Le commissaire aux langues officielles du Canada, Raymond Théberge, conclut que les plaintes visant la nomination de Mary Simon comme nouvelle gouverneure générale du Canada ne sont pas fondées.
Au total, le Commissariat aux langues officielles a reçu 1341 plaintes qui ont toutes été jugées recevables.
Selon les plaignants, le Bureau du Conseil privé (BCP) a manqué à ses obligations prévues à la partie VII de la Loi sur les langues officielles dans le cadre du processus de recommandation de candidatures pour la fonction de gouverneur général qui a mené à la nomination, par le premier ministre Justin Trudeau, de Mary Simon.
La nomination de Mary Simon comme 30e gouverneure générale a été annoncée le 6 juillet dernier. Mme Simon est la première gouverneure générale autochtone. Elle parle l'inuktitut et l'anglais, mais ne parle pas le français.
Le commissaire précise que bien que plusieurs plaignants se soient dits préoccupés par le fait que la nouvelle gouverneure générale ne parle pas les deux langues officielles, une grande partie d’entre eux ont exprimé un large soutien pour la nomination d’une première personne autochtone à cette fonction
.
Plusieurs ont souligné que leur plainte ne portait pas sur les compétences ou le mérite de la personne choisie
, écrit-il dans son rapport d’enquête préliminaire, dont Radio-Canada a obtenu copie.
Les plaignants ont toutefois estimé cette nomination, tout comme d’autres nominations à la fonction publique fédérale, comme un recul des droits des francophones
.
Des recommandations non suivies?
Mais selon le commissaire, le BCPn’a qu’un rôle de recommandation dans le processus de nomination du gouverneur général
.
Un processus dont il donne plusieurs détails dans son rapport. On y apprend ainsi qu'un comité chargé de formuler des recommandations pour le premier ministre a été mis en place en mars 2021. Présidé par Dominic LeBlanc, président du Conseil privé de la reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, et par la greffière par intérim du Conseil privé, le comité comptait quatre autres membres bénévoles choisis pour leurs perspectives variées et leur expertise
, explique le BCP , et ne représentant pas une organisation en particulier.
Au total, 12 rencontres ont eu lieu avant de fournir une liste de candidats au premier ministre. Plus d’une centaine de candidatures ont été évaluées selon plusieurs critères, dont la maîtrise des deux langues officielles.
La connaissance du français et de l’anglais a également été abordée durant l’entrevue des candidats, selon le BCP
.Le commissaire en conclut donc que plusieurs mesures positives concrètes avec l’intention de promouvoir la reconnaissance et l’usage du français au Canada
ont été prises par le BCP dans le processus de sélection.
Mais il rappelle que [les] recommandations [du BCP ] ne lient pas le premier ministre, qui peut considérer des candidatures non recommandées ainsi que des facteurs ou des éléments non évalués par le comité de recommandation
.
La décision finale revient au premier ministre, explique-t-il. Or, n’étant pas considéré comme une institution fédérale, il ne relève pas de la Loi sur les langues officielles, précise le commissaire Théberge.
Ainsi, je ne peux pas conclure que le BCP est responsable de l’ultime décision du premier ministre quant à son choix de gouverneur général.
Un rappel de l'importance des nominations bilingues
Le commissaire juge donc que les plaintes qui lui ont été formulées ne sont pas fondées.
Le commissaire tient toutefois à rappeler l’importance du bilinguisme dans son rapport, dans un message qui semble adressé au gouvernement.
« La fonction de gouverneur général, bien que largement symbolique, demeure un poste porteur des valeurs fondamentales de la société canadienne. Ainsi, je tiens à rappeler aux décideurs qu’il est tout à fait possible d’arrimer langues officielles et inclusion, particulièrement en raison de l’importance de la fonction de gouverneur général pour tous les Canadiens, peu importe leur langue ou leurs origines. »
Je comprends que nous sommes à un tournant important dans l’histoire de notre pays et que la nomination d’une gouverneure générale autochtone est un grand pas vers la réconciliation. Je tiens toutefois à noter que le bilinguisme institutionnel dans l’appareil gouvernemental fédéral, lequel est primordial pour la prestation des services, les communications et les fonctions de supervision, entre autres, dépend en grande partie du bilinguisme des personnes qui occupent des postes aux plus hauts échelons de la fonction publique ou du gouvernement ainsi que de leur leadership à soutenir la reconnaissance et l’usage des deux langues officielles au quotidien au sein de leur institution.
Le commissaire Théberge a refusé la demande d'entrevue de Radio-Canada et justifié sa décision par le fait que l’enquête est en cours
, dans la mesure où il s'agit d'un rapport préliminaire.
Ces conclusions ne sont toutefois pas finales, car les plaignants et l’institution fédérale auront la possibilité de fournir leurs commentaires sur le rapport d’enquête préliminaire avant que j’émette mes conclusions finales
, a indiqué le commissaire Théberge dans une déclaration publique.
Outre les plaintes qui ont conduit à ce rapport, le Commissariat indique en avoir reçu 16 autres concernant la conférence de presse de nomination de la gouverneure générale.