Pourquoi faire la souveraineté?

Tribune libre


Récemment, j’ai invité mon amie tunisienne à un événement organisé par le
Nouveau mouvement pour le Québec (NMQ). Rappelons que le NMQ est un
mouvement citoyen né à l’été 2011 et visant à faire la promotion de
l’indépendance du Québec. Étant peu renseignée sur la question nationale,
mon amie m’a demandé : « Pourquoi faire la souveraineté? » Bizarrement,
j’ai réalisé que la réponse à cette question toute simple n’est presque
jamais abordée par les élus péquistes et solidaires, qui se disent pourtant
souverainistes. Seul Option nationale ose discuter de l’essence même du
projet d’indépendance, en se donnant pour mission de faire la pédagogie de
la souveraineté. Cet aspect pédagogique m’apparaît pourtant fondamental
pour la cause, sinon comment les nouveaux arrivants pourront-ils
s’approprier la question nationale? Donc, pourquoi faire la souveraineté?
Parce que le Québec forme une nation distincte en Amérique du Nord ayant
une culture distincte et que cette culture pourra plus aisément préserver
sa spécificité dans un Québec pays. Ceci est d’autant plus important dans
un contexte de mondialisation, qui tend à homogénéiser l’offre culturelle.
En gérant nous-mêmes tous nos impôts, nous pourrons choisir combien
d’argent nous voulons mettre à la promotion de notre culture. Qui plus est,
un Québec indépendant pourra lui-même négocier ses accords économiques,
lesquels peuvent avoir des répercussions sur le plan culturel. Par exemple,
en octobre 2011, les parlementaires québécois n’ont pas été mis au courant
du contenu de l’accord économique et commercial global entre le Canada et
l’Union européenne, alors que cette entente peut grandement influencer les
politiques culturelles du Québec.
Pourquoi faire la souveraineté? Parce que la langue officielle des
Québécois est le français, et que la promotion de cette belle langue sera
renforcée dans un Québec pays. En effet, en votant nous-mêmes nos lois,
nous pourrons renforcer la loi 101, sans que le gouvernement canadien
puisse affaiblir celle-ci. Car force est de constater que la loi 101 a été
affaiblie par les jugements successifs de la Cour suprême du Canada, qui ne
reconnaît pas le droit collectif de la nation québécoise d’assurer sa
survivance dans cette Amérique du Nord anglo-saxonne. Par exemple, en 2002,
Québec a apporté des changements à la loi 101 en vue de mettre fin au
phénomène des écoles passerelles. Cette correction évitait que des élèves,
surtout allophones, intègrent le système public anglophone après un bref
passage dans une école anglaise privée non subventionnée. Or, un jugement
de la Cour suprême du Canada a déclaré que ces changements étaient
inconstitutionnels. Il est donc clair que dans un Québec indépendant, nous
serons plus à même de faire valoir nos droits linguistiques.
Pourquoi faire la souveraineté? Parce qu’en gérant eux-mêmes leurs impôts,
les Québécois pourront faire des choix budgétaires qui correspondent à
leurs propres priorités économiques. Car à l’heure actuelle, une partie des
recettes fiscales des Québécois est versée à l’État canadien, qui les gère
en fonction d’intérêts et d’objectifs déterminés par un parlement où nous
sommes de plus en plus minoritaires. À titre d’exemple, le gouvernement
canadien a investi 14 milliards de dollars dans le développement des
hydrocarbures (exploitation pétrolière des sables bitumineux de l’Alberta)
et quelque 6 milliards de dollars dans le développement du nucléaire en
Ontario, alors que zéro dollar n’a été investi dans le développement de
l’hydro-électricité au Québec. Dans le budget fédéral de l’année 2010, les
Québécois ont contribué pour près de 3 des 14 milliards dans l’industrie
automobile ontarienne, alors que le gouvernement canadien a investi un
maigre 100 millions de dollars dans la revitalisation de l’industrie
forestière québécoise. Ainsi, un Québec indépendant dépenserait 100% des
taxes et impôts en fonction des besoins du Québec.
Pourquoi faire la souveraineté? Parce qu’un Québec indépendant pourra miser
sur ses énergies renouvelables (ex. hydroélectricité, énergie éolienne) et
ainsi vendre des crédits de non-pollution dans le cadre des bourses du
carbone. Or, comme simple province, le Québec devra payer sa cote part de
la pollution canadienne, dont le développement est principalement axé sur
le pétrole de l’Ouest canadien. De plus, s’il signait lui-même ses accords
internationaux, le Québec aurait adhéré au Protocole de Kyoto, qui vise à
réduire les émissions de gaz à effet de serre. Or, en décembre 2011, le
Canada s’est retiré du protocole de Kyoto, affirmant être incapable de
respecter ses engagements. Alors que le Québec pourrait jouer un rôle de
leader mondial en environnement, il n’est actuellement pas en mesure
d’adopter des politiques environnementales conformément à ses valeurs.
Pourquoi faire la souveraineté? Parce qu’un Québec indépendant pourra
adopter des politiques étrangères en accord avec les valeurs des Québécois.
Ainsi, contrairement au gouvernement canadien, un Québec pays
privilégierait des actions diplomatiques plutôt que des politiques
militaristes. De plus, le Québec rejette la position canadienne concernant
le fait de s’impliquer dans la guerre en Afghanistan. D’autre part, un
Québec souverain pourra exercer les compétences qui sont actuellement
dévolues à l’État canadien dans le domaine du droit criminel. La
souveraineté permettra d’adopter un code pénal québécois, qui veillera à
lutter contre la criminalité par la réadaptation plutôt que la punition.
Le pourquoi de la souveraineté (et du fédéralisme) devrait ainsi être
discuté avec les nouveaux arrivants dans les classes de francisation. Car
l’intégration à une terre d’accueil, ce n’est pas uniquement de parler la
langue de la majorité, mais aussi de comprendre la culture et les enjeux
politiques de la société. C’est au mouvement souverainiste de faire en
sorte que les immigrants se sentent concernés par la question nationale, et
ce en allant à leur rencontre là où ils se trouvent. J’invite donc le parti
québécois et Québec solidaire à prendre exemple sur l’approche pédagogique
d’Option nationale et à exposer l’argumentaire souverainiste dans leurs
communications avec la population, et particulièrement avec la population
immigrante.


