Nostalgie québécoise

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MBC doit sortir de sa sempiternelle nostalgie : c'est le Québec du XXIe siècle qu'il faut bâtir et non pleurnicher sur les échecs des années 1960-1990



À l’échelle de l’histoire, le Québec se distingue comme une démocratie admirable, allergique à la violence, et capable de débattre des questions les plus difficiles sans se soumettre au règne des extrêmes.




Il suffit de penser à la manière d’aborder la question nationale dans la deuxième moitié du XXe siècle pour s’en convaincre. Aucune question n’est plus épineuse que celle-là. Elle touche les passions les plus fondamentales. Ailleurs dans le monde, elle pousse à verser le sang. Ici, cela n’a pas été le cas, le tragique épisode d’octobre 1970 mis à part.




Surtout, nos débats étaient globalement civilisés. Évidemment, la politique est par définition conflictuelle, et les hommes comme les idées ne s’affrontent pas avec des plumeaux. Chacun veut gagner et est prêt à prendre les moyens nécessaires pour cela.




Débat




Et pourtant, il y avait ici une sorte de consensus minimal auquel tout le monde tenait. Les souverainistes comme les fédéralistes se respectaient. Ils ne parlaient pas le langage de la guerre civile. Il faut dire que les principaux leaders s’étaient connus dans leur jeunesse et partageaient un univers mental.




C’est avec nostalgie que je pense à cette époque.








Écoutez Les idées mènent le monde, une série balado qui cherche a éclairer, à travers le travail des intellectuels, les grands enjeux de sociétés.





Car depuis une dizaine d’années, peut-être depuis le printemps étudiant de 2012, en fait, on a assisté à une véritable dégradation du débat public. Le consensus élémentaire des Québécois s’est fragmenté, et ceux qui se traitaient comme des adversaires respectables se voient de plus en plus comme des ennemis irréconciliables.




Nous n’avons pas su apprivoiser nos nouveaux débats, et les accusations les plus violentes deviennent la norme. Raciste, sexiste, transphobe, islamophobe : ces mots se sont banalisés sans raison.




L’atmosphère politico-médiatique peut même devenir irrespirable, surtout sur les médias sociaux, qui sont pour beaucoup dans cette dérive. On nous dira qu’ils ne font que refléter le climat politique ambiant. Nuançons. En fait, ils le formatent en créant un espace où l’agressivité peut s’exprimer librement et où la tentation du lynchage se désinhibe comme jamais.




Sur Twitter, notamment, on cherche moins à débattre qu’à humilier celui à qui l’on s’en prend. Ou alors on le diabolise pour provoquer sa mort sociale.




Plus encore, les médias sociaux créent un climat de surveillance généralisée où le moindre like est scruté par des surveillants autoproclamés de la moralité publique, qui cherchent à provoquer des scandales à répétition.




Cohésion




Ils poussent aussi à l’hyperactivité médiatique. Le temps de la réflexion cède la place à l’exigence de la réaction immédiate. Nous sommes collectivement stressés. Rien de tout cela ne favorise la sérénité démocratique.




Une petite nation comme la nôtre, enfermée dans une fédération qui la nie, et minoritaire sur un continent qui est aussi celui de l’empire de notre temps, doit redécouvrir le secret de sa cohésion collective.




Les différents camps qui la composent (gauche contre droite, souverainistes contre fédéralistes, nationalistes contre multiculturalistes, etc.) doivent surtout se rappeler qu’ils ont en commun quelque chose de plus beau et de plus grand que tout ce qui les divise : je parle évidemment de ce pays nommé Québec.






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