retour sur la loi 21

Regard sur l'actualité

L'écologie a remplacé le christianisme

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Tribune libre

Les laïcardises


J’aurais souhaité que le premier projet de loi du gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ) porte sur la réforme électorale, au lieu de débattre de laïcité déjà réalisée pour l’essentiel depuis une cinquantaine d’années, avec la sécularisation des domaines de la santé et de l’éducation et le recul généralisé de l’influence de l’église catholique sur la vie des québécois. En outre, après la dégelée subie par le Parti québécois et sa charte des valeurs, j’aurais cru que le gouvernement caquiste se tiendrait loin des dérives identitaires. Les dernières « laïcardises » autour de la loi 21 sont d’ailleurs partielles et partiales, en plus d’être contestables en droit. Partielles : elles ne couvrent que certains employés de l’État avec des exceptions notoires. Partiales : elles ciblent les musulmans, surtout les femmes musulmanes,


Nonobstant un certain malaise pour le voile intégral (burqa), car dans notre culture, seuls les bandits détrousseurs de banque du Far West et les casseurs de manifestations pacifiques se voilent le visage en public. Une personne majeure, et la majorité au Québec est fixée à 18 ans depuis 1972, devrait être libre de sa personne, de ses croyances, de sa tenue vestimentaire entre autres, en autant bien sûr que les règles de bienséance soient respectées. Vivre et laisser vivre en somme.


Par ailleurs, c’est un peu illusoire de penser que la loi 21 met un terme à la question religieuse au Québec. Que fait-on de notre immense patrimoine religieux  mis en place dès la fondation de la Nouvelle-France ? À qui incombe sa sauvegarde ? Quel est le rôle des paroissiens qui ont constitué et payé ce patrimoine ? Face à cet héritage, l’État québécois peut-il véritablement être neutre et totalement laïc ? D’une part, de fortes pressions sont exercées sur l’État québécois pour qu’il assume la conservation du patrimoine religieux et en même temps, obligation lui est aussi faite par certains inquisiteurs des temps modernes d’être neutre en matière religieuse. La quadrature du cercle.


Historiquement, le copinage entre le pouvoir politique et le religieux n’est pas récent et constitue un maillon de notre identité. Lorsqu’il s’est échoué à la pointe de Gaspé sans trop savoir où il mettait les pieds, Jacques Cartier a pris possession d’un continent en plantant une croix aux armoiries du roi de France, sous le regard ahuri des amérindiens qui sillonnaient le territoire depuis des millénaires. Or le Christ et son enseignement n’ont rien à voir avec l’appropriation et la gestion de territoires. Bien avant Cartier, l’empereur romain Constantin au IVè  siècle de notre ère avait jeté les bases de ce copinage incestueux entre État et religion. L’évangélisation des Amériques s’est faite la croix d’une main et le crucifix dans l’autre ; notre terre est devenue chrétienne. La reconfiguration entre le politique et le religieux n’est pas terminée, peu s’en faut.


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La nouvelle religion


La propagande vertueuse autour des changements climatiques, la nouvelle religion, a son clergé, sa liturgie et ses anathèmes, comme si on venait d’inventer la roue. En 1972, il y a bientôt près de 50 ans, le Club de Rome publiait son manifeste intitulé Les limites à la croissance, traduit en français par l’interrogation - Halte à la croissance ?, connu également sous le nom de rapport Meadows. Le groupe de réflexion réunissant des scientifiques, des économistes, des fonctionnaires nationaux et internationaux, ainsi que des industriels de 52 pays, sonnaient déjà l’alarme sur les problèmes complexes auxquels doivent faire face toutes les sociétés, tant industrialisées qu'en développement.


La réflexion s’est poursuivie et enrichie au cours des ans avec l’émergence d’une conscience planétaire sur les enjeux environnementaux et les conséquences de l’activité humaine sur les variations climatiques, une étape cruciale vers des changements de paradigmes économiques durables. Mais si l’Humanité veut avoir un effet un tant soit peu significatif sur le climat, il faut une action concertée des 195 pays de la planète. Autant parler à court terme d’une utopie, d’une vue de l’esprit, car les besoins socioéconomiques et le niveau de développement des uns et des autres pays ne sont pas les mêmes.


Exemple 1. Le gouvernement québécois aura beau se fendre en quatre pour atteindre ses objectifs de réduction des gaz à effet de serre en tablant sur l’hydro-électricité, si l’Alberta continue de développer à plein régime le pétrole des sables bitumineux avec l’appui d’Ottawa, le résultat pour ces deux provinces sera au mieux nul et plus vraisemblablement négatif. Et il ne s’agit que de deux provinces  d’un même pays. Qu’en est-il des autres provinces et des autres pays ?


