N'ayons pas peur des mots

NOUS autres et EUX autres

Tribune libre

Les ONs, accommodants myopes et bonasses, nous ordonnent de ne pas utiliser le NOUS quand nous parlons des Québécois francophones. Ce serait faire injure aux AUTRES qui font aussi partie de NOUS. - Leur ordre serait judicieux, s’ll n’y en avait pas d’AUTRES qui se retranchent de NOUS, à la hache, précisément parce qu’ils considèrent qu’ils ne sont pas NOUS.
C’est aussi évident que le Saint-Laurent en plein midi, en plein soleil, à Sept-Îles et même à Montréal: depuis 1760, au Québec, il y a NOUS autres et EUX autres. Nos deux référendums volés l’ont crié à tue-tête; chacune des élections le prouve à l’évidence; et chaque événement social de quelque importance nous remet sous les yeux cette faille bicentenaire. Les débats actuels sur la charte de la laïcité divisent les francophones sur quelques articles de la charte, mais ils divisent en profondeur les francophones et les AUTRES, ceux d’ici et ceux du ROC, en block, avec nos francofuns d’Ottawa coulés dans le canadian block.
À la Commission Taylor-Bouchard, j’avais présenté un mémoire où je démontrais que la faille principale au Québec, ce n’est pas celle qui sépare les francophones du Québec des Hassidim, Chinois du China Town, Sikhs, Tamouls, musulmans, Grecs, Italiens et bouddhistes, mais bien celle qui divise les francophones des Anglais et Alloanglaisés du Québec. Braquer tous les projecteurs sur les divisions mineures, c’était comme jeter un hareng pourri sur la table des panélistes pour détourner leur attention du problème majeur à discuter.
Au Québec, comme d’ailleurs partout ailleurs au Canada anglais, NOUS avons connu une foule d’accommodements culturels déraisonnables, toujours contre NOUS et au profit d’EUX autres.
Ce jour-là, M. Taylor était absent, «faute de maladie», comme ON dit, mais son complice, M. Bouchard, est vite intervenu pour me voler et couper la parole: j’’étais hors d’ordre! Comme il est hors d’ordre de demander des éclaircissements sur le trou de 40 milliards dans la Caisse de dépôt et comme il est hors d’ordre de poser la question raciste: Pourquoi les anglophones, qui sont 8% des Québécois, réçoivent-ils environ 30% de fonds publics destinés à l’éducation? Pour préserver leurs «libertés individuelles» ? Personne,
pas même les péquistes, n’est intéressé à entendre parler de «ces affaires-là». Mais pourquoi diable «ces affaires-là» sont-elles encore et toujours hors-la-loi? Votre psychiatre peut-il me le dire?
La faille dont je parle est archiconnue de tous ceux qui ne sont pas «rendus ailleurs». Mais on a la trouille d’en tirer les conséquences.
La première conséquence à en tirer, c’est de se convaincre, dur comme fer, que ce sont les francophones qui veulent que le Québec soit un pays, leur pays; et ils veulent que ce pays soit francophone, et non pas multiculturel anglaisé. Certains des AUTRES, 5%, le veulent aussi. Tous les AUTRES, à 95%, veulent que le Québec reste une province comme les AUTRES dans un Canada bilingue pour la frime, mais en réalité canadian anglophone. Ce sera, comme le disent si bien Harper et les Couillards, «une nation»...provinciale. Des nations provinciales bouffonnes, il n’y en a pas à l’ONU.
Pour EUX autres, cette Province of Quibec doit être canadian d’abord et québécoise encore pour un temps; avec le temps, elle deviendra une canadian province, francofune pour le folklore, comme la Louisiane et les États francofossiles de la Nouvelle-Angleterre. Alors, ce sera enfin la parfaite Unity. Et, rangé au musée de cire, au garde-à-vous, fier de lui, le Québécanthrope sourira en anglais.
Cette mort en sursie décrétée par Durham et entèrinée par Elliott alias Trudeau restera l’article premier du Canadian Credo si le Québec reste une canadian province. Vouloir amadouer, minoucher et hypnotiser ces assassins démocrates pour qu’ils disent OUI à un Québec libre, c’est comme vouloir séduire un rhinocéros en rut avec du hareng, ou apprendre à un chat de l’Abitibi à miauler en japonais. Gérald Godin l’a appris à ses dépens, et tous les autres qui, avec lui et après lui, ont essayé d’amadouer le rhinocéros.
