Quelle est la différence entre «nègre» et Canadien français?

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Tribune libre

J’ai eu l’occasion de parler avec une connaissance sur; la désignation de comment nous nommer. Je vous produit ici, la dernière phrase de son intervention ainsi que ma réponse.


« L'appellation Canadien français sert principalement à cela : distinguer le premier Congolais débarqué ici « plus Québécois que vous et moi » et le peuple de souche.»


Encore une fois, tu te trompes sur plusieurs niveaux.


1. Être Québécois veut justement dire ça: francophones, et de souche et/ou d'origine.  C’est aux autres de se joindre à nous.


2. Avec seulement 66% de descendance française au Québec, c’est pas une bataille qu’on peut gagner en se basant que sur la race ou l’ethnie. Avec le temps, nous perdons à ce jeu là;


3. En plus, un immigrant peut devenir Canadien ou Québécois; mais un immigrant ne peut pas devenir Canadien français ;


4. Ce n’est pas vrai qu’on doit se mettre sur les épaules le fait de repeupler tout seul le Québec en faisant plus d’enfants que n’importe autre peuple industrialisé du monde; en plus nous accueillons plus d’immigrants que nos naissances à chaque année;


5. Tu n’as pas en t’en faire, l’anglophone ne se considère pas Québécois, et la majorité des immigrants non plus; le terme est là que pour nous. C’est à nous d’occuper l’espace de ce nominatif, pas aux autres; À nous de vivre cette appellation.


6. Dans mes derniers écrits j’ai beaucoup chercher l’origine du terme canadien français et effectivement tout pointe vers la période entre 1818 et 1885 lorsque les Anglais nous ont baptisé ainsi. Ce n’est même pas une trouvaille venant de nous.



1818  Des généraux Anglais propose le truc, French Canadian;


1835 Lionel Groulx cité les données des fonctionnaires de l’époque et il parle bien d’Anglais et de Canadiens;


1837-38 Ce sont des Canadiens qui se battre contre les Anglais;


1840 Lord Durham introduit de façon officiel le terme «French Canadian» pour nous tasser de côté pour faire place aux Loyalistes qui, eux, deviendront des «Canadians»;


1861 Hector Beaudry dans son livre parle des 2 noms et il inter-change les 2 termes, une période charnières de changement de les appellations;


1867 Aucune mention dans la constitution;


1881 le Conseil nationale des Acadiens adopte le nominatif Acadien et rejette Canadien français;


1885, L’église demande aux Canadiens de se dire Canadien français en soutien à Riel, et il sera pendu quand même;


1891 Benjamin Sulte dans son livre, tente d’effacer l’histoire sur les milices et nomme faussement les 1er milices Canadiennes de Canadiens français à partir de 1760, ce qui est totalement faux.



Donc, il n’y a aucune gloire à s’accrocher à ce terme aussi dégradant que «nègre» un moins que rien, une sous classe de Canadien, un terme imposé par notre conquérant, l’Anglais. C’est pour ça que le bat blesse - ce n’est pas un nominatif choisi - ça va prendre plus de 65 ans à s’imposer au 19e siècle. Mais «Québécois» ça vient du peuple et ça pris moins de 10 ans à s’imposer.


Si tu veux te distinguer face au premier Congolais vaut mieux dire que tu es Québécois que de t’abaisser plus bas que lui en utilisant le terme péjoratif de conquis et soumis de Canadien français. En utilisant le terme Québécois, le Congolais va te respecter. En utilisant Canadien français, il te regardera…de haut car tu lui dis que toi, tu accepte d’être une sous-classe face aux Canadians et à lui, comme les Anglais de l’époque avaient aussi déduit en nous nommant des petits nègres blanc d’Amérique, les Canadiens français.


Pierre Vallières écrit dans l’introduction de son livre «Nègres blancs d’Amérique» ceci:


«Tuons Saint-Jean Baptiste! Brûlons le carton-pâte des traditions avec lequel on a voulu mythifier notre esclavage. Apprenons l’orgueil d’être hommes. Affirmons fortement notre indépendance.»


Voici comment il commence son livre:


Être un «nègre» ce n’est pas être un homme en Amérique, mais être esclave de quelqu’un. Pour le riche Blanc d’Amérique yankee, le «nègre» est un sous-homme. Même les pauvres Blancs considèrent le «nègre» comme inférieur à eux. Ils disent: «travailler dur comme un nègre», sentir mauvais comme un nègre», «être dangereux comme un nègre», être ignorant comme un nègre» … Très souvent ils ne se doutent même pas qu’ils sont eux aussi, des nègres, des esclaves, des nègres blancs.»


