Pub made in Canada

On vous dit ce que vous êtes

Cette névrose identitaire atteint aujourd’hui des niveaux comparables aux pratiques publicitaires de certains États totalitaires du Tiers-Monde ou encore celles des États en guerre de la Deuxième Grande (39-45).

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Tribune libre

Vers qui sont dirigées les émissions et publicités en langue anglaise diffusées localement au Québec? Les publicitaires du Canada anglais attaquent tous les marchés provinciaux d'une même campagne. Le discours publicitaire s'adresse à un auditoire adepte d'une identité. Il n'adapte pas la version anglaise de son message diffusé au Québec, contrairement aux messages traduits ou crées en parallèle s'adressant à l'auditoire francophone. Le même message utilisant l'adjectif «Canadian» dans sa version anglaise, utilisera celui de «Québécois» dans sa version française. Même chose pour «in Canada» qui sera remplacé par «au pays» en français.
Donc, la publicité qu'un québécois anglophone visionne nourrit une vision identitaire différente de celle de son concitoyen francophone. Les publicitaires de Toronto, à la source des campagnes pancanadiennes, teintent généreusement leurs messages de fierté et d'identité canadienne. Il n'est pas rare de voir aujourd'hui de telles publicités faire mention trois à cinq fois des mots «Canada», «canadian», «we», «proud», dans un message de 30 secondes. Il est d'ailleurs étonnant de voir comment cette teinte nationaliste dépasse maintenant de loin celle qui a longtemps été d'usage aux États-Unis. Cette névrose identitaire atteint aujourd'hui des niveaux comparables aux pratiques publicitaires de certains États totalitaires du Tiers-Monde ou encore celles des États en guerre de la Deuxième Grande (39-45).
Le renforcement identitaire national est donc fortement employé en publicité. Et cette identité affiche un visage à une partie des citoyens du Québec et un autre à une autre partie. Elle vient renforcer le sentiment d'attachement du québécois anglophone au Canada. Ces publicités, en apparence innocentes, creusent de façon sournoise le fossé entre concitoyens du Québec. Elles contribuent à aliéner le sentiment d'appartenance des anglophones d'ici et renforcent le terrain au refus de toute autre identité nationale. Elles contribuent à leur modeste façon à construire un radicalisme hostile à une identité québécoise compétitrice. Voilà donc comment en toute innocence les agences publicitaires de Toronto contribuent à leur façon à creuser un fossé entre concitoyens du Québec. Elles travaillent contre la solidarité et la paix future entre anglophones et francophones du Québec. Cette influence naïve ne peut que nourrir les difficultés d'intégration des anglophones dans un futur Québec indépendant.
Les médias anglophones d'ici sont écrasés par le discours issu de Toronto. Le poids des campagnes externes s'accaparant les ondes d'ici est tel qu'entreprises, agences et gouvernement d'ici cherchent par réflexe à créer des versions anglaises de leur publicité, lorsque le bassin de population locale justifiant de telle mesure est faible. De façon tout-à-fait sournoise donc, les agences publicitaires de Toronto contribuent à détruire la solidarité entre citoyens québécois. Un néo-québécois anglophone branché sur les chaînes locales de langue anglaise est bombardé d'une propagande identitaire «canadian». En contrepoids, il ne reçoit aucun appel médiatique susceptible de créer chez lui un sentiment d'appartenance au Québec.
Voilà l'importance cruciale donc de voir à ce que les contenus et messages publicitaires sur les chaînes anglophones du Québec soient le plus «local» possible et possèdent les moyens de substituer les ondes de Toronto par du contenu local qui prend mieux en compte le contexte du Québec.
Loin de ce faire, car même les publicités en langue française sont de plus en plus truffées de slogans identitaires «canadian», étant produites d'abord pour le Canada anglais et simplement traduites. Autre point à noter, la centralisation visant l'économie, de moins en moins de campagnes sont adaptées spécifiquement pour le Québec, mais plutôt simplement traduites, faisant fi de toute spécificité. Un exemple simple, les anciennes campagnes de Bell avec Benoit Brière, remplacées d'abord par une campagne pancanadienne identique (où seules les voix de castors animés étaient remplacées) puis par une autre au pied d'un logo géant Bell où aucune personnalité locale reconnaissable ne joue de rôle.
Cet assaut médiatique à saveur de propagande obtient du renfort d'un allié insoupçonné. La présence de plus en plus nombreuse de nouveaux arrivants Français ou Maghrébins à titre de rédacteurs dans les agences de communication québécoises ajoute au problème. Pour la plupart très mal renseignés sur l'histoire et les enjeux du Québec, ces derniers comprennent mal la nuance identitaire à faire entre Québécois et Canadien. Par ignorance et naïveté, ils tendent à appliquer le concept identitaire national d'épithète «canadien» et donc ne voient pas le besoin d'adapter le choix des mots provenant des agences de Toronto lorsqu'ils s'adressent à l'auditoire Québécois.
Car il faut comprendre que si une campagne publicitaire n'origine pas de Montréal mais de Toronto, son adaptation française est souvent confiée à des agences locales de moins en moins soucieuses du sentiment identitaire d'ici. De plus en plus présents en position de décision dans les communications d'ici, Français et Maghrébins ignorent en général tout des enjeux identitaires québécois. Les moins informés d'entre eux ne voient que sur un atlas, ici c'est le Canada et que sur le passeport c'est écrit Canada, donc ils croient naturel que le public québécois apprécie l'épithète identitaire «canadien» tout autant que le public hors Québec. Ce qui est faux car cette dernière en irrite plusieurs et en aliène bien d'autres. Traiter un Québécois de «Canadien» est de plus en plus comparable à traiter un Irlandais de «Britannique»: une épithète anachronique ignorante aux teintes d'insulte. Une publicité récente dans le cadre des Francofolies annonçait une compétition entre chanteurs francophones. D'un ton tout-à-fait étrange et dénaturée, le chanteur du Québec a été présenté comme représentant «le Canada». Voilà ce qui trahit la participation d'un Français/Maghrébin à l'étape de la rédaction publicitaire. Car jamais dans les derniers trente ans aurait-on osé dissimuler la patrie identitaire réelle d'un artiste d'ici, et d'autant moins pour une campagne destinée au marché québécois.
Il faut dire que le Québécois d'origine est souvent ébloui par ce qu'il perçoit comme du raffinement et du prestige chez le dernier débarqué d'Europe. Les propriétaires d'agence ne sont pas à l'abri et par désir de jouer la grande agence Parisienne, ils engagent et octroient du pouvoir à celui qui n'a pu trouver place en France. Ces restes de Paris, ces rejetons second choix du publicitaire Français, habitués à un marché beaucoup plus fermé et agressif, saisissent rapidement l'occasion pour «éduquer» les provinciaux Québécois. Parmi leur réussite récente, notons l'habileté avec laquelle ils ont dressé le bas peuple à abandonner l'expression «fin-de-semaine» pour adopter «week-end». Opération menée essentiellement par leur nouvelle position d'influence dans les médias, opération menée du haut vers le bas. Il n'est pas surprenant donc qu'une telle attitude et un tel pouvoir, combinés à l'ignorance et l'indifférence face à l'histoire d'ici, finissent par renforcer le message identitaire propulsé par Toronto.
Les campagnes publicitaires adaptées au Québec ont pourtant toujours mieux performé. Semble-t-il que cette rentabilité en performance a été rattrapée aujourd'hui par des besoins d'économiser toujours grandissants où la centralisation joue seule à bord (Toronto et son "canadian" crap).
La vassalisation à Toronto s'opère donc aussi dans le monde publicitaire. Les messages qui y sont largués nous bombardent à la saveur «canadian». Ils divisent d'abord Québécois francophones et anglophones par un double discours contradictoire. Ensuite, il y a disparition des campagnes adaptées au profit de traductions bêtes, insoucieuses des différences. Le tout renforcé par des complices Français et Maghrébins ignorants en position d'influence dans les agences satellites de Montréal. Tous travaillent maintenant de concert à effacer l'identité collective Québécoise de l'univers publicitaire.
Sœur de la propagande, la publicité se voit ici dans un dérapage de plus en plus grossier, au service, sans y penser, d'une colonisation culturelle et d'un affaiblissement identitaire.
On dit qu'acheter c'est voter. Que le consommateur d'ici se fasse entendre, qu'il laisse savoir aux propagandistes qu'on ne lui dira pas ce qu'il est.
Louis Charlebois
Auteur


