Ottawa a donné refuge à des milliers de criminels de guerre nazis

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Des centaines d'Ukrainiens membres de la SS ont été accueillis au Canada


Complétons cette trilogie de blogues sur les criminels de guerre en parlant du Canada. Des milliers d’entre eux ont été accueillis ici par les autorités fédérales. Ottawa a reconnu en 1997 avoir permis en 1950 à plus de 2000 membres de la 14e division Waffen-SS ukrainienne, la division «Galicie», de s’établir au Canada à la demande de Londres qui n’en voulait pas en Grande-Bretagne.  


Les SS ukrainiens servaient avec des escadrons d’extermination nazis (Einsatzgruppen) et des unités de police militaire allemande qui combattaient des groupes de partisans. Le Canada affirmait avoir reçu des assurances des Anglais que les SS ukrainiens n’avaient pas participé à des crimes de guerre. Ce que soutient également la communauté ukrainienne qui les considère comme des «combattants de la liberté». Des documents publiés depuis indiquent que les Britanniques n’avaient effectué aucune enquête sur leurs faits d’armes. 


À l’émission 60 Minutes de la CBS diffusée le 2 février 1997, on affirmait qu’environ 1000 SS et collaborateurs nazis originaires des États baltes s’étaient aussi installés au Canada. Dans le reportage intitulé Canada’s dark secret (le secret honteux du Canada), il a été révélé qu’un journaliste d’enquête israélien qui se présentait comme un chercheur universitaire avait obtenu les confidences et aveux de 58 criminels de guerre d’Europe de l’Est, dont sept avaient reconnu avoir tué des Juifs. Vingt-cinq d’entre eux vivaient dans la région de Montréal. 


Lors de l’émission de télévision allemande Panorama, on rapportait à la même époque que 1882 criminels de guerre allemands établis au Canada recevaient des «pensions de victime» de l’État allemand. Bien qu'une loi allemande interdise aux criminels de guerre de toucher de telles pensions, la loi n'était pas appliquée au Canada pour des raisons inexpliquées. 


Presque tous ces criminels de guerre et collaborateurs, il faut le souligner, ont vécu ouvertement au Canada sous leur propre nom pendant plus d’un demi-siècle avant de s’éteindre paisiblement entourés de leur famille et de leurs proches. 


Malgré les demandes répétées des organisations juives, le premier ministre Pierre-Elliott Trudeau a toujours refusé d’ouvrir des enquêtes et de poursuivre les criminels de guerre établis au Canada. Irving Abella, professeur d'histoire à l'Université York de Toronto a révélé que Trudeau s’était justifié devant lui en disant que cette question des criminels de guerre transporterait au Canada les antagonismes du Vieux Monde ajoutant que des poursuites contre des criminels de guerre exacerberaient les tensions entre les Européens de l'Est et les Juifs au Canada. Les libéraux fédéraux reçoivent l’appui politique de ces deux communautés. 


Le jeune Pierre Trudeau n’était pas exactement un va-t-en-guerre pour ce qui est des conflits du Vieux Monde. En 1942, dans un discours appuyant le candidat anti-conscription Jean Drapeau, Trudeau dénonça la «malhonnêteté dégoûtante» du gouvernement libéral de Mackenzie King pour avoir déclaré la guerre à l'Allemagne en 1939. 


C'est le gouvernement conservateur de Brian Mulroney qui a eu le courage de mettre sur pied, le 7 février 1985, la Commission d'enquête sur les criminels de guerre, présidée par le juge Jules Deschênes. La commission accouchera cependant d’une souris. Des mesures judiciaires seront prises dans une vingtaine de cas sur les 774 suspects de la liste maîtresse de la commission qui n’a rendu publics qu’une partie de ses travaux. La pratique courante a été suivie. Quelques criminels de guerre ont été expulsés vers leur pays d’origine plutôt que traduit devant les tribunaux et jugés au Canada. On s’en lave les mains. Bons débarras! 


Le Canada a donc été un havre de paix pour des criminels de guerre nazis particulièrement ceux originaires d’Europe orientale qui bénéficiaient du soutien actif et de la complicité d’une frange nostalgique significative de certaines communautés culturelles de Montréal et de Toronto. 


Le professeur John-Paul Himka de l'Université de l'Alberta et oncle de la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, a été mis au ban de la communauté ukrainienne pour ses recherches sur la participation de l'Ukraine à l'Holocauste. Il a déclaré au National Post : «Il est temps que quelqu'un y prête attention. [...] Le fait est que le gouvernement ukrainien et la diaspora honorent des participants à l'Holocauste et des criminels de guerre depuis longtemps.»