La coopération sans ou sous contrainte (?) entre tous les pays est la clé de voûte pour un éventuel impact sur le climat de la Terre, bien que celui-ci connaisse des cycles de variabilité qui se comptent en milliers voire en millions d’années. Or, notre système économique axé sur la concurrence et le profit, qui incite à la consommation, pousse la production à la hausse pour répondre à cette demande accrue en exerçant une pression croissante sur les ressources, ne facilite pas la transition. La mesure de la santé de nos économies est le produit intérieur brut (PIB). Quand la croissance est manifeste, tout va bien. Quand la stagnation s’installe à demeure, c’est l’inquiétude généralisée. Quand le PIB décroît, c’est la récession avec son cortège de maux socioéconomiques : report des investissements, chômage, moins d’argent dans les coffres de l’État et restriction dans l’offre de services publics, déflation des prix et des valeurs… Pourtant, il n’y aura pas de changement profond et durable sans remise en question des modes de consommation, de production et de distribution actuels.


Exemple 2. L’impact de l’activité humaine sur le climat étant assez bien établi aujourd’hui, le défi colossal est d’établir et de coordonner les mesures pour arrêter la surchauffe. On peut imaginer toutes sortes de mesures des plus triviales aux plus fondamentales. Pourquoi produire 12 marques différentes de laveuses et de sécheuses qui ont toutes pour vocation en principe de laver et sécher le linge ? Pourquoi pas une seule marque de laveuse et de sécheuse garanties 25-30 ans avec possibilité de remplacer les pièces défectueuses en cours de garantie ? Pourquoi produire autant de catégories et de marques d’automobiles dont la vocation est de déplacer le ou les propriétaires du point A au point  B ? Pourquoi ne pas produire quelques prototypes durables et fiables…? On peut généraliser cette idée à une foule de biens de consommation.


En d’autres mots, pourquoi ne pas mettre en commun les ressources et les capacités industrielles pour produire de la durabilité et de la qualité – en exerçant ainsi moins de pression sur les ressources et en générant moins de déchets –  au lieu de produire des biens de consommation qui se copient plus ou moins les uns les autres, qui deviennent obsolètes avant l’heure et qui génèrent des montagnes de déchets industriels ? C’est tout un programme politique et socio-économique qui ne se fera pas en claquant des doigts et qui ne peut se passer de l’adhésion et de la collaboration de tous.  


Exemple 3. Justement, cette collaboration n’est pas acquise d’emblée. Les accusations ou les admonestations, les imprécations et les incantations « climato hystériques »  n’apporteront pas une plus value significative. En 2018, il s’est vendu au Québec 17 500 véhicules électriques et hybrides neufs contre un peu plus de 450 000 véhicules à essence (Protégez-vous de janvier 2020). Ces choix individuels ont une incidence sur l’environnement. Avant que tout un chacun s’enligne sur une perception commune, des objectifs  et des faits et gestes environnementaux communs, il faut laisser le temps au temps de faire son œuvre en adoptant au besoin des mesures fiscales appropriée, cohérentes et soutenues ! En fait de cohérence, peut-on maintenir 43 milliards $ de subventions aux industries canadiennes du gaz et du pétrole ? (Québec Science, décembre 2019, dans le dossier – Malade de plastique.)


Exemple 4. La récente et brève grève des cheminots du Canadien national (CN) a montré un côté fragile de notre économie. D’un côté, Hydro-Québec a des surplus que la compagnie cherche à exporter hors de nos frontières, de l’autre des agriculteurs et certains autres secteurs de notre économie dépendent du propane et autres dérivés des énergies fossiles. Qu’est qu’on attend pour accroître notre indépendance énergétique à partir de nos ressources renouvelables ?


Exemple 5. Il pleut des dollars ($) sur la capitale nationale, beaucoup de dollars, des milliards de dollars $, assez pour faire tourner la tête à nos dirigeants alléchés par des projets d’infrastructures très importants : un tramway, un troisième lien, la mise à niveau de l’usine de traitement des eaux usées et de l’incinérateur de la ville, la bio méthanisation des déchets organiques etc. Dans tous ces projets, les mesures d’économie verte avoisinent sans les déclasser celles plus traditionnelles de l’autoroutier. Parce que l’économie va bien et que l’État québécois engrange des surplus appréciables, on semble oublier les impacts budgétaires à long terme. Si on ajoute des actifs au parc existant, il faudra demain en faire l’entretien à grand frais et éventuellement les remplacer. Et l’économie peut aussi connaître des ratés, se contracter, tomber en récession.


