Nous? est une belle question

Puisque les fleurs poussent dans l’fumier. - Votre mépris est un engrais. - Nous sommes des fleurs. - Nous sommes - Les fleurs de lys.

NOUS? 7 avril 2012



LE BLOGUE DE JEAN BARBE

Voici le texte que j’ai lu au Monument National, hier soir, dans le cadre de l’événement Nous?


Nous autres
Les patriotes, les indignés, les étudiants,
Tout ce que notre histoire a compté de sang frais
Coulant pour une idée de justice, tout ceux qui ont
Offerts aux fusils du pouvoir, aux matraques des assis, au mépris des puissants
Leur chair à canon et leurs rêves à abattre…
Tous ceux qui un jour se sont dit c’est assez
Les patriotes, les indignés, les étudiants
Et nous,
Nous autres
Ne voulions pas nous battre

Les patriotes ne voulaient pas d’une fête nationale
Pour célébrer leur mémoire
Ils voulaient vivre.
Vivre mieux.

Pas : plus riche. Mieux.

Ils voulaient
Travailler, manger, apprendre, aimer,
Faire des enfants, les regarder grandir
Espérer que demain soit meilleur qu’hier
Être libre autant qu’on puisse l’être
Quant on vit avec d’autres et qu’il faut partager.

Ils ne voulaient pas se battre pour un pays.
Ils voulaient vivre bien, vivre mieux
Un pays peut-être leur permettrait cela.
Jamais le pays n’aura été le but.
Toujours le pays aura été le moyen, peut-être, de vivre mieux.

Nous autres
Nous sommes gentils
Nous n’avons pas l’habitude de déranger
Nous autres
Nous n’aimons pas nous battre
Ils sont bien rares ceux qui veulent se battre
Et risquer de mourir.
Ils voulaient, ils veulent, nous voulons
des choses simples, concrètes
Un coin de terre à cultiver
Un métier à pratiquer
Un salaire qui permet d’avoir
Un repas sur la table
Des vêtements sur le dos
Du temps pour le repos
Un endroit pour dormir
Des choses à apprendre
Pour grandir encore
Des médicaments pour soigner nos enfants
Des lois qui nous protègent autant qu’un autre.
Ce n’est que cela, la dignité.
Rien de plus.
Rien de moins.

Vous qui possédez la terre à cultiver, les outils de mon métier, l’argent de mon salaire
Vous qui possédez la nourriture, les vêtements, les maisons
Les médicaments, vous qui appliquez les lois ou les ordonnez
Je vous dis : partagez
Partagez entre tous sans égards à la couleur de ma peau, à la langue de mes prières, au pays de mes ancêtres
L’abondance dort dans vos coffres, nous le savons,
Si je peux vivre avec dignité, j’accepterai les différences d’opinions, les accommodements raisonnables, les obligations sociales.
Partagez. Et il n’y aura plus parmi nous, pour prendre le fusil, pour se battre, tuer et mourir
Que les fous.

Nous soignerons les fous avec humanité.

Je ne veux pas me battre

Je veux vivre.

Mais.

Votre Monde tire sa richesse du pillage de l’avenir
Vous épuisez la terre, vous rasez les forêts
Vous tuez la beauté au nom des actionnaires
Et pour le reste vous laissez faire
Les lois du marché nous marcher sur le corps
Alors
Les plus pauvres s’appauvrissent
Les plus riches s’enrichissent.
Ah il est beau le progrès
Et nous sommes en colère
Échanger la couronne d’Angleterre
Pour le palais des congrès
Troquer la Reine pour Charest
Après s’être fait fourrer de loin
Se faire fourrer de près ?

Nous autres
Nous sommes gentils
Nous n’avons pas l’habitude de déranger
Nous autres
Nous n’aimons pas nous battre

Mais :
À ceux qui veulent mettre des protège-coudes et des casques de vélo à nos espoirs.
Aux empêcheurs de risque qui veulent notre sécurité en l’imposant de force.
Aux régulateurs des consciences qui font la morale à nos ventres, avortons de la pensée, souteneurs de soutanes et voleurs d’enfances
Aux économistes libertaires, anarchistes de la grande finance qui ne souffrent aucune règle, surtout pas celles de l’égalité et de la compassion

Je dis
Partagez

Aux funambules de l’extrême centre, ces drogués du pouvoir qui sniffent la ligne du parti dans les toilettes du parle et ment.
Aux maquilleurs de statistiques qui dessinent des sourires aux cadavres
À ceux qui jonglent par milliards en sous-payant le jardinier
Aux ingénieurs des roue de fortune, loto hydro casino
Qui prélèvent leurs taxes dans la poche des désespérés
Voleurs de grand chemin, bandits de la construction, banquiers, modérateur de tickets aux urgences de vivre.
Aux vendeurs de RÉER qui promettent le paradis avant la fin de vos jours, ces nouveaux curés d’une religion ancienne, ces mafieux qui disent achète ma protection sinon…
À ceux qui veulent nous faire payer le privilège
D’apprendre sur les bancs l’école comment les enrichir
Taxeurs de savoir, détourneurs de science au profit des finances
À ceux qui rêvent d’un peuple
Criblé du plomb des dettes
Lourd et lent, incapable d’envol
Incapable de penser

Je dis
Partagez

Aux spécialistes de la mise à pied, aux missionnaires de la mondialisation
À ceux qui vont content en Chine
Faire fabriquer par des enfants les cochonneries vendues aux chômeurs
Qui n’auront bientôt plus
les moyens de se les payer
Dans les Dollaramas
À ceux qui roulent en Bentley ou en Porsche
En contournant les nids-de-poule
Tandis qu’on fait le trottoir pour éviter d’être à la rue

Partagez

Nous sommes lucides nous aussi.
Et nous savons ce que c’est que la merde.
Nous y sommes, jusqu’au cou. C’est assez. Partagez.
Sinon un jour ça va péter
Nous voulons vivre, nous voulons apprendre.
Nous voulons grandir,
Et nous vivrons.
La merde amortit les chocs
Mieux que les Porsche ou les Bentley.
Nous ne voulons pas nous battre.
Mais il faut le faire puisque vous nous y poussez.
Quand on est dans la merde jusqu’au cou, on a pas le choix de se lever,
pour se tenir debout
lever la tête, lever la voix.
Lever le poing.
Nous survivrons.
Nous vivrons.
Nous surgirons partout
Au printemps qui s’amorce
Nous étendrons nos espoirs au soleil des jours.
Nous grandirons en nombre
Puisque les fleurs poussent dans l’fumier.
Votre mépris est un engrais.

Nous sommes des fleurs.

Nous sommes
Les fleurs de lys.



Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé