Marois dicte ses conditions

Pauline Marois - le couronnement


Karim Benessaieh - Pauline Marois a mis cartes sur table dès son retour dans l’arène politique. Sous sa gouverne, le Parti québécois laissera tomber tout échéancier référendaire et procédera plutôt à une «modernisation» de son programme.
Et il n’y aura pas de négociations, a-t-elle précisé hier sous les applaudissements enthousiastes d’une centaine de militants, bien entourée des principales têtes d’affiche du PQ, dans le comté de Marie-Victorin, à Longueuil. « Si on me choisit comme chef de ce parti, c’est aussi cette orientation-là que l’on choisit. »
«C’est dans la corbeille de la mariée», a-t-elle ajouté avec humour, plus tard, sur les ondes de LCN.
Le PQ, a-t-elle déclaré devant ses militants, «vit des heures difficiles» et doit se mettre à l’écoute de la population pour survivre. Un des messages que les Québécois ont adressés au parti le 26 mars dernier, selon elle, c’est qu’ils ne voulaient pas d’un référendum.
«Le Parti québécois doit rompre avec le piège d’échéancier ou d’obligation référendaire. Il faut cesser la fuite en avant. C’est la première chose dont je veux parler avec les militantes et les militants dans toutes les régions du Québec.»
Les discussions douloureuses autour du moment opportun pour déclencher un
référendum «sont du temps et de l’énergie qui ne sont pas consacrés à convaincre de la nécessité de cette souveraineté», croit-elle.
Le parti doit plutôt se recentrer sur les besoins et les attentes des Québécois, sans renier ses deux fondements que sont la souveraineté et la social-démocratie. «Vouloir renier ces deux piliers, ce serait perdre notre âme.» De même, la radicalisation serait «une recette assurée pour la marginalisation, pour le suicide».
Entre ces deux voies, le PQ doit se plier à l’exercice de renouvellement auxquels se sont prêtés tous les partis de centre gauche en Occident «sans rien renier de leurs valeurs profondes de justice sociale, d’équité». Il ne s’agit pas d’un virage à droite, tient à préciser Mme Marois, ni d’une volonté d’amoindrir l’article 1 du parti fondé par René Lévesque.
«Nous sommes des souverainistes et des sociaux-démocrates. Nous pouvons modifier certains aspects du programme tout en le restant complètement et parfaitement. Par exemple, faire en sorte que l’État soit plus efficace, ce n’est pas anti-social-démocrate, ce n’est pas antiprogressiste.»
Bien dans son jardin
Elle a également mis son grain de sel dans le débat qui secoue le Québec depuis quelques mois, la fameuse question de l’identité québécoise et des accommodements raisonnables. «Les valeurs que nous partageons, toutes origines confondues, nous les connaissons. Nous sommes francophones avant tout, solidaires, démocrates, tolérants et désireux du respect de notre identité.»
Manifestement, les militants qui assistaient au lancement de la campagne ont bien reçu le message. Les «Enfin! » et les «Bravo!» se succédaient devant les propositions de Mme Marois, qui a avoué avoir décidé très rapidement de revenir en politique après la démission d’André Boisclair. « J’ai surtout dit : "Je suis tellement bien dans mon jardin avec mes fleurs". Puis, autour de moi, quelques amis m’ont dit : "Tu devrais quand même te reposer la question pour n’avoir jamais de regrets de ne pas avoir offert à nouveau tes services." Et en moins de deux jours, je suis arrivée à la conclusion que j’avais toujours le goût de servir le Québec de cette façon-là. »
Elle a par la suite pris contact avec des militants et des collaborateurs pour constater que les appuis étaient toujours là. À tel point que Gilles Duceppe a dû déclarer forfait samedi soir, à peine 30 heures après avoir annoncé son ambition de devenir chef du PQ.
Mme Marois a tenu hier à souligner le « courage » et le « grand sens des responsabilités » du chef bloquiste. «Ce matin, je suis certaine que la grande famille souverainiste et québécoise est heureuse qu’il ait posé ce geste-là. Et à Gilles, je veux lui dire : "Cela te grandit. Merci."»


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