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4 commentaires

  • Pierre Cloutier Répondre

    16 février 2013

    L'indépendance politique d'un peuple, c'est exactement le contraire de sa dépendance à l'endroit d'un autre peuple.
    Quant à la "souveraineté" c'est un terme technique qui peut varier à l'infini - le Québec est souverain dans ses champs de compétence - et qui a été utilisé par les partisans de René Lévesque pour mieux faire passer son association avec le Canada.
    Pierre Bourgault, ne parlait jamais de souveraineté. Il savait, lui, ce qu'il voulait : l'indépendance de sa patrie.
    Tant et aussi longtemps qu'on aura pas le courage minimal de franchir cette simple étape psychologique du sens des mots, on va continuer à faire du sur-place.
    C'est ce que nous apprend 40 ans de "chouverainisme" péquiste. Et ce n'est pas fini.
    Pierre Cloutier

  • Archives de Vigile Répondre

    16 février 2013

    Pourquoi faire la souveraineté ou l'indépendance? Tout simplement parce que le Québec est une entité existante qui a l'obligation de s'autodéterminer pour assurer sa pérennité de la même façon qu'une personne est une entité existante qui à l'obligation de s'autodéterminer pour assurer sa pérennité. Autrement dit, si tu n'est pas capable de te gouverner toi-même, un autre s'en chargera à ta place. La différence est la LIBERTE DE VIVRE SELON TA NATURE, laquelle est le propre de L'HOMME. Pas besoin de chercher de midi à quatorze heures.

  • Daniel Roy Répondre

    15 février 2013

    Vous exprimez de bonnes raisons pour faire du Québec un pays. Si le site de la Coalitionsouverainiste.com fonctionnait encore, j'ajouterais vos raisons à l'argumentaire 1001 raisons pour que le Québec devienne un pays. Pour le moment, nous pouvons consulter l'argumentaire à l'adresse suivante : http://1001raisons.com/ , mais nous ne pouvons y ajouter des raisons. Nous pouvons aussi aimer la page Facebook qui en fait référence à l'adresse suivante: https://www.facebook.com/pages/1001-raisons-pour-que-le-Qu%C3%A9bec-devienne-un-pays/472882976060274 Je pense que le site n'est plus en fonction faute d'argent et d'implication.
    Je crois qu'une organisation patriotique devrait prendre en main l'argumentaire 1001 raisons pour que le Québec devienne un pays, afin d'y ajouter des raisons et d'en faire la promotion. Si cela vous intéresse, veuillez communiquer avec moi, ou avec les responsables du site de la Coalition souverainiste.
    Daniel Roy, CPA, CA

  • Pierre Cloutier Répondre

    15 février 2013

    À 68 ans, après plus de 50 ans de militantisme, j'en suis venu à détester le mot "souveraineté" qui a été galvaudé et rapetissé par les péquistes et les bloquistes qui en ont fait un simple mantra répété la main sur le coeur pour se déculpabiliser de ne pas être capable de mettre l'indépendance de la patrie au coeur et comme condition sine qua non de leur engagement politique. Ces gens-là en ont fait un mot superficiel vidé de toute substance. Vide comme une coquille vide.
    Tout cela finit par sentir le renfermé, le vieux yogourt "passé date", le vieux discours ennuyant et sans imagination, confisqué par les professionnels de la politique.
    Je ne suis plus capable de l'entendre pas plus que le mot "démocratie" que l'on nous sert continuellement pour décrire le système de gouvernement représentatif dans lequel nous sommes condamnés, comme si la démocratie, c'est-à-dire le pouvoir du peuple, par et pour le peuple ne pouvait se concrétiser que par l'élection et le suffrage universel.
    J'espère qu'on aura un jour l'intelligence de faire table rase du passé et d'utiliser des mots plus vibrants et plus dynamiques pour décrire notre désir de libération nationale.
    Que vive l'indépendance de la patrie et que vive la vraie démocratie citoyenne par le tirage au sort et une constitution écrite par et pour le peuple.
    Pierre Cloutier