Alors, le PQ et tous les autres partis ou mouvements qui se disent indépendantistes, doivent agir en conséquence. Si NOUS voulons un pays, et un pays francophone, NOUS adresser aux francophones en toute priorité. Et réserver 5% du temps pour NOUS adresser aux AUTRES, le temps de leur dire que, dans notre pays, ils seront des citoyens à part entière. NOUS ne les traiterons pas comme ils ont
traité les Acadiens au génocide, comme ils ont parqué les autochtones comme du bétail dans des réserves-enclos, comme ils ont pacifié et volé les Métis à la mitrailleuse, traité les Patriotes à l’accommodement culturel raisonnable de la corde à pendre et voué au mépris tous les Canadiens français des canadian provinces.
Soixante pour cent des francophones sont déjà acquis à l’indépendance de leur pays; il suffirait d’en convaincre 5% de plus, et nous l’aurions, notre pays. Est-ce trop demander, quand les AUTRES, à la queue leu leu, en se tenant ferme par la main, votent en block contre NOUS? Et en criant au racisme comme des hypocrites pris sur le fait si NOUS osons le voir et le dire. Les chefs des communautés juive, italienne et grecque ne se sont pas gênés pour inciter leurs membres à voter massivement contre NOUS lors du dernier référendum. Ils ont été écoutés à 95%. Sans doute le même pourcentage que celui des Hell’s Angels qui avaient orné leur bunker d’un NON majuscule, fantasse, clouté, solide comme leurs gorilles tueurs à gage.
C’est prouvé: EUX autres nous ont volé le deuxième référendum. Avec toutes leurs magouilles vicieuses, illégales et antidémocratiques. Mais ils nous faut admettre cette autre dure et cruelle réalité: ce sont surtout les francophones qui nous ont fait perdre ce référendum. Si, comme chez nous à Sept-ÎÏes, ils avaient voté à 70% pour NOUS, nous ne serions plus aujourd’hui dans le pays des AUtRES, mais chez nous. Nous pourrions alors dire: «NOUS les Québécois». Tous les Canadians-québécois seraient devenus des Québécois, sinon du jour au lendemain, du moins avant la fin des temps. «Est Québécois celui qui vit au Québec», dit ON. Géographiquement, c’est vrai; selon le droit, c’est vrai. Mais selon le bon sens et l’hnnêteté intellectuelle et morale, il ne suffit pas de vivre en Italie pour être un Italien. Que faut-il de plus? Les AUTRES et beaucoup des nôtres ne le savent pas encore. C’est pourtant assez facile à voir et savoir.
Voyons. À un Italien qui se dit Italien tout comme son papi et sa mamma mia, on demande s’il choisit l’Angleterre ou l’Italie pour son pays. Une fois, deux fois, trois fois, cet Italien dit que son pays, c’est l’Angleterre. Notre Bona Arsenault, avec beaucoup de Québécois schizophrènes, y compris le Philippe Couillard dont on vante la grande
intelligence, disait: «Ma patrie, c’est le Québec, mais mon pays, c‘est le Canada.» C’est comme se vanter d’avoir deux têtes, deux nombrils et quatre pattes pour mieux conserver son équilibre. C’est aussi bête que si un Américain déclarait fièrement: «Ma patrie, c’est les États- Unis, mais mon pays, c’est l’Aléna.»
Les Libéraux du Québec, bassement, courtisent ces AUTRES. Ils n’hésitent pas à faire appel à leur vote ethnique pour asseoir solidement leur NON, assurer leur élection et remplir leur caisse électorale. Chaque fois que ces AUTRES et NOUS autres viennent en conflit d’intérêts, ces Libéraux se portent, zélés et empressés, au secours des AUTRES. Il est temps pour NOUS d’avoir le front de NOUS adresser NOUS aussi à NOUS autres. Ça serait recommencer à ceindre ton front de ces fleurons glorieux qui l’ornaient, jadis, avant 1760.
