Dans son éditorial paru dans Le Devoir du 23 juin sous le titre « Le français au Québec- Cohérence oblige », Josée Boileau démontre à juste titre à quel point le français au Québec risque de devenir exclusivement la langue « pour la sphère intime ».
« Ainsi, il est démesuré au Québec de répondre à l’anglais omniprésent par l’apprentissage intensif et obligatoire de cette langue au primaire, que le gouvernement Charest implantera cet automne. Évidemment, les immigrants n’en seront que plus perplexes devant la schizophrénie de nos discours officiels et des mesures qui les contredisent ! Les enfants, eux, verront confirmer le message qu’Internet — par la musique, les vidéos, les jeux — leur véhicule déjà : il y a l’anglais pour l’espace public, et il y a les autres langues pour la sphère intime. »
En termes clairs, insistons auprès de nos jeunes sur le clinquant de la selle du cheval avant de leur enseigner l’art de l’équitation et, quand ils seront désarçonnés, nous nous étonnerons…
Mais, que s’est-il donc passé pour que, à une époque pas si lointaine, à savoir en 2003, à ma dernière année d’enseignement, j’aie pu assister de visu à l’émerveillement qui ressortait du regard de mes élèves de première secondaire à l’audition de « Petit bonheur » de Félix Leclerc? Je me rappelle même les avoir entendu fredonner les paroles de cette chanson que leurs parents leur avaient déjà chantée lorsqu’ils étaient « petits ».
J’ai l’impression qu’aujourd’hui les enseignants éprouvent une gêne insidieuse à ressortir du placard ces petits bijoux de la poésie québécoise, envahis par cette vague pernicieuse des nouvelles technologies des communications qui placent effrontément « l’anglais sur la place publique et [ ] les autres langues pour la sphère intime ».
Avant d’en arriver à oublier nos origines francophones au détriment de
« l’anglais omniprésent », il m’apparaît urgent de nous ressaisir et de remettre sur « la place publique », à commencer par nos écoles, notre langue maternelle.
Et Josée Boileau de conclure : « Et il faut insister sur la qualité même de notre français. Le conflit étudiant nous a fait connaître des leaders éloquents, à la langue nette. C’est heureux. Mais cela ne doit pas occulter les approximations dont le vocabulaire de tous les jours, des jeunes comme des vieux, est émaillé et les erreurs qui se multiplient à l’écrit. Six mois de français intensif, appuyés de romans, de films, de chansons, seraient bien de mise dans nos écoles !….On est loin d’une telle prise de conscience, mais il faut se réveiller. »
En conséquence, je rejoins sans réserve les propos de la conclusion de l’éditorialiste tout en les bonifiant par l’enseignement d’un français intensif
« constant », à savoir tout au cours des études primaires et secondaires, mené par des enseignants qui n’hésitent jamais à mettre le focus sur la richesse de notre langue qui doit prendre toute sa place légitime sur les réseaux modernes de communication.
Henri Marineau
Québec
Invitation aux enseignants du Québec
Mettre le focus sur la richesse de notre langue
Bonne fête nationale à tous les Québécois!
Tribune libre
Henri Marineau2093 articles
Né dans le quartier Limoilou de Québec en 1947, Henri Marineau fait ses études classiques à l’Externat Classique Saint-Jean-Eudes entre 1959 et 1968. Il s’inscrit par la suite en linguistique à l’Université Laval où il obtient son baccalauréat et son diplô...
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Né dans le quartier Limoilou de Québec en 1947, Henri Marineau fait ses études classiques à l’Externat Classique Saint-Jean-Eudes entre 1959 et 1968. Il s’inscrit par la suite en linguistique à l’Université Laval où il obtient son baccalauréat et son diplôme de l’École Normale Supérieure en 1972. Cette année-là, il entre au Collège des Jésuites de Québec à titre de professeur de français et participe activement à la mise sur pied du Collège Saint-Charles-Garnier en 1984. Depuis lors, en plus de ses charges d’enseignement, M. Marineau occupe divers postes de responsabilités au sein de l’équipe du Collège Saint-Charles-Garnier entre autres, ceux de responsables des élèves, de directeur des services pédagogiques et de directeur général. Après une carrière de trente-et-un ans dans le monde de l’éducation, M. Marineau prend sa retraite en juin 2003. À partir de ce moment-là, il arpente la route des écritures qui le conduira sur des chemins aussi variés que la biographie, le roman, la satire, le théâtre, le conte, la poésie et la chronique. Pour en connaître davantage sur ses écrits, vous pouvez consulter son site personnel au www.henrimarineau.com
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1 commentaire
Archives de Vigile Répondre
24 juin 2012L’emprunt à l’anglais focus, ou focussing, est parfois employé en français lorsqu’il est question de focalisation, de concentration ou de convergence vers un élément central. Les emprunts focus et focussing ne comblent aucune lacune lexicale; ils peuvent donc être remplacés avantageusement par divers mots français tels que focalisation, concentration, convergence, intérêt, centre (d’intérêt, d’attention, d’activité, de coordination, etc.), accent, axe privilégié, point de mire, cœur, pivot, élément central, sujet, enjeu, cible, idée-force, priorité, objectif, objet.
http://bdl.oqlf.gouv.qc.ca/bdl/gabarit_bdl.asp?T1=focus&T3.x=11&T3.y=14