Selon l’économiste anglais John Maynard Keynes (1883-1946), en période économique faste on en profite pour payer ses dettes en tout ou en partie et on investit en période de récession. Actuellement, les investissements se succèdent sans relâche, créant des conditions inflationnistes potentielles, l’immobilier en étant un exemple patent. Cette situation peut mener au retour de l’évangile du déficit zéro, une réaction prévisible des gouvernements qui fera mal encore une fois aux secteurs les plus fragiles de nos économies. Ce ne sera pas possible d’échapper à la réalité. 


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La perte du sens des responsabilités


Lac-Mégantic. Un convoi de 72 wagons-citernes transportant 7,5 millions de litres d’hydrocarbure, remorquées par 5 locomotives, arrive à Nantes, le matin du 6 juillet 2013. Le train s’immobilise sur la voie ferroviaire principale, au sommet d’un dénivelé de 100 mètres (300 pieds). Un incendie se déclare dans la locomotive de tête. Les moteurs sont éteints et par le fait même les freins hydrauliques sont désactivés. Laissé sans surveillance après l’incendie, sans freins manuels suffisants, le train dévale la pente, détruit le centre ville de Lac-Mégantic et fait 47 morts. Curieusement à ce jour, personne n’a été reconnu coupable ou responsable de cette tragédie. Un autre «Act of God» sans doute ? Et qu’en est-il des hydrocarbures déversés dans la Chaudière ? Récupérés, disparus ou volatilisés ?


La saga des traversiers. Les déboires des traversiers entre les rives nord et sud dans le Bas-Saint-Laurent sont ahurissants. On pourrait en rire s’ils étaient sans incidences sérieuses sur l’économie régionale et les finances publiques. Il faut être une société riche pour se permettre de telles dérives. Comment se fait-il qu’on ne sache pas ou qu’on n’arrive pas à négocier des contrats avec un partage de risque équitable entre les partenaires ? Que penser de la compétence de ceux qui ont eu cette responsabilité ?  Ne faudrait-il pas imposer aux principaux acteurs concernés des cours de rattrapage obligatoire à l’École nationale d’administration publique (ÉNAP) ?


Le vol des données chez Desjardins. C’est tout à fait invraisemblable qu’un organisme financier de la taille de Desjardins n’ait mis en place les pare-feu et outil de contrôle interne sur les millions de données que la coopérative détient. En conséquence, les membres de Desjardins ne devraient avoir aucune démarche à entreprendre auprès de qui que ce soit pour préserver leur identité. Cette responsabilité incombe totalement à la haute direction de Desjardins. Alors que la coopération entre les différents acteurs économiques est des plus vitales pour réaliser les changements qui s’imposent, les déboires de la coopérative financière jette une ombre majeure sur tout le mouvement coopératif. C’est une catastrophe dont les coopérants de Desjardins se seraient bien passés, même si peu d’entreprise d’envergure échappe aujourd’hui au vol d’identité de leurs commettants, une bien piètre consolation pour ce fleuron de l’économie québécoise.


Les négociations  du secteur public. La  table est mise pour un autre sociodrame insipide dans les négos du secteur public. Octroyer 7 % en 5 ans est pure provocation, quand l’inflation caracole autour de 2,2 % par année. Certes, les finances  et les budgets de l’État ne sont pas élastiques à l’infini, mais la négociation irait rondement si les réclamations à incidence monétaires se calquaient au moins sur l’inflation, tout en accordant les précieuses ressources additionnelles pour de meilleurs services publics et soulager le personnel en poste. Ce serait aussi une bonne habitude à prendre que de ne pas nourrir les préjugés contre les employés de l’État autour des négociations.


Les dirigeants syndicaux des grandes centrales syndicales, qui sont aujourd’hui de véritables hommes et femmes d’affaires en gérant des milliards $ via le fonds des travailleurs, Fondaction pour la CSN, Fonds de solidarité pour la FTQ, devraient à l’occasion reprendre leurs chapeaux de syndicalistes et peser de tout leur poids pour faire évoluer les mentalités et pousser les négociations dans la bonne direction en veillant à ce que des situations pitoyables comme celle vécue par les retraités du Groupe Capitales Médias ne se répètent plus.


Il y aurait encore tant à dire.


Yvonnick Roy


Québec


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