ENTREVUE

Péladeau dans l’œil du cyclone

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Sa décision est prise

Le rendez-vous est donné dans le bureau du chef de l’opposition, Place Ville-Marie. Pierre Karl Péladeau est déjà là, un téléphone intelligent dans la main, les jambes croisées, le regard dans sa boîte de courriels. «Le téléphone sonnait davantage lorsque j’étais à Québecor», dit-il en riant.
Mais tout cela, c’était avant la semaine qu’il vient de vivre, où il s’est retrouvé dans l’œil du cyclone après avoir vivement dénoncé l’austérité du gouvernement libéral. Plusieurs y ont vu un travestissement de ses véritables idées, une tentative de se rapprocher de la base du Parti québécois. Sur sa véritable pensée économique, PKP reste nébuleux durant l’entrevue, mais il n’aime pas, de toute évidence, cette étiquette «d’homme d’affaires de droite».
État et solidarité
«On ne peut jamais interdire à qui que ce soit d’avoir ces appréciations. Est-ce que ces impressions sont exactes ou fondées, il y a lieu de s’interroger. Mais j’ai toujours pensé que le Québec a sa singularité et son histoire. Cela veut dire qu’il y a une présence plus importante de l’État, un sentiment de solidarité plus élargie qu’ailleurs en Amérique du Nord et que le gouvernement doit prendre en considération ces éléments-là», dit-il d’un ton posé.
Si certains pensent que Péladeau cultive les paradoxes, d’autres croient que sa pensée suit tout simplement son parcours. S’il était marxiste à l’UQAM, il est devenu pour plusieurs un patron impitoyable lors du lock-out au Journal de Montréal.
Croissance vs austérité
Sa sortie contre l’austérité cette semaine a d’ailleurs provoqué l’hilarité de François Legault, le chef de la CAQ, qui lui a rappelé la série sur les finances publiques «Québec dans le rouge» publiée dans ses journaux, où les reportages prônent une cure de minceur à l’État québécois.
Aujourd’hui en politique, il se fait traiter à la fois de gauchiste et de «capitaliste agressif».
«Est-ce que nous devons être attentifs, comme collectivité, à nos finances et à leur assainissement? Oui, certainement. Est-ce qu’on est obligé d’appeler les pompiers s’il n’y a pas d’incendie? C’est une autre paire de manches», dit-il.
Péladeau affirme donc qu’il serait davantage le candidat de la croissance, moins celui des coupes dans les dépenses. «Il faut aider les PME, ça prend des projets porteurs comme l’électrification des transports, le développement de nos ressources naturelles», soutient-il.
Sur un autre sujet chaud, le pétrole, le porte-parole péquiste en matière d’Économie est aussi pour, mais Québec doit en retirer des bénéfices et adopter le même «modèle hybride» qu’avait choisi le gouvernement de Mme Marois.
«Plutôt que d’acheter et d’enrichir les actionnaires, on a participé à la capitalisation de l’entreprise», affirme-t-il.
Profession souverainiste
Malgré les tourments qu’on lui a prêtés, Péladeau affirme ne pas avoir trop ressenti le vertige avant de se lancer en politique. «Le Canada et tous les pays occidentaux ont atteint un niveau de maturité politique suffisant pour respecter les choix politiques de tous. On peut le constater avec ce qui s’est produit en Écosse. Nous constatons que le citoyen se sent de plus en plus éloigné du processus décisionnel. Il n’y a donc rien de renversant à être en faveur de la détention de l’ensemble des leviers et outils nécessaires à son développement, à sa prospérité et au maintien de son identité et de sa singularité.»
Il revient ensuite sur la déclaration du financier Stephen Jarislowsky, qui affirme qu’il serait indépendantiste si le Québec était plus riche. «À plusieurs égards, il a raison. Mais le Québec s’est enrichi au cours des 50 dernières années, M. Jarislowsky en est un bon exemple. Il doit gérer 60-70 milliards $… Nous avons aussi la Caisse de dépôt, le Fonds de la FTQ. On a un bassin de capital très important», assure-t-il.
Pointant l’Allemagne comme exemple à suivre pour le Québec – même si le pays d’Angela Merkel n’avait pas de salaire minimum jusqu’à tout récemment –, il affirme avec un petit sourire.
«C’est préférable d’être riche que d’être pauvre. C’est aussi vrai pour un individu que pour une nation», conclut-il.


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