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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    14 septembre 2010

    Ne comptons pas sur les Français et les Maghrébins (qui sont d'anciens colonisés pour la plupart) pour respecter notre spécificité. D'ailleurs, même les Français ne connaissent pas notre Histoire et n'en ont que faire.
    La plupart débarquent ici déjà canadianisés et américanisés et cherchent à se faire une nouvelle vie. D'ailleurs, c'est bien ce qu'on leur dit naïvement, sans penser aux conséquences de tels propos.
    Le combat est devenu titanesque.
    Nous ne devons compter que sur NOUS.

  • Archives de Vigile Répondre

    13 septembre 2010

    Excellente analyse, voilà une autre bonne raison de faire l’indépendance. Toutefois, je suis surpris et surtout déçu que des Français contribuent à l’effacement de l’identité québécoise. Je crois que la simple lecture de votre article pourrait contribuer à changer bien des comportements. En ce qui concerne les Maghrébins, ça sera peut-être plus difficile, mais pas impossible. Les Maghrébins ont une vision du Canada très proche de celle des Italiens, la seule différence, de ce point de vue, est que les Maghrébins parlent français et ils y tiennent. Il faudra bien un jour mettre un terme à ce marchandage, avec les immigrants, de la nationalité canadienne contre l’identité québécoise. Ce petit jeu a pris une grande amplitude lors du référendum de 95 et continue toujours aujourd’hui. Comme je le dis souvent, il faut le dire, et en particulier aux immigrants pour que cessent ces comportements.
    Nosco