Bien évidemment, ces AUTRES et même ceux des nôtres convertis aux AUTRES continueront à nous accuser de tous leurs vices et de tous leurs crimes. Si nous nous montrons sérieux dans notre désir d’avoir un pays, et un pays francophone, ils vont nous tomber dessus, en ROC Block, avec leur Royal Canadian Harper Mounted Police (traduction libre: Police montée à cheval sur la reine du Canada de Harper), leur Royal Canadian Navy, leur Royal Canadian Air Force, leur Royal Canadian Finance, leurs Royal Canadian Newspapers, avec leur armée d’occupation, avec leurs commandites nouveau genre, avec toute leur propagande journalière à nos frais, avec Radio-Canada, la Presse, et je t’en passe.
Cela est bien prévisible, aussi prévisible que le St-Laurent coulera l’an prochain d’ouest en est. Et les francofuns d’ici, avec Coderre, Stéphane Dion et les Couillards, ajusteront leurs flûtes et voix serviles, hypocrites et indignées, sur celles de The Gazette, du Toronto Star, du petit Trudeau, du NPD, et de Harper ou de son remplaçant, libéral, conservateur ou npdiste. On pourrait même voir ce Harper retourner se branler devant le Mur des lamentations et déposer dans une des fentes du mur un petite prière demandant au Canadian God de protéger le Canada anglais avec autant de sollicitude qu’il veille sur le mur qu’ont élevé les Israéliens pour se protéger des «impurs» à coloniser. La Reine d’Angleterre, elle, pour nous convertir, nous enverra Kate et Williams nous faire leur striptease matrimonial colonial. Bref, ils nous traiteront comme ils ont traité Gandhi etMandela - pour ensuite faire leur éloge funèbre en hypocrites -, et comme les Américains, leurs cousins, ont traité leurs Indiens et leurs «nègres» et tant d’autres, sans aucun remords de racisme.
Je touche là à un sujet très sensible, que les ONs jugent tabou. De quoi terrifier les couillONs! Les Libéraux diront que c’est diviser les familles et provoquer des luttes raciales. Ils brandiront leur mot chicane qui est devenu leur étendard. Comme si ces divisions et ces luttes n’étaient pas là depuis deux siècles et demi! Comme des perroquets zazous programmés, ils continueront à crier que notre priorité, ça doit être «les libertés individuelles»... des AUTRES, l’économie pilotée par Ottawa, et non ce désir insensé de vouloir se donner un pays, alors qu’on a déjà un si beau-grand pays: celui des AUTRES que les AUTRES aménagent pour NOUS avec sollicitude.
Tous les peuples qui se sont libérés ont dû, un jour ou l’autre, susciter des divisions et des affrontements sociaux. Sans divisions, Hitler et Staline seraient toujours haut cotés en Bourse et les Américains seraient encore des Anglais. Et puis, cher Watson, dis-moi donc: si les indépendantistes divisent les Québécois, peut-on dire avec autant de logique que les fédéralistes divisent eux aussi les Québécois? Sans ces fédéralistes, tous les Québécois seraient des Québécois. Non? - OUI.
Les ONs nous disent qu’il ne faut pas faire notre pays contre le Canada, mais pour nous-mêmes. Ce serait plein de bon sens, si les AUTRES n’étaient pas contre NOUS. Mais non seulement ils sont contre NOUS, ils sont en guerre contre NOUS. Ils nous le prouvent chaque jour depuis deux siècles et demi. Et Jean Pelletier, bras ambidextre de Jean Chrétien, nous a dit à peu près ceci, en pleine face, pour justifier la canadian saloperie des commandites: Le Canada était en guerre contre les séparatisses (50% des Québécois!), et à la guerre tous les coups sont permis. Sans exagérer, peut-on appeler ça des paroles qui divisent et des coups bas contre NOUS? Et puis, Watson, s’ils se disent et sont effectivement en guerre contre nous, nous pouvons légitimement en conclure, avec De La Palice, que nous sommes en guerre contre eux. «L’indépendance est un combat qui ne doit pas hésiter à nommer ses adversaires» dit Robert Laplante dans l’Action nationale de janvier 2014. Et ces adversaires sont tout autre chose que des adversaires au tennis ou à la pétanque: ce sont des ennemis.