Un Canadien français est «né pour un p’tit pain», un Canadien français est «un porteur d’eau», un Canadien français écoute son maître, le conquérant anglais. C’est ici que les deux se rejoint, dans notre soumission devant le maître.


Ce n’est pas un hasard que le peuple s’est retrouvé avec une appellation composé pour l’isoler du restant, les vrais «Canadians».


C’était voulu pour nous abaisser. Des citoyens de deuxième rang avec un nominatif bien distinctif pour se rappeler que nous étions pas de vrais «canadiens», seulement une version édulcoré de la volonté des Anglais.


_______________________



Les Français de la Nouvelle-France qui devient le Canada choisissent le terme «Canadiens» pour se désigner; Les Français du Nouveau-Brunswick choisissent le terme «Acadien» et rejette le terme Canadien français; Les Anglais choisissent, pour nous désigner le terme «French Canadian» et nous sommes tellement soumis et conquis qu’on prend même la peine de le traduire pour eux en «Canadien français»!


Les valeurs peuvent varier d’un être humain à l’autre. Qu’est-ce qui est constant est l’exploitation de un par l’autre. Être de droite, être de gauche n’a pas d’importance. C’est plutôt secondaire. L’importance est d’avoir un lieu pour que l’action politique, sociale et économique puisse s’exprimer. Des pouvoirs divisés comme le Canada pratique, ne permet pas aux Québécois de pratiquer le même pouvoir sur lui-même.


Nous en sommes encore à déterminer le nom que nous allons nous nommer pour l’avenir, alors que le monde, lui, continue sans nous.


Nous avons déjà l’histoire, sur lequel se baser, pour savoir comment nous nommer. Revenir sur un nom du passé qui n’a pas réussi à faire ses preuves, devrait, être laisser dans le passé pour toutes les raisons que je viens d’énumérer.




source:


Les Nègres blancs d’Amériques, Pierre Vallières, publié en 1968 aux Éditions Parti pris.



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3 commentaires

  • François Champoux Répondre

    6 juillet 2023

    Merci, M. Bélair, de votre bonne compréhension de ma réflexion; elle n’est pas la vérité, mais une recherche de celle-ci.


    Je pense finalement que pour devenir un pays, les Québécoises et les Québécois devront voter OUI à plus de 75% à un référendum sur la souveraineté du Québec : les francophones avec les anglophones, les autochtones et les allophones; ce pourcentage aurait pu être atteint si Robert Bourassa avait été un politicien audacieux et courageux; il ne fut qu’un manipulateur sans foi, même pas un homme de pouvoir. Ma fierté n’attend plus ce moment; il y a maintenant d’autres priorités…


    François Champoux, Trois-Rivières, au lendemain d’un vote des politiciens locaux en faveur d’une continuation de la destruction des milieux humides de la ville!


  • François Champoux Répondre

    4 juillet 2023

    Bonjour M. Bélair,


    Je réalise aujourd’hui, et ce, plus que jamais, que nous sommes manipulés : nous sommes politiquement manipulés, écologiquement manipulés, économiquement manipulés, spirituellement manipulés, etc. Le manichéisme nous obsède : le bien et le mal nous font vivre en permanence dans le doute. Vivons-nous? Oui, nous vivons dans un doute, nous vivons dans le doute : nous doutons tout le temps. C’est le propre de l’humain.



    Oui, quelle question existentielle que la vôtre?



    En 1976, lors de l’élection du PQ, j’ai ressenti un vrai sentiment de fierté : j’ai eu ce sentiment très fort que nous (les «petits» Québécois), maintenant, nous existions! Comme si avant ce moment historique, nous survivions sans vraiment «être». Qu’avant l’élection de ces politiciens indépendantistes (mes politiciens à moi), nous étions pour disparaître comme «peuple français», francophone! 



    Mon nationalisme était exacerbé : il fallait se sauver, sauver notre peuple, le sauver de l’assimilation, de la mort : c’était vraiment une question de vie ou de mort. La manipulation que le discours politique avait réussi à m’inculquer, à inculquer fortement dans mon cerveau, dans mon esprit, c’était celui-là : le «Québec libre» était une question existentielle de vie ou de mort. La «fierté» d’être une «identité politique» était vitale! Sans cette étiquette politique acquise une fois pour toutes, je n’étais pratiquement rien; à nouveau et éternellement conquis, peuple perdant, peuple esclave à jamais.



    Le respect (l’amour que nous devons nous porter, toutes et tous, individuellement) m’est alors apparu comme l’essentiel, l’essence vitale de tout être, de tout étant. Il n’y avait plus de discours politique : je devais me respecter dans mes talents, mon être, mes capacités de personne, au-delà mon identité politique. Autant avec mes failles, mes lacunes, mes vices, que mes attributs. Je n’étais plus ou je n’étais pas le PQ, ou un parti politique : j’étais une personne d’abord, et finalement une personne, un individu : une personne qui ne se divise pas, point. Je n’étais pas un gang!



    Cette pénible découverte de mon individualité personnelle, cette difficile prise de conscience m’a bousculé dans mes convictions à en rester pantois : ma fierté est devenue de l’orgueil! Et quand on me traite aujourd’hui d’orgueilleux, je suis insulté, blessé! Comme n’importe qui, aujourd’hui, maintenant, lorsqu’on m’insulte je bombe le torse! J’aime l’humilité comme vertu, mais je déteste l’humiliation. Et je pense à ma mère qui m’a tellement incité à développer mes talents, ma personnalité, à marcher droit, la tête haute, à regarder le faîte des arbres comme lui avait enseigné sa tante Louisiana, etc. à être fier de moi, de mes réalisations, de mon actualisation. Oui, j’en demeure pantois!


    Et je place devant moi tous ces «grands» nationalistes et je les regarde dans les yeux afin de les interroger : «Étiez-vous sincères et en même temps, trop sincères dans vos convictions?»



    Je suis indépendantiste dans l’âme, mais je m’interroge sur le nationalisme : est-il un danger?



    Oui, dans mon âme de québécois, je suis indépendantiste : c’est à cause de ma langue parlée, le français. Mais devrais-je mourir pour elle? NON!



    Je refuse de mourir à cause des autres qui m’humilient, mais je refuse aussi de mourir pour une cause qui me fait perdre l’équilibre du bon sens. Et alors je pense à ces bouddhistes et leur vérité que rien n’est permanent; et je pense à ce Darwin qui m’a prouvé que la vie est un combat… 



    Je réalise de plus en plus que l’Humain n’est qu’un animal comme les autres; il n’est pas d’essence divine ni diabolique d’ailleurs. La raison doit toujours se marier avec l’émotion afin de tenter de maintenir cet équilibre précaire.



    Je n’ai pas de titre, ni docteur, ni philosophe, ni sociologue; je n’ai donc aucune reconnaissance; je suis seul à me sauver… (encore ma mère qui comme Socrate, qui n’a rien écrit, mais m’a tout enseigné par ces courtes réflexions issues des épreuves de sa vie)



    Le débat sur notre émancipation en pays du monde devient de plus en plus émotif et, il faut le dire, dangereux; les politiques fédérales sont grandement responsables de cet état de fait. Mes nos politiciens d’antan ont aussi leur part de responsabilité. Et nous dans tout ça, ne voulons-nous pas vivre en paix et non en guerre? Moi je choisis maintenant la paix et je demande à mes politiciens de faire leur travail en ce sens et celui du respect des gens de toute allégeance et provenance. Je refuse la radicalité afin d’assurer aux générations suivantes ce respect de leur être. 



    Il faut sortir de cette ornière infernale qui depuis des siècles nous enferme dans de viles considérations de vie : l’existence doit nous sortir de la peur de l’autre parce qu’il est différent de nous. Si nous sommes si fins que ça, il faut apprendre de nos erreurs, des erreurs de nos ancêtres aussi grands furent-ils.



    Je pense ça de ce débat sur le «Québec Libre», ce coin de «pays» abandonné d’antan par ceux-là mêmes qui sont la source de notre existence. Oui, c’est ce que je pense maintenant.



    Merci de m’avoir mis en face de ce débat qui ne cesse de vivre en nous; je veux cesser de chanter du "négro spiritual".


    François Champoux, Trois-Rivières


    • Normand Bélair Répondre

      5 juillet 2023

      Bonjour M. Champoux,
      Je vous remercie sincèrement de partager votre réflexion. C'est libérateur de vous lire.
      Normand Bélair