Mario Dumont courtisé par la communauté juive

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L'ADQ et la communauté juive

Le fameux jeudi soir où s’est jouée l’adoption du budget de Monique Jérôme-Forget à Québec, le chef de l’Action démocratique du Québec, Mario Dumont rencontrait à Montréal les plus influents leaders de la communauté juive, un groupe clairement mécontent du gouvernement de Jean Charest.

Le chef adéquiste avait été invité par le sénateur à la retraite Léo Kolber, historiquement un pilier du financement des libéraux, à Ottawa comme à Québec.
Pendant près de deux heures, à la résidence du richissime sénateur, des membres du gratin de cette puissante communauté montréalaise, une douzaine de personnes, se sont retrouvés pour souper avec Mario Dumont.
On y trouvait par exemple Steven Cummings, bonne connaissance de Jean Charest et ancien président de la Canadian Jewish Alliance. Selon un vétéran libéral habitué aux activités de financement du PLQ, le geste de l’ex-sénateur est tout un signal envoyé à sa communauté.
«Pour eux, Dumont a l’air d’être dans l’antichambre du pouvoir. Il a des bonnes chances d’être premier ministre d’ici un an. C’est une excellente raison pour ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier», résume-t-on.
Lors de son point de presse pour expliquer son absence aux ultimes négociations pour l’adoption du budget, le 1er juin, M. Dumont avait soutenu que la veille à Montréal, il n’avait eu «aucune activité d’ordre électoral».
Il avait précisé avoir eu des rencontres avec des représentants des groupes autochtones, de l’Union des artistes et «des groupes qui avaient des projets de développement économique».
Expliquant hier cette omission, Mario Dumont a dit qu’il «n’était pas de convenance normalement de rendre publique nos agendas et nos rencontres. J’ai donné l’exemple de l’UdA parce que je savais qu’il y avait un dossier qui allait être public dans les jours suivant» – le dépôt par l’ADQ d’un projet de loi sur le doublage de films étrangers –, d’expliquer Mario Dumont. «J’ai donné des exemples parce qu’il y avait une rumeur qui était partie selon laquelle j’étais allé rencontrer des candidats à Montréal. Mais je n’ai pas l’intention de rendre publics mes agendas», a tranché hier le chef adéquiste.
Selon lui, la communauté juive «est insatisfaite du gouvernement libéral, elle veut me connaître, elle voit qu’on est devenu opposition officielle, elle se dit qu’elle aurait dû investir plus de temps dans le passé à nous rencontrer».
«Cela ouvre des canaux de communications, il n’y a pas qu’eux qui veulent nous rencontrer depuis qu’on est devenus opposition officielle», d’expliquer le chef adéquiste.
Des sources libérales soutenaient à La Presse que le chef adéquiste avait ce soir-là obtenu des assurances quant à un niveau important d’appui financier de la communauté juive à la condition d’un appui à la demande de l’Hôpital général juif d’être reconnu comme hôpital universitaire.
«Il n’a jamais été question de financement ce soir-là, d’aucune façon. Ce sujet n’a pas été abordé», tranche-t-il. Que la communauté contribue au financement de l’ADQ, «ce n’est pas exclu, les partis politiques vivent de cela, mais il n’a pas été question de ça à cette rencontre», a précisé M. Dumont.
«Le plus proche des questions électorales abordé ce soir-là, c’est que je leur ai dit que j’étais ouvert si des leaders de leur communauté voulaient soumettre des idées, des propositions, mais le financement n’a pas été abordé», souligne le chef adéquiste.
Il reconnaît aussi que le groupe a fait « une présentation sur la reconnaissance du Jewish, mais j’avais déjà vu des présentations là-dessus, je ne tombais pas des nues».
Cette demande de rencontre avait été faite par le sénateur Kolber peu de temps après les élections, de préciser Jean-Nicolas Gagné, porte-parole de Mario Dumont. Ce dernier s’était trouvé à une cérémonie pour marquer l’anniversaire de la fondation de l’État d’Israël, une réception à laquelle tous les députés de l’Assemblée nationale avaient été conviés.
Selon certains libéraux cette prise de contact illustre clairement le mécontentement de la communauté juive à l’endroit du gouvernement libéral. Déjà M. Cummings n’était pas loin du gouvernement quand, au début 2005, le premier ministre Charest avait accepté – avant de renoncer à l’idée – que les écoles privées juives soient subventionnées à 100% par les fonds publics. M. Charest avait déjà accepté l’invitation de M. Cummings dans une résidence secondaire au Vermont.
Des sources au sein la communauté juive indiquaient à La Presse que ce groupe avait encaissé comme une insulte la récente décision du premier ministre de reléguer au poste de simple député Lawrence Bergman, ministre du Revenu durant tout son premier mandat. Les gouvernements libéraux à Québec ont toujours eu au moins un représentant de confession juive au Conseil des ministres – Victor Goldbloom et Herbert Marx sous Robert Bourassa, par exemple.
Fort apprécié dans sa communauté, M. Bergman avait atteint des niveaux records de financement pour le PLQ, avec plus de 750 000 $, une performance qu’avait même soulignée Jean Charest devant le caucus des députés. Lawrence Bergman était l’ancien notaire de M. Cummings, souvent consulté pour des décisions d’affaires. Le geste des Kolber et Cummings «fait très mal aux libéraux», a résumé pour La Presse un membre en vue de la communauté juive de Montréal.
La dernière livraison du Jewish Tribune, l’organe hebdomadaire de la communauté dans tout le Canada, sous la plume du chroniqueur pour le Québec, Mike Cohen, soutenait que le gouvernement Charest avait tenu les anglophones pour acquis. Si des élections avaient lieu à court terme, l’ADQ formerait le gouvernement, selon lui.
La nomination de M. Bergman au Conseil des ministres «avait été vue comme un geste approprié pour la communauté juive qui a appuyé les libéraux si fermement au cours des dernières années, en particulier quand venait le temps des contributions financières».
«Les libéraux doivent laisser tomber Charest (...) Il y a déjà des discussions de coulisses disant qu’il pourrait démissionner à l’automne», écrit Cohen. N’importe qui sauf Charest, c’est le plan qui représente la seule chance pour les libéraux d’être réélus», conclut-il.


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