Je n’ai aucun sentiment de culpabilité à appeler Trudeau, Chrétien et leur Stéphane mes ennemis. Et je suis sûr que Falardeau ne considérait pas Power Desmarais Corporation comme un loyal adversaire.
Les Britishs-Canadians ont fait block pour nous voler nos richesses naturelles, nos deux référendums et nous imposer leur Canadian Constitution, leur Supreme Court et tout le reste de leur patente. Il est plus que temps pour NOUS autres de faire bloc. Si nous sommes décidés à prendre le seul moyen qui peut nous garantir de redevenir NOUS-mêmes, eh bien! le dire et surtout le faire. Par exemple, lors de la prochaine campagne électorale.
Oh la la! quel défi pour des indépendantistes plus ou moins résignés à la dépendance! Habitués à marcher à reculons, en regardant pour voir si les AUTRES vont leur permettre de continuer à marcher.
«Mais marcher et avancer par en avant, ça s’apprend, sacrament», dirait Michel Chartrand. Je le dis pour lui.

Squared

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Professeur à la retraite. Écrivain. Horticulteur, pêcheur et chasseur. Se bat depuis quarante ans pour défendre le français et l’indépendance du Québec.

Sept-Ïles





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5 commentaires

  • Marcel Haché Répondre

    22 février 2014

    Le Québec a déjà ses ambassadeurs : ce sont tous nos artistes et tous nos athlètes. Il a une âme, que lui renouvellent ses écrivains. Il lui manque seulement l’Indépendance pour mettre bon ordre dans son cœur et dans sa tête. Voilà pour l’excellence.
    Si vous pensez que la rivalité canadien-nordique était intense, attendez voir celle qu’il y aura lorsque qu’un nouveau titan viendra affronter ceux qui s’affrontent présentement à Sotchi. En pleine nuit, tout le contour et les alentours du Québec seront illuminés comme en plein jour, et vus d’aussi loin que la lune. On veillera tard…et Nous serons beaux…
    Nous sommes déjà beaux et déjà des titans, malgré qu’il est tard et que le temps presse… Nous sommes prêts.
    Si on voulait bien s’adresser à Nous, à Nous autres…

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    21 février 2014

    ..."Soixante pour cent des francophones sont déjà acquis à l’indépendance de leur pays ; il suffirait d’en convaincre 5% de plus, et nous l’aurions, notre pays."...
    Bien timides sont ces 60% dans les brasseries où l'on n'en a plus que pour TEAM CANADA!
    Nous sommes des Nous bien pâles devant les "bienfaits" multiculturels. Mais nous écrivons bien, comme nous le faisons dans notre génération. Et nos enfants seront polis avec nous tant que nous n'aurons pas perdu nos défenses dans les Résidences Soleil de M. Savoie.

  • François A. Lachapelle Répondre

    21 février 2014

    Viateur Beaupré, inspiré sûrement par l'air du large, nous écrit un excellent texte sur qui NOUS sommes.
    Je désire m'arrêter plus particulièrement sur la personne du nouveau chef du PLQ, Philippe Couillard.
    Dans la biographie de Philippe Couillard, neurochirurgien, on apprend qu’il a séjourné durant presque 5 ans en Arabie-Saoudite de 1992 à 1996 pour mettre sur pied le département de neuro-chirurgie de l’hôpital de Dahram.
    Ce séjour hors Québec suscite quelques questions pour ce médecin spécialiste né à Montréal en 1957, naïveté exclue. Les questions ci-dessous, introspectives qu’elles soient, sont justifiées par le poste public qu’il occupe à la tête du PLQ.
    Par exemple, alors que le Québec éprouvait une pénurie de médecins, comment se fait-il que ce monsieur se soit senti plus utile à exercer sa spécialité médicale dans un pays dont les moyens financiers sont décuplés par rapport aux budgets du Québec ?
    L’Arabie-Saoudite, qui en a les moyens, a-t-il soudoyé Monsieur Couillard avec des grosses sommes d’argent pour l’amener chez lui, sommes bien plus importantes que les honoraires du Québec ? Les honoraires annuels pour un médecin spécialiste en Arabie-Saoudite sont dans les millions.
    À part l’argent en jeu, quels autres motifs peuvent intervenir pour tracer la ligne de vie de ce Montréalais ?
    Philippe Couillard s’ennuie-t-il en médecine, s’ennuie-t-il au Québec, a-t-il besoin de changements pour performer, pour nourrir son estime de soi ? Est-il instable comme se demanderait un chasseur de tête ? Élu député en 2003 dans la circonscription de Mont-Royal, il devient Ministre de la santé dans le cabinet de John James Charest. Encore là, il se tanne, et démissionne le 25 juin 2008.
    Selon l’auteur Viateur Beaupré, « le Philippe Couillard dont on vante la grande intelligence, disait : « Ma patrie, c’est le Québec, mais mon pays, c‘est le Canada. » » On appelle cela «assis entre deux chaises», ou dit autrement, « je mange à tous les rateliers ».
    Peut-on faire confiance à Philippe Couillard à titre d’aspirant Premier ministre du Québec ? Monsieur Couillard s’est-il trompé de tribune et de parti alors qu’il devrait agir sur la scène fédérale du Canada en accord avec ses convictions ? À moins qu’il soit un homme téléguidé par des forces occultes du Canada qui lui paieraient un allongement de salaire secret comme dans le cas de John James Charest, ce qui peut être déjà le cas ?
    Essayez de regarder Philippe Couillard directement dans les yeux et tirez vos conclusions.

  • Lise Pelletier Répondre

    21 février 2014

    Eh que ça fait du bien.
    Dois-je vous dire merci, devant ce que je ressens à cette lecture, ce mot ne veut rien dire.
    Vous avez écrit 35 ans de ma vie.
    Nous/Eux ça dit tout.

  • Nestor Turcotte Répondre

    21 février 2014

    Le problème?
    Le Parti québécois lui-même.
    IL ne parle plus de faire l'ndépendance.
    Il fait des études, veut déposer un livre BLANC sur l'avenir du Québec. TOUTE une perspective !
    NT